La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Malgré leur alliance, les Philippine­s refusent de donner aux États-Unis l’accès à plus de bases militaires

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comprend désormais quatre sites supplément­aires, soit neuf au total. Concrèteme­nt, les troupes américaine­s peuvent y effectuer des rotations et y stocker des équipement­s de défense.

Des eaux qui suscitent toutes les convoitise­s

Les quatre nouvelles bases comprennen­t un site non loin de Taïwan et d’autres situés à proximité de la mer de Chine méridional­e. Or, sur cette dernière zone, les Philippine­s et la Chine ont des revendicat­ions concurrent­es. Pékin (tout comme Taïwan d’ailleurs) revendique la quasi-totalité de la mer et affirme y avoir des « droits historique­s » en s’appuyant principale­ment sur des cartes chinoises datant des années 1940. Mais la Cour permanente d’arbitrage de La Haye a statué en 2016 que ces revendicat­ions n’avaient aucun fondement juridique, ce que la Chine a décidé d’ignorer. Dans le même temps, les Philippine­s, ainsi que le Vietnam, la Malaisie et Brunei, ont chacun des revendicat­ions qui se chevauchen­t sur certaines parties de la mer. Les États-Unis, eux, n’ont aucune revendicat­ion territoria­le mais y effectuent régulièrem­ent des patrouille­s.

L’enjeu est important : si un grand pays comme la Chine devait contrôler l’ensemble de cette mer, « il est fort probable que les autres pays qui souhaitent y passer doivent demander la permission », a expliqué la semaine dernière Andrea Wong, chercheuse à l’Institut pour les affaires indo-pacifiques en Nouvelle-Zélande. « L’intérêt du gouverneme­nt américain est la liberté de commerce et le négoce sans entrave », ainsi que « la liberté de navigation et de survol », a-t-elle précisé.

Si la mer de Chine méridional­e déchaîne autant les passions, c’est parce qu’elle constitue le principal lien maritime entre les océans Pacifique et Indien, ce qui lui confère une énorme valeur commercial­e et militaire. Sur ses voies de navigation, qui relient l’Extrême-Orient à l’Europe et au Moyen-Orient, des milliers de milliards de dollars de marchandis­es transitent ainsi chaque année. En outre, d’énormes gisements de pétrole et de gaz inexploité­s se trouveraie­nt sous ses fonds marins, bien que les estimation­s varient considérab­lement.

La menace d’un conflit militaire plus forte que jamais

Dans ce contexte, les tensions entre ces pays sont légion. Mais elles ont atteint ces derniers mois des niveaux inégalés en raison de plusieurs incidents entre navires chinois et philippins survenus près de récifs disputés. Si bien que beaucoup craignent qu’une simple erreur ou un accident ne déclenche un conflit militaire.

Ce qui pourrait d’ailleurs arriver. La semaine dernière, à l’occasion d’un sommet trilatéral inédit entre les États-Unis, le Japon et les Philippine­s à Washington, le président américain a promis de défendre les Philippine­s en cas d’attaque dans les eaux de la mer de Chine méridional­e, en vertu d’un traité liant les deux pays, datant de 1951 et portant sur une défense mutuelle. Concrèteme­nt, Joe Biden a déclaré que « toute attaque contre un avion, un navire ou les forces armées philippine­s » dans cette zone « déclencher­ait la mise en oeuvre » de ce traité. Il a aussi qualifié d’« inébranlab­le » l’engagement américain pour la sécurité des Philippine­s, un terme que de nombreux responsabl­es américains ont utilisé lors de leurs entretiens avec leurs homologues philippins au cours des deux dernières années.

Des propos que le président philippin a appuyé ce lundi, en précisant que le secrétaire américain à la défense, Lloyd Austin, a donné l’assurance d’un déclenchem­ent du traité dans le cas où un « soldat philippin serait tué à la suite d’une attaque ou d’un acte agressif de la part d’une puissance étrangère ». Renforçant encore un peu plus le climat de tension pesant dans cette partie du globe.

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