Le Courrier des Yvelines (Poissy)
Double infanticide : déni de vérité ou déni d’existence ?
Des larmes, beaucoup de larmes ont ponctué le procès de Magali Verdu devant la cour d’assises des Yvelines. Entre le vendredi 4 et le mardi 8 mars, la quadragénaire s’est présentée devant les huit jurés pour répondre d’un double infanticide (lire ci-contre) sur fond de déni de grossesse. Enfermée dans un long et large gilet gris, Magali s’est longuement exprimée sur son passé, d’une voix faible et entrecoupée de sanglots. Le reste du temps, elle est restée assise, le visage à moitié dissimulé par ses cheveux mi-longs et d’épaisses lunettes.
Un isolement affectif
Magali a raconté son enfance, ballottée d’une ville à l’autre, de la métropole à l’outre-mer. «Mon père était gendarme. Nous déménagions très régulièrement. Je n’avais pas d’amis. J’ai souffert de ces mutations. Mon père n’était qu’autorité. Lorsqu’il rentrait, c’était le branle-bas de combat. Il ne fallait plus faire de bruit.» À partir de 20 ans, elle quitte le foyer parental pour démarrer une vie conjugale tumultueuse, faite de séparations, de violences, de déménagements et de la naissance de deux enfants, toujours en vie. Pour enfoncer le clou, le 15 octobre 2004, son mari décédera d’une crise cardiaque dans le lit conjugal. Pierre naîtra deux mois plus tard. À partir de là, Magali va lentement sombrer. Les dettes s’accumulent auprès des banques, des impôts : plus de 70000 euros. La quadragénaire aura des relations avec cinq hommes par la suite, parfois deux en même temps. Certaines seront cachées lorsqu’elles se réaliseront dans le cadre de son travail. Marie sera le fruit d’une de ces idylles. Lors de son procès, Magali a donné l’image d’une femme qui a vécu dans le silence, retranchée en elle-même. «Elle est dans un isolement affectif et personnel. Ses amants ont dénoncé un comportement de manipulation et de mensonge» , a analysé un expert. Son attitude a été aléatoire. Elle semblait parfois détachée de la situation. À d’autres reprises, elle avait l’air de prendre conscience de la tragédie qui se racontait. Le récit poignant du premier gendarme à intervenir dans son appartement lui a arraché de lourds sanglots. La diffusion sur écran de la photo de la petite Marie, morte, a provoqué la même émotion. Sans toutefois pousser Magali à avouer. Le président de la cour a alors tenté l’électrochoc. «Avez-vous tué Pierre et Marie?» La question tranche un lourd silence. «Non, je ne les ai pas tués. De la naissance de Pierre, je ne me souviens de rien. De celle de Marie, ça s’efface, mais je me souviens un peu» , pleure Magali. Elle reste campée sur l’idée que Marie est morte dès sa naissance malgré tous les rapports d’expertise démontrant que l’enfant a respiré normalement. Le magistrat hausse le ton. «Madame! Vous êtes en train d’inventer un nouveau concept, le déni d’existence pur, de votre existence et de celle de vos enfants.» — Je ne clame pas un déni d’un bout à l’autre. J’ai mis mes tripes sur la table depuis deux ans. Je ne peux pas inventer des choses» , lâche l’accusée. «Qu’attendez-vous alors de cette cour d’assises ?» , s’inquiète Jean-christophe Hullin. «Je veux des réponses. Je sais que je vais avoir une sanction, aller en prison. C’est peut-être dans un hôpital psychiatrique qu’est ma place. À vie.» Le président monte d’un cran. «En 2005, c’est vous qui avez appelé votre fils Pierre. Il faisait 3,7 kg et 51 cm, vous l’avez nourri, langé. Je sais que vous savez où il est enterré, mais on ne vous torturera pas pour le savoir. Aidez-nous Madame. Ne soyez pas dans le déni de la vérité. Pierre et Marie étaient frère et soeur. Ils sont morts car VOUS les avez privés de vie. Vous nous devez une explication rationnelle. Je ne comprends pas où vous voulez amener cette cour d’assises. Nous sommes en ébullition. Ce que vous jouez, c’est pour