Une perle rare exposée
Durant l’été, découvrez une pièce rare issue des collections de l’un des musées du Bessin consacrés à la thématique du Débarquement et de la bataille de Normandie : l’appareil de codage allemand Enigma, à Vierville-sur-Mer.
Après une guerre de position en 1914-1918, la stratégie s’est orientée vers la guerre de mouvement. Tout comme les tactiques, les communications ont évolué avec les enseignements tirés de la Grande guerre. Si les pigeons voyageurs ont repris du service lors de la Seconde Guerre mondiale, l’utilisation des ondes radio a permis de délivrer des messages rapidement et à grande échelle.
Sécuriser les transmissions
Si l’argent est le nerf de la guerre, la sécurisation des communications et le renseignement sont fondamentaux pour appliquer avec succès les stratégies militaires.
Côté allemand, les messages étaient codés à l’aide d’une machine au nom évocateur : Enigma. Un appareil électromécanique simple d’utilisation, mais redoutable d’efficacité, conçu dans les années 1920 et adopté à partir de 1933 par la Wehrmacht. Muni d’un clavier de 26 lettres, de plusieurs roues de codage, et d’un panneau de branchements permettant, en plus, de mélanger les lettres, l’Enigma offrait des milliards de combinaisons possibles. Un calvaire pour les décrypteurs alliés. Pourtant, Enigma possédait des failles. aux Britanniques par des espions polonais et français. Une équipe d’experts en mathématiques, en physique, ainsi que des spécialistes des échecs, a été montée par Londres pour décrypter les messages d’Enigma. Dans cette équipe qui travaillait dans le plus grand secret, on trouvait le génie des mathématiques Alan Turing, le père de l’informatique. Il est l’inventeur d’une machine, le premier calculateur (ancêtre de l’ordinateur), Colossus, qui a décrypté Enigma » .
C’est le fameux dispositif Ultra qui, dès le début de la guerre, a permis aux Alliés d’avoir un coup d’avance sur les opérations du Reich. « Les Alliés ne pouvaient pas ébruiter cela et devaient alors accepter, par exemple, la perte de certains convois. Mais ils estimaient que le décryptage de l’Enigma a sauvé 14 millions de vies et écourté la guerre de 2 à 4 ans » .
Quatre Enigma en France
L’Enigma exposée au musée D-Day Omaha de Vierville-sur-Mer est l’un des 4 appareils visibles en France. « Les premiers modèles étaient développés pour la Kriegsmarine. Le musée du codage de Washington nous a permis d’identifer notre modèle, produit en 1935 » . Une rareté.
« Il existe quatre exemplaires en France, dont un au Mémorial de Caen et un aux Invalides à Paris. Notre modèle M3 possède trois rotors, un système électromagnétique qui code l’alphabet. C’est très complexe mais Alan Turing est venu à bout de cette machine. Ses travaux ont été reconnus à titre postume. Il était homosexuel et ses travaux ont été passés sous silence. On l’a même forcé à la castration chimique. D’après la légende, il se serait suicidé en croquant une pomme au cyanure, ce qui aurait inspiré à Steeve Jobs le logo de la marque Apple » . Ce serait là un bel hommage à cet homme qui a posé les bases de l’ordinateur
Retrouvée dans un vide-grenier et proie des cambrioleurs
L’Enigma, « c’est la pièce maîtresse du musée » , assure Cécilia Robert. Un objet « trouvé par un ami de Michel Brissard sur une brocante. La vendeuse pensait qu’il s’agissait d’une machine à écrire qui ne fonctionnait plus ». Mais elle attire les convoitises. Dérobé en mars 2008, l’appareil a été retrouvé à Paris. A l’époque, le musée avait rapidement annoncé le vol sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes s’étaient mobilisés. L’Enigma avait été retrouvé grâce à un appel d’un collectionneur. Cambriolé en septembre 2016, le musée avait alors déploré le vol d’armes…
Depuis sa création en 1999, c’est la seconde fois que le musée est la proie de voleurs. « Le musée a été fondé par Michel Brissard. Un collectionneur passionné qui a amassé des milluers d’objets en 50 années de recherches (90 % de la collection est issue de recherches, 5 % de dons et 5 % d’achats). Un tiers seulement des collections est exposé dans les murs de cet anicen hôpital américain construit au lendemain du Débarquement et qui, plus tard, fut transformé en salle des fêtes par la municipalité avant de devenir l’actuel musée » .
« Une équipe d’experts chargée de décoder les messages d’Enigma »