Un ovni au pays des vaches
Avec Guillaume Vautier, ils ne sont que trois éleveurs de brebis dans le Bocage. La Bergerie de la Souleuvre ouvre ses portes dimanche 2 juillet. Une belle occasion de découvrir les produits rares fabriqués sur place.
Guillaume Vautier est un Bocain pure souche. Né à Vire il y a presque 44 ans, il a vécu son enfance près de ses parents à Bény-Bocage. Petit-fils d’exploitants, après une scolarité classique, le jeune Guillaume s’est tourné tout naturellement vers la filière de l’industrie agroalimentaire dont il ressort BTS en poche.
En 2005, il s’installe en GAEC, essentiellement en production de lait de vache. Mais déjà, il élève quelques brebis sur l’exploitation. « En fait, j’avais cette idée depuis longtemps dans la tête. Il m’aura fallu attendre 2007 pour me lancer dans l’aventure » . Cette idée folle qui trottait dans la tête du dynamique quadra c’était de monter un atelier de transformation de lait de brebis. À l’époque où un seul éleveur de brebis était installé dans le secteur (aujourd’hui encore, ils ne sont que 3), l’idée semblait particulière saugrenue.
Un potentiel énorme
Qu’à cela ne tienne, en 2009, Guillaume quitte le GAEC pour s’installer seul sur son exploitation. 56 hectares dédiés alors aux brebis à viande et céréales ? « C’est ce que je savais faire et il me fallait rentrer un salaire » . Mais les finances ne suivent pas et le jeune exploitant se voit quelque temps contraint de travailler en parallèle dans une boutique de décoration à Vire. Les années passent, pourtant Guillaume ne perd pas de vue son projet auquel il croit. « Le lait de brebis est toléré par la plupart des consommateurs intolérants aux protéines de vache ; son goût est doux contrairement au lait de chèvre. Je ne voulais pas ne faire que des fromages ; le lait de brebis se prête parfaitement à toutes sortes de préparations. C’est un produit qui a un potentiel énorme », souligne-t-il.
Tout à construire
C’est en 2014 que Guillaume Vautier, soutenu par Solenn son épouse institutrice, « saute le pas » , quitte son emploi de vendeur et décide de se consacrer entièrement à son projet d’atelier de transformation. La période qui a suivi s’est révélée difficile et Guillaume a dû déployer une énergie énorme. « Début 2015, tout était à faire, tout était à construire » . Etude de marché, dossiers de demande de subventions, permis de construire… le jeune exploitant travaille d’arrache pied pour franchir les multiples embûches Convaincre les banquiers n’a pas été chose facile. « C’était une période passionnante où je me suis investi quasiment 24h/24h mais c’est aussi une période où je me suis senti très seul car je n’avais aucun modèle dans la région », explique Guillaume qui part alors compléter sa formation auprès d’éleveurs de l’Aveyron, des Pyrénées et de Bretagne.
En Octobre 2016, Guillaume accueille son premier cheptel : 70 brebis laitières de race la- caune, reconnue pour la qualité de sa production. Les travaux de réaménagement des anciennes écuries débutent aussitôt ; elles deviendront atelier de transformation, salle de stockage et d’affinage. Les événements s’accélèrent et en janvier 2017, Guillaume part dans l’Aveyron démonter une salle de traite pour la ramener en Normandie ; il s’y cassera les doigts : fracture ouverte. Les travaux avancent malgré tout à grands pas « Fin mars, nous avons fini tout ce qui permet la fabrication le stockage et l’affinage. On a commencé la fabrication au mois d’avril » .
Le succès au rendezvous
Yaourts nature, sur lit de confiture de fruits ou aromatisés au citron ; bientôt rhubarbe… Guillaume fourmille d’idées et d’envies. Fromage blanc battu, fromage frais nature et aromatisé, fromage affiné (dont une tome qui sortira bientôt d’affinage) complètent la gamme qu’il vend depuis début mai sur les marchés et dans certaines épiceries de la région. Et le succès est au rendez-vous pour la Bergerie de la Souleuvre. Une fois levée la confusion avec le lait de chèvre, les clients plébiscitent l’onctuosité et la douceur de ce lait… et la teurgoule au lait de brebis cuisinée par Solenn titillent les papilles des amateurs. « Dès la deuxième semaine, les clients sont revenus et la demande augmente constamment. Je fais venir 20 nouvelles bêtes qui arrivent la semaine prochaine pour compléter le troupeau. La période de lactation des brebis est courte et les températures élevées enregistrées ces derniers jours ont fait chuter la production de 30 % », explique Guillaume. Une bonne brebis lacaune produit 1 litre de lait par jour.
Concert, dégustation et tombola
Mais Guillaume n’est pas homme à se reposer sur ses lauriers et travaille à de futures nouvelles productions en cours de test : un fromage de type feta très prometteur. Une glace au lait de brebis pourrait également voir le jour à moyen terme.
Et comme faire prospérer une entreprise, c’est avant tout fabriquer des produits de qualité mais également les faire connaître, Guillaume organise une aprèsmidi portes ouvertes à la Bergerie de la Souleuvre le dimanche 2 juillet dès 14h.
Les visiteurs pourront visiter les locaux, découvrir le futur magasin qui permettra la vente sur place mais également assister au démoulage des fromages et goûter les produits laitiers et les viandes (Guillaume a conservé 145 brebis à viande). Une grande tombola permettra aux chanceux d’emporter des lots de produits de la bergerie. Il se murmure même que Quart’Sax, quatuor de jazz pourrait venir assurer l’animation musicale de cet après-midi à la ferme ; un certain Guillaume Vautier en serait membre.
« Surtout n’oubliez pas d’écrire dans votre journal que mon père Gilles, à la retraite, m’aide énormément », conclut Guillaume avant de repartir au milieu de ses brebis.