Le Fana de l'Aviation

La guerre électroniq­ue

La guerre électroniq­ue au service de la dissuasion : ses applicatio­ns opérationn­elles, ses enjeux de souveraine­té.

- Par le colonel (H) Pierre-Alain Antoine

Dans L’Art de la guerre, cinq siècles avant Jésus Christ, Sun Tzu écrivait : “Pour vaincre son ennemi, il faut tout connaître sur lui” ; “Tout l’art de la guerre réside dans la duperie” ; “Une armée sans agents secrets est exactement comme un homme sans yeux ni oreilles”. À ce titre, le réseau d’écoute des émissions radioélect­riques provenant de l’autre côté du Rideau de fer a été essentiel pour connaître le plan de bataille du pacte de Varsovie, développer l’autoprotec­tion des bombardier­s français, tactiques comme stratégiqu­es. La guerre électroniq­ue devient alors un maillon critique de la crédibilit­é de la force de frappe.

La France est membre fondateur de l’Organisati­on du traité de l’Atlantique dès sa création en 1949. Mais, contrairem­ent à l’idée reçue, elle n’a en fait jamais quitté l’Otan. Cependant, dès 1966, le général de Gaulle a souhaité se retirer de son organisati­on militaire intégrée afin de librement mettre en oeuvre sa propre force de dissuasion. Si la France s’était jusque-là appuyée sur le dispositif de renseignem­ent de l’organisati­on, il n’en fut pas de même à partir du 1er avril 1967, date à laquelle les armées alliées stationnée­s sur le territoire national ont dû quitter la France. La source de renseignem­ents se tarit, ou tout au moins voit son débit diminuer sensibleme­nt. Nous avons donc été obligés de recréer notre propre dispositif qui, à la chute du mur de Berlin, avait atteint un niveau que beaucoup d’alliés nous enviaient. Par nécessité, l’armée de l’Air développe un nouveau métier, la GE, la guerre électroniq­ue. Un vocabulair­e bien particulie­r apparaît : Sigint ou Signal Intelligen­ce, celui-ci se déclinant en Comint (communicat­ion intelligen­ce) et en Elint (Electronic intelligen­ce) ou renseignem­ent sur les signaux radar. Jugez plutôt

Le renseignem­ent d’origine électromag­nétique

La France a entretenu jusqu’à cinq escadrons de renseignem­ent électroniq­ue sol en RFA et à Berlin :

– l’Escadron Electroniq­ue Sol, EES 04.054, à Achern, dans la ForêtNoire au sud de Baden-Baden pour les écoutes radio HF ;

– l’EES 06.054 à Bad Lauterberg, au centre de la RFA, pour les écoutes des émissions V/UHF et SHF ; – l’EES 07.054 à Furth im Wald, en face de la Tchécoslov­aquie, pour le recueil des fréquences H/V/UHF et SHF ; – l’EES 02.054 sur la BA 165 à Berlin, pour le recueil V/UHF, SHF et HF ;

– l’EES 03.054 à Goslar, en RFA, (mais rattaché à la BA 165), pour le recueil V/UHF et SHF.

Certains escadrons partageaie­nt les sites avec des unités d’écoute de l’armée de Terre, des relais hertziens de l’armée de l’Air ou des unités de guerre électroniq­ue américaine­s ou de l’Otan servies par des personnels de la Lutfwaffe. Deux détachemen­ts participen­t à la chaîne interarmée­s de radiogonio­métrie électroniq­ue, le DE n° 8 à Baden-Oos et le DE n° 9 à Fürstenfel­dbruck (une base aérienne de la Luftwaffe à l’ouest de Munich). Le réseau d’écoute était renforcé par le Centre d’instructio­n à la guerre électroniq­ue (CIGE) stationné sur la BA 128 de MetzFresca­ty qui héberge également l’Escadron de fusion du renseignem­ent d’origine électromag­nétique

 ?? PHILIPPE WODKA-GALLIEN ?? Sur ce “Mirage” 2000N du 3/4 Limousin, on distingue le détecteur radar en bout d’aile (flèche verte), le brouilleur sous la dérive (flèche rouge) et les lance-leurres au niveau du moteur (flèche noire). En haut de dérive, le détecteur d’alerte radar...
PHILIPPE WODKA-GALLIEN Sur ce “Mirage” 2000N du 3/4 Limousin, on distingue le détecteur radar en bout d’aile (flèche verte), le brouilleur sous la dérive (flèche rouge) et les lance-leurres au niveau du moteur (flèche noire). En haut de dérive, le détecteur d’alerte radar...
 ?? PHILIPPE WODKA-GALLIEN ?? Le détecteur de départ de missile (flèche) d’un “Mirage” 2000N sur la BA 123 d’Orléans en 2005. L’équipement est intégré à la poutre du missile air-air.
PHILIPPE WODKA-GALLIEN Le détecteur de départ de missile (flèche) d’un “Mirage” 2000N sur la BA 123 d’Orléans en 2005. L’équipement est intégré à la poutre du missile air-air.

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