« La Normandy », l’histoire de bénévoles passionnés
La quinzaine de passionnés de l’association qui s’occupe du cinéma de Tinchebray a accueilli deux nouveaux membres. Rendezvous dans les coulisses de la salle obscure.
Ils ne sont qu’une quinzaine et ne reçoivent pas de rémunération, si ce n’est le plaisir de partager leur passion. Pourtant, grâce à leur engagement désintéressé, une petite ville comme Tinchebray a une salle de cinéma qui fonctionne. Chaque semaine quelques films sont projetés grâce au travail d’une équipe. Parmi les bénévoles, deux ont rejoint, depuis peu, le petit groupe.
Alain Pétrignani et Claude Cailly ont attendu d’être à la retraite pour s’engager.
Les deux nouveaux collègues avaient été sollicités à plusieurs reprises par le maître des lieux et secrétaire de l’association Claude Mazé. Le gérant du cinéma est viscéralement attaché au cinéma. « Lorsque j’étais étudiant à Paris, je passais mes après midis dans les salles de cinéma. J’ai toujours adoré cela » .
Depuis 13 ans, il est aux commandes : « j’ai commencé ici avec des bobines de films de 40 kg, nous n’étions que 4 ou 5. » Le réseau « Génériques » « envoyait un projectionniste pour chaque séance, il faisait tout le boulot. À force de l’observer et après être allé voir le travail dans les autres salles de cinéma, j’ai décidé de m’y mettre » . « Génériques » est un réseau qui accompagne les collectivités locales qui souhaitent maintenir et développer une activité cinématographique régulière sur leur territoire.
Aujourd’hui, les trois bénévoles nous entraînent dans les coulisses de la salle obscure. La salle de projection se résume à quelques mètres carrés où trônent deux imposantes machines. Deux générations de projecteurs y sont présentes. C’est avec un petit pincement au coeur que Claude Mazé regarde le 35 mm qui fait aujourd’hui figure d’antiquité.
Le nouveau matériel avoisine les 900 000 €. Le numérique, qui règne aujourd’hui, est relié à un espace temporaire de stockage informatique. Depuis qu’il est bénévole, Alain Pétrignani s’est formé au nouveau fonctionnement « devant l’écran de l’ordinateur, je réceptionne le fichier du film que vient d’envoyer « Génériques » . Le film arrive sur un support externe de stockage sécurisé. Il est ensuite stocké sur une bibliothèque numérique le temps du visionnage » .
Une gestion minutieuse
Les films sont envoyés à chaque salle de cinéma dans toutes les versions, le travail est aussi de sélectionner les versions originales ou sous-titrées ou les VF (Version File).
L’envoi d’un film depuis Caen à Tinchebray coûte en moyenne de 300 à 400 €. « Si nous vendons seulement 10 places à 5 €, nous sommes déficitaires » . Alain Pétrignani consacre 2 à 3 heures par semaines à ces préparations.
Le moment venu de la projection, c’est Claude Cailly qui intervient. Il a rejoint le groupe de cinq autres projectionnistes bénévoles. « Mes compétences sont plus limitées que celles de Claude et Alain. Je dois arriver 3/4 d’heures avant le début de film pour la mise en route du système. C’est du matériel fragile. Tout mettre en place prend du temps. J’ai passé du temps à observer les autres avant de me lancer ».
Un choix sur-mesure
Les films ne passent pas ici aux mêmes dates que les sorties nationales. « Une salle de cinéma doit être en mesure de projectionner au moins 10 fois un film lors de sa sortie, explique Claude Mazé. Comme nous ne pouvons pas le faire ici, nous sommes obligés d’attendre. Il y a un décalage d’environ 4 semaines. Les grandes salles de cinéma sont des entreprises privées qui payent du personnel. Nous ne sommes que quelques bénévoles » .
Le travail de ces nouveaux bénévoles s’ajoute à celui d’un autre groupe. Une fois par mois, entre six et huit personnes se réunissent et choisissent la liste pour Tinchebray parmi une présélection de 15 à 20 films proposés par « Génériques ». « Ce n’est pas toujours évident de se faire une idée avec une bande-annonce et des commentaires, avant sa sortie. Nous devons imaginer si le film aura ou non du succès chez nous. On choisit les films que l’on aime, mais le spectateur est roi, alors nous sélectionnons des films grand public, pour enfants et d’arts et d’essais » .
Les bénévoles vivent la passion du cinéma. « Nous pourrions facilement être plus nombreux, cela rendrait la tâche plus légère pour chacun d’entre nous, ce serait moins contraignant » . L’association fonctionne grâce au soutien de la municipalité. « Il reste de nombreux points à améliorer, le guichet d’accueil, la caisse, les toilettes qui n’ont pas d’accès pour les personnes à mobilité réduite » .
La salle de 250 places accueille les spectateurs anglophones un jeudi par mois avec des « tea, coffee, cakes » avant la projection. De nombreux films « Arts et Essais » sont projetés en versions originales.
Les secrets de la salle obscure