Le A-10 aurait pu être un avion à hélice !
Le A-10 doit sa silhouette à l’irruption du réacteur double flux sur la scène militaire.
Quand ils répondent à l’appel d’offres pour le programme AX, les avionneurs se trouvent placés face à un dilemme : un des défis est d’obtenir une endurance équivalente ou même supérieure à celle du Skyraider et les réacteurs militaires ne sont alors pas des parangons d’autonomie. Les réacteurs double flux, qui apportent une consommation très maîtrisée et vont révolutionner l’aviation commerciale, ne sont pas à leur aise dans les basses vitesses exigées pour la mission CAS.
L’efficacité de la propulsion à basse vitesse implique en effet de déplacer une grande masse d’air avec une accélération moindre. Pour cela l’hélice est bien la meilleure. Mais les exigences de survivabilité impliquent que l’AX doit avoir deux moteurs (1) avec de bonnes performances STOL : mises bout à bout, toutes ces contraintes auraient débouché sur des hélices de grande taille avec des groupes turbopropulseurs largement écartés, avec, à la clef, des difficultés de contrôle en cas de perte d’un moteur. Northrop envisage bien d’aligner dans le fuselage et l’un derrière l’autre deux turbopropulseurs, mais les contraintes étaient encore pires : alimentation en air, refroidissement, vulnérabilité, présence d’une seule hélice et alourdissement de la transmission de puissance... L’idée fut rapidement abandonnée.
Toutefois, pendant les quatre ans qui s’écoulent entre les premières discussions sur l’AX et le RFP final, les motoristes font d’immenses progrès et développent une nouvelle génération de réacteurs à double flux avec un fort taux de dilution. Les moteurs qui apparaissent ainsi réconcilient le AX à réaction avec l’endurance demandée. C’est la fin des questionnements !
Pour son YA-10, Fairchild fit le choix du General Electric TF34 qui devait également équiper le Lockheed S-3 Viking de la Navy. Il s’agissait d’un moteur assez puissant pour la vitesse demandée, économe en carburant et suffisamment compact pour être installé près de l’axe longitudinal de l’avion et limiter ainsi la question de la dissymétrie de la puissance. En revanche, l’absence de post-combustion impliquait que le moteur soit assez puissant pour permettre un décollage à la masse maximale sans réchauffe, ce qui fut fait mais de façon assez marginale comme on le lira plus loin dans ce numéro…
Avec son A-9, Northrop fait le choix de l’AVCO Lycoming ALF 502, alias YF102 dans sa version militaire. Un moteur moins puissant de 15%, mais aussi plus léger de 23% et plus compact. Les formes plus aérodynamiques du YA-9 compensent largement le déficit de puissance installée. (1) Pierre Sprey aurait voulu que l’AX soit un monomoteur pour limiter sa taille et son coût. L’Air Force poussait quant à elle en faveur d’un bimoteur pour la survivabilité et elle obtint gain de cause.