Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)
Lycéens et détenus ont travaillé dans l’ombre pour créer le futur symbole du nouveau quartier
Dédale et Icare, issus de la mythologie grecque, auront leur représentation à Poissy. Deux imposantes statues de ces personnages trôneront dans le nouveau quartier Rouget-de-Lisle.
Àvouloir voler trop haut, on se brûle les ailes. L’emprisonnement. L’évasion. La désobéissance. La chute. L’histoire de Dédale et Icare et sa morale prennent une résonance toute particulière au travers des coulisses de la conception de deux imposantes statues, à l’effigie de ces personnages de la mythologie grecque. Elles seront installées lundi 4 mars 2024 au beau milieu du quartier Rouget-de-Lisle de Poissy. Ces bronzes sont le fruit de sept mois de travail entre un sculpteur, des lycéens et des détenus depuis leur prison. Une oeuvre hautement symbolique.
Et elles ne passeront pas inaperçues. Dédale mesurera 1,90 mètre. Son fils, Icare, positionné sur un socle, culminera à 3,60 mètres de haut. Le tout représente la chute de ce dernier après qu’il ait touché le soleil en tentant de s’évader du labyrinthe, où il a été emprisonné avec son père dont il n’a pas écouté les appels à la prudence. Certains prisonniers ont cru reconnaître leur parcours dans ce mythe, comme le souligne Marie-Odile Foucras, l’architecte-urbaniste à l’origine de ce quartier sorti de terre ces dernières années et de ce projet artistique : « Le message au travers de tout cela, c’est que l’on peut vivre ensemble, quels que soient nos parcours, nos fragilités, nos erreurs. »
200000 € ont été récoltés auprès des acteurs du chantier de cet écoquartier, bâti sur d’anciennes friches industrielles, afin d’édifier Dédale et Icare, qui n’auront donc pas coûté un sou à la municipalité.
Une classe du lycée Le Corbusier et des détenus de la maison centrale de Poissy sont les petites mains de cette création. Ils ont travaillé, chacun de leurs côtés, dans l’ombre, sous la houlette de l’artiste Emmanuel Michel. Chaque groupe a façonné les différentes parties des statues pour réaliser une sorte de patron, en plâtre, utilisé ensuite pour réaliser les moules dans lesquels ont été coulés les 750 kilos de bronze. « Les deux entités n’ont pas pu se rencontrer physiquement. Ils se transmettaient des consignes par vidéos interposées », souligne l’architecte.
Les différents participants ont tous signé à leur manière cette « oeuvre passe-muraille », sous forme de gravures apposées sur les ailes du fils : « Les détenus ont eu envie de participer pour laisser cet héritage à leurs enfants, poursuit MarieOdile Foucras. Certains ont inscrit leurs initiales. D’autres des messages comme : tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. »
Une fois les dernières finitions réalisées en atelier, les statues seront placées face à face dans un jardin public du quartier. Dans sa chute depuis les cieux, Icare ne sera pas positionné complètement à la renverse, à la demande des prisonniers, afin de « lui laisser une chance de se relever ».
Un symbole de plus.
❝ On peut vivre ensemble, quels que soient nos parcours, nos fragilités. » MARIE-ODILE FOUCRAS Architecte-urbaniste
Collaboration par vidéos interposées