Le Courrier des Yvelines (Poissy)

L’ancien curé des Yvelines était un pédophile

- David Goudey Da. G.

Un prêtre, aujourd’hui âgé de 84 ans a reconnu en 2001 avoir abusé d’un enfant dans les années 1960. Il a exercé à Chatou, Marly-le-roi puis dans la région des Mureaux. Daniel a été victime lui aussi de ce prêtre. Des crimes prescrits par la justice.

Il aura fallu le témoignage aussi poignant que sordide de Daniel (lire ci-dessous), plus de cinquante ans après les faits, pour apprendre la vérité sur le père X. Ce prêtre ordonné en 1958 a fait toute sa carrière dans les Yvelines.

De Marly-le-roi à la région des Mureaux, où il a disparu du jour au lendemain en 2001 pour « raisons de santé » selon la version officielle de l’époque, en passant par Chatou, où il était en poste lorsqu’il a croisé le chemin de Daniel.

Âgé de 84 ans, le père X coule depuis sept ans une retraite heureuse dans une petite commune à l’est de Mantes-la-jolie.

Lorsqu’il a été confondu, il y a quinze an,s sur la base d’une dénonciati­on à l’évêché de Versailles, l’homme d’église n’encourait déjà plus aucune poursuite. Et depuis longtemps. Les crimes sexuels commis par le père X dont nous avons connaissan­ce datent en effet des années 1960.

Il a fallu attendre la loi du 9 mars 2004 pour que la prescripti­on en matière d’abus sexuels sur mineur soit portée de 10 à 20 ans, et ce à compter de la majorité de la victime. Autant dire que, même en 2004, le prêtre pédophile serait passé entre les mailles du filet.

Combien de victimes ?

On s’étonnera toutefois que la justice, où le père X s’est présenté pour se dénoncer peu après avoir été démasqué, n’ait pas lancé d’investigat­ions, a fortiori quand en 2002 ou 2003 Daniel s’est manifesté pour trouver d’éventuelle­s traces de crimes plus récents. Le père X était en effet un très jeune prêtre lorsqu’il a abusé de Daniel.

La possibilit­é qu’il ait fait d’autres victimes tout au long de son parcours dans les paroisses yvelinoise­s est plausible. Daniel évoque d’ailleurs dans son témoignage le cas de deux de ses amis d’enfance.

L’évêché nous a confirmé que la dénonciati­on qui l’a confondu émanait d’une autre personne.

Les autorités religieuse­s ont rapidement corroboré le témoignage de Daniel. « Nous n’avons rien à cacher ! C’est sur la base d’une autre dénonciati­on, émanant du père d’une victime auprès de l’évêché, en 2001, qu’il a été confondu. Il a reconnu les faits, qui datent des années 1960-1970, tout en soulignant qu’il s’agissait d’une période révolue de sa vie. Il lui a été demandé d’aller se dénoncer auprès de la justice, ce qu’il a fait, accompagné d’un vicaire épiscopal. » Monseigneu­r Aumonier, l’évêque de Versailles, qui venait tout juste d’être nommé à la tête du diocèse a, dans la foulée, pris plusieurs mesures conservato­ires.

Signalemen­t au Vatican

« On lui a aussitôt retiré sa charge, interdit tout ministère et tout rapport avec des enfants dans le cadre de son sacerdoce. Nous l’avons également obligé à un suivi psychiatri­que. » Après plusieurs mois de mise à pied, le père X a finalement été nommé aumônier de deux institutio­ns, dont l’une à Versailles où il achèvera sa carrière en 2009, s’occupant de personnes âgées.

Comme l’y oblige la procédure ecclésiale, l’évêché a fait un signalemen­t au Vatican. « Rome l’a finalement frappé d’interdicti­on de tout ministère en public et de sacrements (mariage, baptême…). En clair, le seul endroit où il pouvait dire la messe, c’était chez lui et seul. » Le père X n’a donc pas été réduit à l’état laïc, comme le permet le droit canon. « C’est sous le pontificat de Benoît XVI (20052013) que la législatio­n a évolué. Auparavant, c’était beaucoup plus compliqué. » Le diocèse nous a assuré que, comme tous membres du clergé en retraite, le père X était aujourd’hui accompagné dans le cadre « de rencontres et de présence fraternell­e ». « Il respecte les consignes ! »

Nous ne saurons pas, en revanche, si d’autres victimes se sont manifestée­s auprès de l’évêché, qui n’a pas pu par ailleurs nous confirmer que Monseigneu­r Aumonier avait bien été l’interlocut­eur de Daniel en 2003. « Nous n’avons pas cette informatio­n, nous at-on répondu. Nous sommes en revanche très clair sur la question de la pédophilie au sein de l’église. Il n’y a pas de tergiversa­tions à avoir quand les faits, terribles, sont avérés. Dans ce cas-là, c’est justice, prison et soins. »

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