Les raisons d’un vote
Et si les campagnes électorales ne servaient quasiment à rien ? Voilà ce qu’a tenté de démontrer Olivier Grojean, maître de conférence en sciences politiques, dernier invité de l’année 2016 à l’Université Populaire du Mantois.
En cette année 2017 d’élection présidentielle, on s’interroge forcément sur notre « démocratie représentative » avec ces questions : pourquoi de plus en plus d’abstention ? Comment choisit-on ses candidats ?
Lors de sa conférence, Olivier Grojean a lancé des pistes : il est parti de l’État, qui représente l’unique mode de gouvernement de toutes nos sociétés occidentales, et qui est apparu en Europe au moment de la féodalité (du IXe au XIIIe siècle en France). L’intervenant a rappelé les différents monopoles qui le régissent (production des lois, fiscalité, monnaie, justice, représentation collective et prison). Il en résulte qu’on est en présence d’une relation de pouvoir et de domination. Les dominés semblent obéir volontairement. Il y a trois motivations principales à cette obéissance : la domination traditionnelle, la charismatique et la légale-rationnelle Ainsi dans les régimes totalitaires, le pouvoir s’appuie sur la violence et la domination charismatique. Dans nos démocraties, elle est surtout légale-rationnelle et repose sur les élections. Nous y voilà !
Malgré l’apparition du suffrage universel en 1948, l’apprentissage de la pratique électorale est très long et toujours en cours. Quelques chiffres parlent : en France, seulement la moitié de la population dit s’intéresser à la politique. 30 % refusent de se situer sur un axe gauchedroite alors que 60 % pensent que cet axe est « dépassé ». Un fort lien existe entre intérêt et compétence pour la politique et inversement, entre désintérêt et incompétence : ces inégalités de politisation restent toujours à la base d’une bonne partie des abstentions. Les études démontrent encore que ces inégalités s’expliquent par le statut social, avec un niveau de politisation qui augmente selon ses revenus et son éducation. Âge et sexe sont également déterminants. On constate finalement que les individus votent comme on vote au sein de leur groupe d’appartenance. Les campagnes électorales n’auraient finalement qu’une faible influence sur le choix des gens puisque « les plus politisés suivent les campagnes pour étayer leurs arguments, alors que les moins politisés vont suivre les leaders de leur groupe social ».
Olivier Grojean a enfin évoqué l’électeur qui vote en fonction des enjeux, mais qui ne représente pas plus de 10 % en France, mais aussi l’électeur stratégique qui ne vote pas pour son candidat mais choisit d’être efficace, comme
par exemple, « les électeurs de gauche qui ont voté aux primaires de la droite ».
L’heure de discussion qui a suivi a été à la hauteur de cette conférence : tout à fait passionnante.