« Si je dois aller cette année au salon de l’agriculture, c’est qu’on sera encore fâché et que rien n’aura avancé »
Guillain Cresté a donné beaucoup de son temps, comme bon nombre de ses amis agriculteurs des Yvelines, au plus fort du mouvement. Le céréalier a été de ceux qui ont occupé l’A13, en amont de la barrière de péage de Buchelay, pendant plusieurs jours, entre fin janvier et début février.
Un mélange de fierté et de tristesse
Depuis son retour dans ses exploitations, « 300 hectares morcelés autour de JouyMauvoisin, Mondreville et à Blaru, où j’ai une ferme », le jeune agriculteur « a rattrapé le temps perdu ». Blé, orge, colza : il a profité du dernier week-end pour faire « le premier apport d’azote » sur ses terres.
Ingénieur agronome, Guillain Cresté a d’abord été employé dans la para-agriculture. Depuis juin dernier, il se consacre entièrement à l’exploitation familiale, prenant la suite de son père. « J’ai démissionné de chez mon employeur. Je n’interviens plus que comme consultant s’il me le demande. »
De l’action d’il y a quelques semaines, il garde « un sentiment de fierté », mais aussi « un mélange de tristesse et d’inquiétude ». « Il a été plaisant de voir que la population tient à ses paysans, alors qu’ils sont souvent stigmatisés pour leur usage des produits phytosanitaires, retient Guillain Cresté. Mais, en même temps, j’ai été attristé de voir beaucoup de jeunes se poser la question de savoir s’ils allaient ou pas reprendre les exploitations de leurs parents. Il y avait aussi des retraités, comme mon père, qui s’est installé en 1992. Ils ont l’impression d’avoir pédalé toute leur vie contre l’Europe. On a senti un mal-être profond. »
« Les paysans ne sont pas calmés »
« Tout le monde va mal, dans les petites comme dans les grandes exploitations, estime l’agriculteur. Ma ferme ne va pas mieux qu’une autre. C’est difficile, même pour les céréaliers comme moi. C’est même pire qu’avant la guerre en Ukraine. Le prix du blé est redescendu, c’est normal, mais pas celui de l’azote. Du coup, les coûts de production sont plus élevés qu’avant. C’est pour ça qu’on n’a pas accepté la taxe sur le GNR que voulait l’État et qui a conduit à la grogne et aux manifestations. »
Les promesses du gouvernement ? Elles ne l’ont pas convaincu. « Les annonces sont suffisamment vagues pour lui permettre de rétropédaler, juge le céréalier. Ce n’est pas en trois semaines qu’on va tout changer, ce serait présomptueux de le croire, mais j’attends quand même plus. »
S’il a apprécié que l’État revienne sur l’obligation faite aux agriculteurs de mettre en jachère 4 % de leurs terres, Guillain Cresté a vite tiqué quand il a su que la culture devait se faire sans pesticide. « C’est une fausse bonne idée. Cultiver des pois ou des lentilles sans produits phytosanitaires, ça ne marche pas, alors que nous, ce que nous voulons, c’est pouvoir produire plus pour nourrir les gens. »
L’Yvelinois en a assez que l’agriculture soit toujours « une monnaie d’échange », au détriment des exploitants français, lorsque la France négocie de gros contrats « de vente d’avions ou autre » avec les autres pays. « On sait très bien que Zelensky est aussi venu en France récemment pour s’assurer que ses produits agricoles puissent continuer à arriver chez nous. Alors même que l’Ukraine élève ses poules comme on le faisait en France il y a encore deux décennies, ce qui nous est interdit aujourd’hui et c’est très bien. »
Guillain Cresté sent déjà que « les paysans ne sont pas calmés ». « On a face à nous un Président qui s’est montré inflexible sur tous les grands sujets [depuis 2017]. Il a toujours réussi à trouver une solution pour que ses décisions passent, donc c’est inquiétant. Mais je pense que s’il n’y a pas de nouvelles annonces cette semaine, le mouvement repartira. D’autres professions pourraient alors nous rejoindre. Macron a beaucoup à perdre avec les JO qui approchent. »
Le céréalier ne sait pas encore s’il fera un tour au salon de l’agriculture. « J’y vais parfois, quand j’ai le temps et que l’opportunité se présente. Si je dois y aller cette année, c’est qu’on sera encore fâché et que rien n’aura avancé du côté du gouvernement. »
❝ Macron a beaucoup à perdre avec les JO qui approchent. »
À midi, ils étaient nombreux à se réunir dans le hall Europe du tribunal. Pour faire silence et redire combien celui qui s’est battu contre la peine de mort comptera éternellement pour eux. De nombreux magistrats, du siège et du parquet, ainsi que des personnels de justice, étaient présents.
« Vous n’êtes pas seulement entré dans l’Histoire de notre institution judiciaire par la plus incroyable et courageuse de ses réformes…, a salué Frédéric Champagne, ancien bâtonnier de l’Ordre. L’immense avocat que vous étiez et le brillantissime ministre de la Justice que vous fûtes en sont un pan entier à vous seul, des prétoires à l’hémicycle, du discours au livre, de la parole à la plume ! » De mémoire d’avocat, Rober Badinter avait plaidé aux assises de Versailles, au tout début de sa carrière. Il s’agissait d’un dossier de braquage dans lequel un autre grand nom du droit bataillait : Jean-Yves Liénard. Lui-même était un farouche opposant à la peine de mort.
« Vive la mort est le pire des oxymores »
Le 14 octobre 2016, Robert Badinter avait participé à la rentrée du barreau de l’Ordre des avocats de Versailles. « Il avait notamment déclaré : “Vive la mort est le pire des oxymores” », se souvient l’avocat Thierry Voitellier.