Une société spécialisée dans l’aide aux personnes échappe in extremis à la fermeture administrative
La juge des référés du tribunal administratif de Nantes a suspendu ce mardi 30 avril 2024 un arrêté du président du Département de la Vendée, qui avait ordonné le 29 mars 2024 la fermeture des activités d’aide aux personnes âgées et handicapées d’une société de Saint-Hilaire-de-Riez (Vendée).
La juge des référés du tribunal administratif de Nantes a suspendu ce mardi 30 avril 2024 un arrêté du président du Département de la Vendée, qui avait ordonné le 29 mars 2024 la fermeture des activités d’aide aux personnes âgées et handicapées d’une société de SaintHilaire-de-Riez (Vendée).
« Sept » des cinquantetrois bénéficiaires de la SARL Vendée Serv’Adom se sont en effet plaints auprès de la collectivité, en charge des questions de « solidarité » sur son territoire : « pas moins de trentetrois séries d’irrégularités » ont été relevées par ses services. Absence de remise de « devis préalable », de « contrat », de « livret d’accueil sur les droits » des bénéficiaires... Selon le Département, une « multitude d’irrégularités » se sont ajoutées au « comportement autoritaire et irrespectueux » du gérant de l’entreprise.
Ce dernier aurait même poussé l’une de ses salariées à « accompagner à la banque » une personne bénéficiaire de leurs services pour qu’elle fasse « une autorisation de prélèvement » sur ses comptes au profit de la société.
« Ce sont des faits très graves »
« Ce sont des faits très graves, qui pourraient s’apparenter à un abus de faiblesse... La réponse, cela a été un signalement a été fait au procureur de la République sur la base de l’article 40 [du code de procédure pénale, qui impose à tout fonctionnaire ayant connaissance d’un crime ou d’un délit d’en avertir »sans délai« , le procureur, ndlr] », a expliqué ce mardi 30 avril 2024 l’avocat du Département de la Vendée à la juge des référés du tribunal administratif de Nantes.
Près de « 20 % » des factures du prestataire étaient également « erronées » : des « surfacturations » étaient faites au détriment des bénéficiaires ou bien les données n’étaient « pas en corrélation » avec celles sur la base desquelles le Département calcule les aides sociales.
Selon l’avocat du conseil départemental de la Vendée, il n’y avait donc « pas d’urgence » à suspendre l’arrêté du président du Département de la Vendée : la société est déjà « en redressement judiciaire » depuis plusieurs années, a-t-il fait observer, et « 44 des 53 bénéficiaires » qui sont impactés par cette fermeture partielle d’activité ont « déjà opté pour un nouveau prestataire ».
Des « retards sur les paiement des salaires »
Les « difficultés » qu’elle invoque sont donc « antérieures au contrôle de l’administration » : des « retards sur les paiements des salaires » ont été constatés.
La « tentative de plan d’action » élaboré par le gérant de la société, ne l’avait d’ailleurs pas convaincu. « Il parle de primes au mérite, mais il n’y a aucun mot sur les bénéficiaires », s’était exclamé l’avocat du Département. « Ce ne sont pas des consommateurs mais des personnes vulnérables, qui doivent être protégées par le Département. »
L’avocat de la société avait pour sa part rappelé que les services aux personnes âgées et dépendantes représentaient « 40 % » du chiffre d’affaires de la société, le reste étant assuré par les simples aides à domicile. Il y avait donc « urgence » à suspendre l’arrêté du Département puisque la SARL Vendée Serv’Adom travaille avec « 70 bénéficiaires » au total et qu’elle emploie « 30 salariés », dans ses deux branches d’activité. Il s’était d’ailleurs « inquiété » des « pratiques » du Département, qui « appelle les bénéficiaires pour choisir un autre prestataire ».
« Une fermeture ne peut être imposée que si le gestionnaire n’a pas remédié, dans un délai raisonnable, aux injonctions qui lui ont été faites... A défaut, la structure peut simplement être placée sous administration provisoire », avait encore pris soin d’insister Me Thibaut Philippon. « Or, à supposer que dans cette affaire qu’on puisse y voir des »injonctions« , il n’y a eu aucune procédure contradictoire ni même »délai raisonnable« donné à ma cliente pour y répondre ! C’est une procédure contradictoire d’apparat, fantoche, qui a été mise en place. »
Un « courrier » a en effet été adressé le 22 février 2024 par le Département de la Vendée à la SARL Vendée Serv’Adom mais il ne faisait état que d’une « liste de préconisations qu’on envisage de vous demander ». Ces « préconisations » ne peuvent donc pas être assimilées à des « injonctions », avait reformulé l’avocat en d’autres termes. Au final, on ne peut reprocher à sa cliente « qu’un seul incident notable en dix ans d’activité » alors qu’elle avait elle-même « relevé plusieurs difficultés » au sujet d’un unique « bénéficiaire ».
« Si la société (...) était clairement informée du délai d’un mois qui lui était laissé afin de présenter des observations (...) en revanche les injonctions qui lui ont été délivrées n’ont été assorties d’aucun délai clairement défini », confirme la juge des référés du tribunal administratif de Nantes dans une ordonnance rendue le jour-même : la fermeture partielle de l’activité de la société était prévue pour entrer en vigueur ce mardi 30 avril 2024... Elle a donc un « doute sérieux sur la légalité » de la décision, faute de respect de la procédure.
Pour rappel, la SARL Vendée Serv’Adom avait été déboutée le 17 avril 2024 dans le cadre d’une première procédure de référé-liberté, une procédure d’extrême urgence destinée à sanctionner les atteintes graves et manifestement illégales aux libertés fondamentales consacrées par la Constitution, comme la liberté du commerce.