La Voix - Le Bocage

Michel Gonnaud a passé 4 mois avec les Bassa, l’ethnie de la famille Mbappé

Vous le connaissez déjà. Michel Gonnaud, c’est le Bocain âgé de 75 ans qui traverse le monde en stop. Il vient de rentrer du Cameroun et nous raconte une de ses nouvelles aventures.

- • Isabelle INNOCENTI

Il est parti de Vire au mois de novembre dernier. Michel Gonnaud est arrivé au Cameroun, 5 000 km plus loin, avec comme seul moyen de locomotion le stop.

« Une maladie dont on ne guérit pas »

Même s’il reconnait avoir toujours une appréhensi­on lorsqu’il prend la route, pour lui, traverser un continent en stop est presque de la routine. Il confie quand même : « c’est une maladie dont on ne guérit pas. J’ai toujours une émotion avant de faire du stop en France. En Mongolie, au Qatar... Je suis pris tout de suite, mais en France, les automobili­stes m’observent, me klaxonnent. Ici, c’est plus difficile de faire Vire-Mortain que de traverser un continent ».

Une difficulté qu’il sait surmonter finalement puisque depuis des décennies, il traverse le monde. Tout d’abord pour suivre la coupe du monde de football où qu’elle se joue, mais aussi et surtout pour continuer d’être un pèlerin voyageur.

Un pèlerinage chrétien

Cette fois, il était parti pour suivre les pas de Charles de Foucauld. Cet ancien officier de cavalerie de l’armée française devenu explorateu­r et géographe, puis religieux catholique, prêtre, ermite. Mais finalement, l’entrée en Algérie a été trop compliquée à cause de tracasseri­es administra­tives.

Il a changé de cap et les hasards du voyage l’ont conduit au Cameroun. C’est en suivant un pèlerinage chrétien dans la ville de Bafoussam -qui pour la petite histoire est jumelée avec la paroisse Sainte-Marie du Cotentin - qu’il fait la rencontre avec la famille Eoné, composée d’une quinzaine de personnes.

Une magnifique rencontre puisqu’il va être hébergé chez eux. « Il font partie de l’ethnie des Bassa. Au Cameroun, il y a 400 ethnies différente­s. Celle-ci est la tribu d’origine du père du joueur de football Kylian Mbappé. C’est une tribu chrétienne. On allait à la messe. Des messes incroyable­s qui durent des heures. Mais là-bas, les conditions de vie sont difficiles. Il n’y a pas d’eau courante, l’électricit­é est tout le temps coupée. Il faut faire 150 km pour trouver un distribute­ur de billets. On mange surtout du plantain et du manioc. Il y a un supermarch­é Carrefour et Spar, mais la nourriture de chez nous est vendue 2 à 3 fois plus chère ».

Michel Gonnaud n’en revient pas de la générosité des personnes sur place. « Là-bas, on vit pour les autres. C’est en eux. Les joueurs de football notamment ramènent des devises dans le pays. C’est comme ça, il sont envoyés chez nous et ensuite, ils rentrent dans la règle camerounai­se et envoient de l’argent ». On sait que Kylian Mbappé a d’ailleurs créé une fondation pour aider son pays. Il est revenu sur place l’an passé. « Il a notamment financé la création d’une école, mais c’est tout ce que je sais sur lui ».

Autre source de surprise pour le Normand, la façon dont est vécue la mort d’un proche. « Chez nous, lorsqu’il y a un mort, on vend sa maison. Là-bas, on en construit une. On met le défunt dans une chambre froide pour lui construire une case où on pourra l’enterrer. Ensuite, un gardien veille sur la tombe ».

« Le football est une religion »

Fatigué, Michel Gonnaud reconnait avoir des difficulté­s à se remettre de son périple, car cerise sur le gâteau, lorsqu’il a emménagé chez les Eoné, commençait la Coupe d’Afrique des Nations. « Là-bas, le football est une religion. Les gens prient avant un match. Du coup, je ne me sens pas dépaysé, car ma maison, c’est l’église », confie-t-il avec un sourire tendre. Mais il a fallu quand même suivre l’événement, qui se prolongeai­t tard dans la nuit, durant des semaines.

Repartir en Afrique

Et puis patatras, au mois de mars, on lui annonce qu’un membre de sa famille est gravement malade. « Il fallait que je rentre au plus vite. Je suis allé à l’ambassade de France, mais on n’a pas voulu me rapatrier pour cette raison. J’ai donc pris l’avion ». Un choix qui n’est pas dans les habitudes de Michel Gonnaud, qui s’était donné un mois supplément­aire pour rentrer en stop.

Aujourd’hui, le pèlerin a retrouvé la verdure du Bocage. Avant de repartir en Afrique -car il compte bien repartir- il souhaitera­it accueillir à son tour, chez lui des membres de la famille qui l’ont hébergé. Mais ce n’est pas si simple que de monter dans un avion pour les Africains. Avant d’obtenir un visa de tourisme, ils doivent justifier d’avoir sur leur compte en banque un montant de 5 millions de francs CFA (l’équivalent de 7500 €). Une somme qu’ils n’ont pas. « Je suis allé en parler avec le curé de Mortain pour savoir si on ne pouvait pas lancer une souscripti­on, ou alors faire un jumelage pour pouvoir les aider ».

Pour l’instant, il en est là, mais ne perd pas du tout espoir que cela aboutisse. « Ce n’est pas impossible de réunir cette somme et ensuite de rembourser les donateurs ». En attendant, il continue ses échanges avec ses nouveaux amis via WhatsApp.

Là-bas, on vit pour les autres MICHEL GONNAUD

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Michel Gonnaud continue ses échanges avec ses amis camerounai­s via les réseaux sociaux.
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Ici en compagnie d’un autre membre de la famille, MarcOlivie­r, qui venait de recevoir ses galons de sous-lieutenant des pompiers.
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Ici au Cameroun en présence de Jean-François Eoné, commandant des douanes à Yaoundé.

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