Un collège «mort» en opposition à la réforme du «choc des savoirs»
Face à la réforme dite du « choc des savoirs » qui se profile à la rentrée pour les collèges, celui de Villers-Bocage s’est mobilisé, mercredi 17 avril, avec une « journée morte » très suivie.
ls n’ont été que huit élèves I à venir en cours, le matin du mercredi 17 avril, au collège Simone-Veil de Villers-Bocage. La raison : une opération « collège mort » organisée à l’initiative de l’équipe enseignante du collège, appelant les parents à ne pas envoyer leur enfant en cours. Qui a donc été très suivie, à la grande satisfaction des professeurs.
Un ras-le-bol de longue date
Car avec cette action symbolique, ceux-ci veulent avant tout continuer à protester contre la réforme du collège qui se profile pour les rentrées 2024 et 2025, le « choc des savoirs », annoncée par Gabriel Attal fin 2023. Le collège villersois avait déjà fait entendre sa colère une première fois lors d’une manifestation en février 2024 devant l’établissement. Puis une seconde à l’occasion du retour d’Elisabeth Borne en tant que députée, où cette dernière avait assuré aux enseignants une rencontre prochaine, « mais elle n’a jamais cherché à revenir vers nous depuis ».
Deux mois plus tard, les raisons de cette opposition n’ont pas changé, d’autant qu’elle illustre un ras-le-bol qui couve depuis déjà plusieurs années. « Cette réforme a réveillé plein de choses chez nous», témoignent les enseignants. « Cela fait des années que les conditions se dégradent, avec des classes surchargées jusqu’à 29 élèves, des élèves qui arrivent en cours d’année et qu’il faut intégrer… Là, cela heurte vraiment de s’impliquer dans des dispositifs en lesquels on croit, avec des retours positifs, et qui vont être balayés pour un nouveau fonctionnement même pas étayé par la recherche, et sans aucune liberté. »
De nombreux impacts sur l’année scolaire
« Ce qu’on voudrait, ce sont des classes moins chargées », tonnent les professeurs. Or, ce ne serait pas à l’ordre du jour avec cette réforme. Les classes pourraient être tout aussi chargées, tout en impactant les travaux en cours de sciences (pour les manipulations pratiques), en langues (pour l’oral), ou en options comme le latin. « Les élèves pourraient aussi subir le choix de leur LV2. »
Mais c’est encore loin d’être la seule chose qui fait tiquer les enseignants, en particulier avec la mise en place de groupes de niveau. « Cela va déstructurer les classes à la manière du lycée depuis la réforme Blanquer, où tous les professeurs constatent un mal-être terrible. Il va falloir constamment changer de groupe les élèves, alors qu’ils ont justement besoin de stabilité. Avec ces groupes, ce serait la fin du bien vivre ensemble des élèves, on perdrait la cohésion, l’entraide et l’émulation actuelles, et il ne faut pas croire que c’est en mettant les moins bons élèves ensemble que l’on pourra gommer leurs difficultés antérieures en faisant mieux que leurs précédents professeurs. Cela ne marche pas comme ça. »
Informer les familles des écoliers
Parmi les sujets principaux de la fronde, les groupes de niveau inquiètent et concernent également les écoles, puisque les professeurs vont devoir donner une indication du niveau des élèves de CM2 à leur entrée en 6e. Qui sera ensuite complétée par une évaluation en début d’année. «Cela va forcément créer des tensions avec les parents, dans le cas où leur enfant n’arriverait pas dans le “bon” groupe. Et plus généralement, on observe un gros impact psychologique sur ces évaluations à répétition, on aimerait enseigner plutôt qu’évaluer. »
En prévision de ce bouleversement à venir, les professeurs du collège ont rencontré leurs homologues de primaire des environs, ainsi que des parents d’élèves, le lendemain. Ils prévoient également d’informer les familles des CM2 à chaque occasion qui leur sera donnée, « alors que beaucoup ne sont pas au courant [de cette réforme] ».