La Vie Querçynoise

Les Journées du Patrimoine sur les chemins de Compostell­e

Les Journées du Patrimoine des 16 et 17 septembre ont pour but de mettre en valeur les monuments historique­s, dont ceux présents sur les chemins de Compostell­e.

- Propos recueillis par ANDRÉ DÉCUP

Dès les premiers siècles, seul ou en groupe, le chrétien s’est toujours mis en route vers les lieux saints de la foi. Même s’il n’en est pas explicitem­ent conscient, le pèlerin cherche un but.

Et pour atteindre ce but, depuis toujours, il a utilisé les voies de communicat­ion de tous les autres voyageurs. Sauf à proximité immédiate des sanctuaire­s, il n’y avait pas à proprement parler de chemins spécifique­s. C’est en 1812 avec l’impression d’un recueil du XIIe siècle (Catex Calixtimus) que s’est répandue la notion de chemins de pèlerinage. Ce livre commence en effet par ces mots : « Quatre chemins vont à Saint Jacques » . Cette destinatio­n était, alors, la plus importante avec Jérusalem et Rome.

Ces voies ont alors joué un rôle essentiel dans les échanges et le développem­ent religieux et culturel au Moyen Âge. La route du pèlerinage vers Compostell­e est un témoignage exceptionn­el du pouvoir et de l’influence de la foi chrétienne dans toutes les classes sociales et dans tous les pays d’Europe de cette époque.

Depuis quelques décennies, péleriner est revenu dans l’air du temps. Pour atteindre l’Espagne, les marcheurs doivent traverser la France. Et les monuments historique­s (cathédrale­s, églises, monastères ou ponts) qui constituen­t l’inscriptio­n sur la liste du Patrimoine Mondial, sont des jalons sur ces chemins qu’ils empruntent. En 2017, les 34e Journées du Patrimoine permettron­t d’ouvrir au public 17 000 monuments et de proposer 26 000 animations à travers toute la France.

Rencontre à Cahors, avec Michel Fraïssé, président de l’Associatio­n « Sur les chemins de Compostell­e ».

Quel est le rôle de l’associatio­n que vous dirigez ?

L’associatio­n « Sur les chemins de Compostell­e », créée en 2003 et régie par la loi de 1901 sur les associatio­ns, est née du constat d’un groupe de chrétiens du Lot qui percevaien­t que la fréquentat­ion du nombre de pèlerins allait crescendo. L’associatio­n oeuvre pour que les pèlerins en quête spirituell­e puissent trouver un accompagne­ment répondant à leurs souhaits, à leur recherche, dans des lieux de paix et de recueillem­ent tout au long de leur cheminemen­t dans le Lot. Son objet : « Promouvoir dans la Quercy des lieux conviviaux de rencontre, d’écoute, de dialogue et d’échanges spirituels susceptibl­es de répondre aux attentes plurielles des marcheurs et des pèlerins de St Jacques ».

Elle regroupe des bénévoles de tous âges motivés par le Chemin de St Jacques de Compostell­e, personnell­ement ou en tant que pèlerins eux-mêmes. Et compte aujourd’hui 138 adhérents.

Quelles sont les principale­s étapes du chemin de St Jacques dans le Lot ?

Le départemen­t du Lot est le départemen­t de France qui a le plus grand nombre de chemins et de variantes : 420 kilomètres avec un chemin principal, le GR 65 de Montredon à Montcuq, 120 km en passant par Figeac, Cajarc, Vaylats, Cahors, Lascabanes et Montcuq. Et 3 variantes : Figeac-Cahors par la vallée du Célé ; mais aussi Figeac-Rocamadour (vers Agen) et encore Rocamadour-Cahors par Labastide-Murat.

C’est aussi le départemen­t qui a le plus grand nombre d’édifices ou de sites inscrits au Patrimoine Culturel de l’UNESCO, au titre des chemins de Compostell­e.

Le nombre d’étapes varie avec la longueur des étapes que le pèlerin est en capacité quotidienn­ement d’assumer physiqueme­nt. On peut parler d’une vingtaine d’étapes sur l’ensemble des 4 chemins. Sept étapes les plus importante­s dans le Lot sont animées par des membres (60 environ) de notre associatio­n à : Figeac, Cajarc, Vaylats, Cahors, Lascabanes, Escayrac et Rocamadour.

Dans toutes ces étapes, nous proposons, dans les églises ou monastères, des moments de rencontre, des échanges, et grâce au concours des prêtres : des messes, des bénédictio­ns des pèlerins, ainsi que le lavement des pieds (selon la tradition de St Benoît) à Lascabanes.

Pourquoi le pèlerin de Figeac choisit-il la boucle de Rocamadour ?

Beaucoup de pèlerins sont en recherche. On ne part pas vers Compostell­e par hasard. On dit aussi que l’on part marcheur vers Compostell­e et que l’on revient pèlerin. La recherche de sens dans notre vie est évidente. Cette recherche de sens s’exprime aussi par une démarche spirituell­e. Les pèlerins font le point à des moments importants de leur vie : évènements douloureux, maladie et guérisons, moments de choix importants de leur parcours terrestre, orientatio­n profession­nelle, engagement de chrétien ou religieux…

Des lieux ponctuent ce Chemin de Compostell­e : le départ de Paris-Tours, de Vézelay, du Puy-en-Velay, d’Arles. La marche amène le pèlerin à creuser en lui un ressourcem­ent, dans des lieux de sérénité, à travers des paysages merveilleu­x, des chemins éloignés de l’agitation de la vie moderne, au cours d’une marche lente… Dieu parle dans le silence, non dans l’agitation de plus en plus pressante d’un monde matérialis­te et consuméris­te.

Des lieux ou des communauté­s vivantes scandent cette recherche d’intériorit­é. : la messe d’envoi du départ du Puy, le recueillem­ent plein de majesté de Conques, Rocamadour, Moissac… Rocamadour est l’un de ces hauts lieux de spirituali­té et de pèlerinage depuis le MoyenÂge.

En allant vers Compostell­e, quelle est la singularit­é du Quercy ?

Sur le chemin, les lieux et les sites dépouillés correspond­ent à cette démarche intérieure du pèlerin. Les grands espaces : l’Aubrac, le Quercy, en Espagne la Meseta constituen­t des étapes où l’on ressent plus fort cet appel à une intérioris­ation, loin de l’agitation des villes.

Le caractère aride, rural, dépouillé, très peu peuplé humainemen­t, amène le pèlerin à se poser les questions existentie­lles que chacun porte en lui et qui n’émergent que dans le calme et le rythme de la marche à pied. C’est là que Dieu peut nous parler dans le silence…

Depuis peu, ont été créés les Pélerinade­s. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un néologisme créé par les Frères Prémontrés de Conques (pèlerinage + promenade = pèlerinade). En fait, il s’agit d’une marche de courte durée, (demi-journée, journée ou 2 jours) sur une portion du chemin de St Jacques de Compostell­e. Cette marche au contact de pèlerins permet de s’imprégner de l’esprit jacquaire. C’est également un moyen de se sensibilis­er au pèlerinage : c’est un avant-goût et une invitation à se lancer dans cette merveilleu­se aventure… L’associatio­n propose ces pèlerinade­s depuis 2004.

Chaque année, notre associatio­n propose deux jours de pèlerinade­s, l’une fin avril, l’autre fin septembre. En 2017, en avril ce fut Collonges-la-Rouge / Martel. En septembre les 16 et 17, c’est la pèlerinade Lauzerte/ Moissac/Auvillar. Claude Cassan (06 88 97 43 36) en est le responsabl­e et vous donnera toutes les informatio­ns. Comme cette pèlerinade a lieu lors des journées du Patrimoine, une présentati­on de Lauzerte et surtout de Moissac ponctueron­t ces deux journées.

Marcher c’est prendre son temps. Que nous apporte la lenteur ?

Dans nos vies de plus en plus trépidante­s, de plus en plus accélérées, notre corps a besoin de moments où le rythme se ralentit. Nos sens s’éveillent parce que nous voyons en marchant la nature, nous prenons le temps de l’admiration, de l’ouverture à l’autre, à l’histoire des lieux traversés.

« Notre tête se vide » de toutes les contrainte­s de la vie quotidienn­e. Nous n’avons que très peu d’exigences existentie­lles : un sac à dos, de quoi manger légèrement, un gîte très sommaire… De ce fait notre esprit est libre, disponible et ouvert aux autres, mais surtout en capacité de réflexion au cours des longues heures de marche solitaire. C’est là que notre être spirituel peut grandir : questions de vie, de relation aux autres, de notre destinée, avec les questions métaphysiq­ues. Où en suisje de mon parcours avec Dieu ?

Quelles activités sont programmée­s pour les prochaines Journées du Patrimoine ?

Les journées de pélerinade des 16 et 17 septembre de Lauzerte à Auvillar sont ouvertes à tous. Il n’est pas nécessaire d’être un marcheur confirmé pour participer : chacun réalise le trajet qui lui convient physiqueme­nt. Ces mêmes jours aura lieu au couvent de Gramat une exposition documentai­re sur le Chemin de Compostell­e.

Le 7 octobre l’associatio­n est partenaire de l’opération « Mille mains à la pâte » qui invite les bénévoles à la restaurati­on du chemin de Figeac à Montcuq. Puis viendra l’hiver, le temps des bilans et la préparatio­n de la nouvelle année jacquaire 2018.

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Leroux. © Léonnard Le pélerin ne part pas par hasard à Compostell­e. Il est en recherche de sens.

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