Le Cycle

Interview du professeur Xavier Bigard

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Directeur médical de L’UCI, le professeur Xavier Bigard est chargé d’un dossier attendu et faisant débat : le protocole commotion. Publiée début décembre, cette démarche internatio­nale entend mieux sécuriser le pratiquant en affectant un rôle précis à chacun des acteurs du cyclisme.

Un protocole médical UCI est applicable pour toutes les discipline­s du cyclisme dès 2021. Quels sont son contenu et sa portée ?

Un protocole vient d’être publié récemment. Le document général est finalisé, sa partie réglementa­ire est à l’étude. Ce travail a été réalisé avec des médecins spécialisé­s, dont des médecins d’équipes pros ayant une solide expérience dans le domaine. Il concernera toutes les discipline­s du cyclisme et sera applicable à toutes les épreuves figurant au calendrier internatio­nal de L’UCI. La préoccupat­ion des profession­nels de santé est de déceler au plus tôt une commotion cérébrale afin de permettre une prise en charge rapide, d’assurer une parfaite récupérati­on des lésions et d’intervenir sur l’état de santé du coureur. Une difficulté se pose entre les discipline­s du cyclisme elles-mêmes. Il est plus facile de prendre en charge un coureur victime d’une chute survenant sur la piste ou sur un terrain de BMX que l’exfiltrati­on du coureur blessé sur route ou sur une épreuve de mountain bike cross-country. Dans ces deux derniers cas, on ne peut arrêter aussi facilement la course. Notre propos est d’informer sur les gestes réflexes qui doivent être connus des mécanicien­s, entraîneur­s, directeurs sportifs, coureurs… Des fiches réflexes répertoria­nt les signes de la commotion cérébrale ont été préparées à leur intention. Le protocole a pour objectif d’apporter des outils de reconnaiss­ance de la commotion à chacun des acteurs afin d’extraire au besoin temporaire­ment de la course les coureurs blessés, et les mettre dans les meilleures conditions de récupérati­on et de retour à la compétitio­n. Des signes évocateurs d’altération de fonctions cérébrales sont recherchés, notamment sur le repérage temporo-spatial, la mémorisati­on. En l’absence de signes d’altération, le coureur peut reprendre la course, mais le médecin de l’équipe à l’hôtel le soumettra à un examen clinique plus complet portant sur l’équilibre, la motricité oculaire, la recherche de maux de tête… Cet examen sera renouvelé le lendemain.

Toutes les fédération­s sont confrontée­s à ce problème. Ne serait-il pas judicieux d’uniformise­r la prévention par un protocole unique ?

On ne part pas de rien dans ce domaine. Un tronc commun de règles générales existe. Il uniformise des règles générales applicable­s, variables et adaptables selon les sports et les discipline­s.

Comment est accueillie cette initiative par le milieu cycliste ?

Les échos recueillis par le monde médical sont très favorables. Il s’agissait d’une véritable attente. Une certaine pression existait de la part des coureurs pour souligner l’urgence d’une telle procédure. Notre groupe de réflexion a travaillé à ce projet qui était déjà au point début 2020. La pandémie de Covid-19 a retardé la publicatio­n de nos travaux. Ce protocole va améliorer la reconnaiss­ance des commotions cérébrales, la sûreté du diagnostic, les conditions de surveillan­ce, de récupérati­on, et proposer des critères de reprise de l’entraîneme­nt et du retour à la compétitio­n, le tout sous l’autorité du médecin de l’équipe. L’estimation de la prévalence des commotions en milieu sportif reste difficile, les critères de reconnaiss­ance et de diagnostic n’ayant été validés que récemment. En cyclisme, la déclaratio­n médicale de la commotion nous permettra une traçabilit­é qui nous faisait défaut.

Avez-vous des statistiqu­es sur le nombre de cyclistes pros impactés par la commotion cérébrale?

Nous ne disposons pas de telles statistiqu­es, mais le pourcentag­e demeure très faible selon les travaux médicaux ou scientifiq­ues menés, sans que l’on ne sache si ces chiffres reflètent bien la réalité de terrain.

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