Une taxe sortie du placard
Afin d’augmenter les recettes de la commune, la mairie de Brionne a décidé cette année de faire appliquer plus rigoureusement la taxe locale sur la publicité extérieure. Ce qui suscite du mécontentement.
La décision était passée inaperçue. Le 10 mars, lors du conseil municipal, Valéry Beuriot avait annoncé avoir signé une convention d’assistance et de suivi pour la gestion de la taxe locale sur la publicité extérieure avec la société Refpac, basée à Marc-en- Baroeul. Cette taxe, instituée en août 2008, frappe les supports publicitaires fixes, visibles de toute voie ouverte à la circulation (voir ci-contre). Il s’agit d’une taxe facultative, les communes sont libres de l’appliquer ou pas. À Brionne, elle a été votée en 2014 avec un démarrage au 1er janvier 2015. « Nous avons eu alors quelques déclarations spontanées, surtout des gros contributeurs,
signale le maire. L’application est assez complexe, il faut vérifier toutes les surfaces des panneaux publicitaires, des enseignes et des pré-enseignes. Et on avait choisi de mener ce dossier avec nos propres moyens. » Du coup, un certain nombre de commerçants ou d’entreprises ne s’étaient pas déclarés… tique permettant d’en assurer la gestion et le suivi dans le temps. La convention passée avec Refpac coûte à la commune 5 520 € en 2017, puis 4 680 € en 2018 et 2019. Mais la recette totale qui est attendue du prélèvement de la taxe est bien plus élevée : 32 000 €. Pas moins de 139 dispositifs publicitaires ont été recensés à Brionne. « Mais nous avons pris soin d’appliquer un dégrèvement pour ceux en dessous de 7 m² pour protéger le petit commerce, précise Valéry Beuriot. Cela signifie que 107 dispositifs bénéficient du dégrèvement, soit 77 %. Notre objectif est atteint. »
Pour les 32 dispositifs publicitaires restants, 16 sont compris entre 7 et 12 m², soit 147 € de redevance annuelle en moyenne ; 12 sont entre 12 et 50 m², soit une redevance de 624 € ; et les quatre derniers sont des enseignes nationales qui s’acquittent d’une somme qui se compte en milliers d’euros.
« On applique la taxe pour 2017, il n’y a pas d’effet rétroactif » , tient à dire le maire. Certes. Mais pourquoi avoir décidé d’appliquer plus rigoureusement la TLPE cette année ? « Avec la baisse des dotations, les communes recherchent des recettes, répond Valéry Beuriot. La ville doit avoir des moyens pour intervenir, si on veut faire des actions pour le commerce, cela ne tombe pas du ciel. Et il faut sensibiliser les commerçants sur la pollution visuelle. » Certains d’entre eux ne sont toutefois pas d’accord avec cette « sensibilisation » , le sujet a même suscité un peu d’inquiétude dans le centre-ville. Une enseigne na- tionale a contesté le calcul de la taxe, un commerçant a fait part de son mécontentement et un autre a déposé une réclamation à propos de sa facture.
« Une taxe de voleur »
« C’est une vraie taxe de voleur !, lâche Bruno Catherine, directeur financier du groupe Ruaux, spécialisé dans le matériel de motoculture. On savait que ça allait nous tomber dessus. Plus vous essayez de rendre votre magasin joli, plus vous payez. On paye 7 - 8 000 €, alors qu’à Brionne ce n’est qu’un petit magasin pour nous. C’est du grand n’importe quoi ! Ils ont même compté une banderolle mise ponctuellement et même le moindre petit encart ! Ils calculent la surface et la multiplient par un taux. Et on ne peut pas retirer ces affichages parce qu’ils servent à renseigner ce qui se fait dans notre magasin. Nous sommes un commerce, pas une industrie. On va faire des corrections à ce qu’ils nous ont envoyés, parce que certaines choses c’est n’importe quoi ! »
« Nous sommes déjà concernés depuis un ou deux ans. C’est géré nationalement. Nous avons donc déjà fait le nécessaire. On avait retiré des affichages » , réagit Mathieu Potel, le directeur du Carrefour Market de Brionne, fortement impacté aussi par la TLPE. De son côté, un autre commerçant du centre-ville regarde avec dépit le courrier de la mairie reçu à la fin du mois de mai : « 116 € pour 7,60 m², encore une facture » , conclut-il en songeant à la taxe foncière et à la cotisation foncière des entreprises, qui pèsent déjà sur ses finances.
Anthony Bonnet et Solène Agnès-Lemarié