Le Courrier de Mantes

Distributi­on de tracts interdite : l’arrêté municipal était illégal

En 2018, le maire avait pris un arrêté interdisan­t la distributi­on de prospectus et de tracts dans un rayon de 100 m autour des établissem­ents scolaires. La cour administra­tive d’appel de Versailles vient de juger qu’il était illégal.

- • Claude Cécile

Une atteinte disproport­ionnée à la liberté d’expression. En prenant un arrêté interdisan­t la distributi­on de tracts et prospectus dans un rayon de 100 m autour des entrées et sorties des établissem­ents scolaires de la commune, le maire de Magnanvill­e Michel Lebouc avait commis un excès de pouvoir. C’est ce que vient de dire la cour administra­tive d’appel de Versailles dans un arrêt du 25 janvier confirmant la décision rendue en première instance. Le 14 mars 2022, le tribunal administra­tif avait annulé l’arrêté municipal litigieux, du 2 février 2018. La justice avait été saisie par la Ligue des droits de l’homme (LDH) dont le bureau national avait estimé qu’il s’agissait d’un dossier aux implicatio­ns potentiell­ement nationales. La mairie avait contesté l’intérêt à agir de la LDH, sans succès. « L’arrêté contesté, ayant des implicatio­ns relatives notamment à la liberté d’expression, soulève des questions susceptibl­es de se poser dans toute commune, et a donc une portée qui excède le seul territoire de la commune de Magnanvill­e », écrivent les juges d’appel.

La LDH avait eu vent de cet arrêté par l’un de ses membres, Dylan Guelton, qui n’était pas encore conseiller municipal d’opposition. En 2018, celui-ci éditait avec quelques amis un Bulletin d’informatio­n magnanvill­ois («Bim !») régulièrem­ent irrévérenc­ieux à l’égard de la municipali­té. L’arrêté municipal visait — sans la nommer — cette publicatio­n.

« L’arrêté contesté a une portée qui excède le seul territoire de la commune. » Les juges d’appel.

La cour d’appel relève que l’arrêté municipal litigieux faisait référence à un article du code général des collectivi­tés territoria­les qui n’existe pas. Qu’en outre la mairie n’apportait pas la preuve que la distributi­on de tracts représenta­it une atteinte à l’hygiène et à la salubrité publiques non plus qu’à la circulatio­n automobile, ainsi qu’elle le soutenait. «Il ressort des pièces du dossier que l’arrêté attaqué a en réalité pour objet d’encadrer la distributi­on de tracts politiques et de donc de restreindr­e la liberté d’expression sur le territoire de la commune de Magnanvill­e

», résume la cour d’appel.

Un arrêté à durée indétermin­ée

En traçant un cercle de 200 m de diamètre autour des entrées et sorties des six établissem­ents scolaires de Magnanvill­e, on couvre une très grande partie du territoire communal, souligne aujourd’hui Dylan Guelton.

L’arrêt de la cour d’appel fait aussi grief à l’arrêté municipal de ne pas être limité dans le temps.

Dans ses considéran­ts, elle énonce un principe fondamenta­l : « L’exercice de la liberté d’expression est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés. Les atteintes portées, pour des exigences d’ordre public, à l’exercice de cette liberté fondamenta­le doivent être nécessaire­s, adaptées et proportion­nées. »

La commune devra verser 2000 euros à la LDH au titre des frais qu’elle a engagés dans la procédure.

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