Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Retz : un désert à découvrir

- Pauline du Chatelle

C’est un bijou méconnu, un joyau presque secret. Le Désert de Retz, à Chambourcy, mérite pourtant une visite, tant le lieu est chargé d’une histoire étonnante.

Tout commence en 1774 quand François de Monville, homme des Lumières, crée à proximité de Saint-jacques-deretz le «Désert de Retz», un parc paysager de 38 hectares. Passionné par l’architectu­re, les sciences, la musique et la botanique, il dessine lui-même les plans de son jardin selon le style anglo-chinois. Deux plans d’eau et une vingtaine de fabriques (constructi­ons ornemental­es) sont créés, et des milliers d’essences végétales rares sont plantées.

Véritable jardin philosophi­que, le Désert de Retz, dont l’appellatio­n désigne un endroit à l’écart du monde, s’inspire de différents courants de pensée, de l’antiquité aux Lumières, en passant par la Chine ou la francmaçon­nerie (le nombre d’or y est omniprésen­t). À travers ce jardin, François de Monville souhaite initier ses visiteurs à une réflexion sur l’homme, l’ouverture sur le monde, le mélange des civilisati­ons, ou encore la suprématie de la nature et son alliance avec l’architectu­re. Parmi les fabriques encore présentes :

De Monville souhaite surprendre ses invités : chaque fabrique accueille de nombreux divertisse­ments et est placée de sorte à ce qu’on n’y voit pas la suivante. Des concerts et pièces de théâtres sont organisés sur la scène du Théâtre découvert sous un berceau de grands ormes et des salons littéraire­s se tiennent dans la bibliothèq­ue de la Maison chinoise, richement décorée et aménagée. François de Monville engagea même un «ermite» qui avait l’interdicti­on de se laver et de se couper les ongles et les cheveux, payé pour habiter l’ermitage (fabrique disparue). Il fait aussi construire des serres et aménager un jardin de plantes médicinale­s, un potager, une laiterie et une métairie, vivant ainsi en quasi-autarcie.

De glorieux visiteurs

De nombreuses personnali­tés de l’époque, dont le duc d’orléans et la future comtesse du Barry, amis proches de monsieur de Monville, fréquentèr­ent le Désert de Retz. Marie-antoinette le visita plusieurs fois et s’en inspira pour créer son propre jardin, le Hameau de la Reine. Benjamin Franklin, le roi Gustave III de Suède ou encore Thomas Jefferson furent également séduits par le lieu.

Délaissé après la Révolution, le Désert de Retz tombe en désuétude pendant deux siècles. Il est d’abord vendu, en 1792, à la famille anglaise Ffytche. La plupart des plantes exotiques sont transférée­s au Museum d’histoire naturelle, l’actuel Jardin des plantes, à Paris. C’est ensuite Frédéric Passy, premier prix Nobel de la Paix, qui habite le Désert de Retz avec ses douze enfants, de 1856 à 1949.

En 1966, André Malraux

En 1966, André Malraux découvre le Désert de Retz en état de délabremen­t. Séduit par le lieu, il le prend en exemple pour justifier son projet de loi de sauvetage des monuments historique­s. Les premiers travaux de sauvetage du lieu sont ainsi entrepris dès 1973. Acquis par la mairie de Chambourcy pour un euro symbolique en 2007, le Désert de Retz a ensuite subi une importante campagne de restaurati­on qui a permis sa réouvertur­e au public en 2009.

Visite libre : 10 euros. Visite guidée : 14 euros. Enfants : 6 euros. Plus d’infos sur : www. ledesertde­retz.fr

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