Le Courrier des Yvelines (Poissy)
69 licenciements en cours dans des laboratoires pharmaceutiques
Le juge du tribunal administratif de Versailles ne s’est pas opposé au plan de sauvegarde de l’emploi des laboratoires pharmaceutiques Mayoly Spindler, à Chatou.
Le juge des référés du tribunal administratif de Versailles n’a rien trouvé à redire à l’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) des laboratoires pharmaceutiques Mayoly Spindler, à Chatou, a-t-on appris dans une ordonnance judiciaire en date du 5 février 2024 qui vient d’être rendue public.
Le PSE avait été homologué par la Direction régionale et interdépartementale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DRIEETS) d’île-de-france. Les services du ministère de l’économie avaient donné leur feu vert, le 22 décembre 2023, à ce projet de licenciements économiques, en homologuant le « document unilatéral » établi par l’employeur.
« Une décision unilatérale », contestaient les syndicats
Les syndicats et le CSE (comité social et économique) dénonçaient, au contraire, «une décision unilatérale» visant à « la mise en oeuvre immédiate de soixante-neuf ruptures de contrat de travail ».
Rappelons que la filiale Mayoly Santé — dont le siège social est situé lui aussi avenue de l’europe à Chatou — assure «la promotion et la commercialisation des médicaments » du groupe pharmaceutique indépendant et français Mayoly, qui emploie au total « 2 200 salariés ».
69 personnes sur le carreau
La société envisageait depuis décembre 2023 de « réorganiser son activité de force de vente en ville» en réunissant «deux réseaux de ventes», ce qui aura pour impact de supprimer « 31 postes » et de modifier «38 contrats de travail», soit 69 personnes impliquées au total.
Le comité social et économique (CSE) de la société, les syndicats Force ouvrière (FO) des métiers de la pharmacie et le syndicat Energie-chimie de l’île-de-france CFDT (SEDIF-CFDT) avaient saisi le juge des référés du tribunal administratif de Versailles pour faire suspendre les effets de cette décision.
« Une atteinte grave et immédiate » selon la CFDT
Le CSE n’avait pas été « informé et consulté », comme l’exige la loi : une «atteinte grave et immédiate » à leur droit d’être « consulté régulièrement » avait donc été portée à ses intérêts, selon les requérants.
Ils pointaient aussi divers arguments de nature à «créer un doute sérieux » quant à la légalité de la décision de la DRIEETS. De leur point de vue, la « détermination des catégories professionnelle » était « irrégulière » et n’avait pas été « motivée ».
« Aucun licenciement » avant l’audience au fond
La société faisait en réponse valoir que « la séquence de propositions de modification des contrats de travail» ainsi que « la période de reclassement » ne portent pas préjudice aux « intérêts des salariés ».
«Un projet étant fait pour évoluer, il est normal de constater une évolution dans son contenu depuis sa présentation en juillet 2023», avait aussi souligné l’avocat des laboratoires Mayoly lors de l’audience.
« Les contrats des salariés sur le départ ne sont pas rompus, mais suspendus, ils sont rompus seulement si leur période d’essai est validée », avait-il ajouté. Il y avait donc au contraire « urgence à ne pas suspendre » la décision de la DRIEETS d’île-defrance pour ne pas « nuire aux intérêts des salariés […] en période d’essai ».
« Il n’y aura pas de licenciements prononcés avant que la juridiction se prononce au fond », avait-il aussi promis, soit d’ici mai 2024.
Pas d’urgence même pour une atteinte aux prérogatives du CSE
En attendant, une « atteinte » aux prérogatives du CSE « n’est pas de nature à caractériser l’urgence » à suspendre la décision, considère le juge des référés dans son ordonnance : une suspension «ne pourrait avoir pour conséquence la reprise et la poursuite de la procédure ».
De plus, les « licenciements » devaient intervenir «à compter du 15 mars 2024 » et « les courriers de modification des contrats » avaient été envoyés aux salariés concernés entre le 16 et 19 janvier 2024, les intéressés disposant d’un délai d’un mois pour « y donner suite ».
Un congé de reclassement
« Dans ces circonstances, l’imminence des premiers licenciements, comme d’ailleurs leur nombre, ne peut être regardée comme établi », considérait le magistrat dans cette décision.
En tout état de cause, « si des salariés faisaient l’objet d’un licenciement avant le jugement au fond, ils bénéficieraient notamment d’un congé de reclassement pouvant aller jusqu’à trente mois et de l’assurance de perception d’un revenu sur cette période », rassure-t-il.
Il est toutefois « loisible » aux intéressés, « s’ils s’y croient fondés », de « contester leurs licenciements » aux prud’hommes, « y compris en référé », mais, pour ce qui concerne la justice administrative, « l’invocation des intérêts des salariés potentiellement licenciés ne suffit pas à établir l’urgence ».
L’affaire prochainement réexaminée en collégiale
Comme l’avaient fait valoir les laboratoires Mayoly, la suspension de la décision porterait au contraire «atteinte à l’intérêt des salariés qui ont candidaté dans le cadre du volontariat» et qui ont « déjà été recrutés en contrat à durée indéterminée (CDI) dans une autre société ».
Enfin, « en se bornant » à dénoncer une « atteinte grave et immédiate aux intérêts des salariés » sans «assortir leur argumentation d’éléments probants », les représentants du personnel et les syndicats n’ont pu établir davantage « l’urgence » à suspendre cette homologation.
Leur demande a donc été rejetée en référé, mais l’affaire sera prochainement réexaminée par une formation collégiale de trois juges.