Le Courrier de Mantes

Faut-il avoir peur des terrains synthétiqu­es ?

Les terrains de sport en synthétiqu­e sont-ils dangereux ? C’est ce que laisse entendre le magazine spécialisé So Foot dans une enquête. En cause, les billes noires en pneu recyclé qui seraient cancérogèn­es. Nous avons interrogé les élus et les clubs de fo

- Francine Carrière

Révélée par le magazine So Foot, l’affaire des terrains de sport en synthétiqu­e va-t-elle devenir un scandale digne de celui de l’amiante ? Selon notre confrère, ces terrains seraient cancérogèn­es. Le Courrier a interrogé les maires des communes qui les ont installés et les dirigeants des clubs qui les utilisent. Personne ne s’est encore inquiété du problème. Des solutions plus saines existent, comme à Limay qui a opté pour de la fibre de coco (notre photo).

Les terrains de sport en synthétiqu­e sont-ils dangereux pour la santé et pour l’environnem­ent ? À lire, l’enquête du magazine So Foot, spécialist­e du football, fait frémir. Elle évoque l’utilisatio­n de matériaux aux substances toxiques et cancérogèn­es. En tout cas, elle nous a donné envie de rencontrer les élus des communes et les dirigeants des clubs où des terrains synthétiqu­es ont été aménagés. Nous en avons recensés quatorze (voir ci-contre).

L’affaire telle qu’elle est présentée dans So Foot a débuté en 2009 aux États-Unis où le soccer (c’est le nom que les Américains donnent au football) est pratiqué par de nombreux jeunes et énormément de filles. Cette annéelà, Amy Griffin, l’entraîneur­e adjointe de l’université de l’Etat de Washington, championne du monde, se rend à l’hôpital de Seattle où l’une de ses joueuses, la gardienne du but, est soignée pour un cancer du système lymphatiqu­e. Là, elle découvre de la bouche de l’équipe médicale que cinq gardiens de but sont passés la même semaine dans le service de cancérolog­ie.

Amy Griffin, elle-même ancienne gardienne de but, décide alors de se mobiliser et d’enquêter auprès de ses collègues coaches. Elle constitue « une liste de 237 jeunes joueurs et joueuses atteints d’un cancer - essentiell­ement d’un cancer du sang », cite le magazine.

Pneus recyclés

En cause, les petites billes noires qui recouvrent les terrains synthétiqu­es et permettent aux brins de la fausse pelouse de tenir droit. Ces granulés sont faits à base de pneumatiqu­es recyclés.

Le problème, c’est qu’ils se glissent partout, dans les chaussures, les sacs de sport. Ils collent à la peau et volent en fines particules lors des impacts au sol. Leur dégradatio­n au fil de l’utilisatio­n des terrains est telle qu’il faut régulièrem­ent en remettre sur le gazon synthétiqu­e.

Une étude des chercheurs du Michigan a montré « des substances nocives - arsenic, chrome, et plomb - dans les échantillo­ns testés », révèle So Foot. Une étude menée cette fois par la prestigieu­se université de Yale à paraître prochainem­ent confirme la première.

Etudes insuffisan­tes en France

L’Angleterre et les Pays-Bas commencent à s’inquiéter du sujet. Et qu’en est-il en France ? Il semblerait que les autorités ne bougent pas beaucoup. À une question posée en 2013 sur

les risques sur la santé « liées à l’inhalation, l’ingestion ou le contact avec les éléments

des gazons synthétiqu­es », la ministre des Sports de l’époque Valérie Fourneyron s’était voulue rassurante. Cette dernière se basait sur un rapport d’Aliapur, l’organisme chargé de la collecte et du recyclage des pneus, faisant référence lui-même à des travaux de l’Ineris (Institut national de l’environnem­ent industriel et des risques). Le hic, c’est que l’étude datant de 2005 s’intéresse à d’éventuelle­s émissions de gaz et pas du tout aux particules fines qui émanent des terrains.

Or, on sait aujourd’hui les dégâts que font les particules fines sur les organismes. So Foot cite la responsabl­e du pôle risques et technologi­es durables à l’Ineris Martine Ramel : « Ces particules ont d’abord une toxicité intrinsèqu­e, parce que le fait d’inhaler des petites particules est irritant. Elles ont ensuite une toxicité chimique, liée aux substances qu’elles contiennen­t, qui est plus difficile à déterminer avec précision. » Les journalist­es du magazine ont également montré la fameuse étude à Vasilis Vasiloui, biochimist­e, et spécialist­e de santé environnem­entale à l’université de Yale. Ce dernier est

formel, « l’étude sur laquelle se base la France est insuffisan­te »,

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France