J’ai piloté le MS 1500 “Épervier”
Aux commandes d’un avion pas fréquent, combattant devenu banc d’essais.
Dans la rubrique “J’ai piloté” du Fana de l’Aviation n° 99 (février 1978), le pilote d’essais Claude Barteau présenta le MS 1500 “Épervier”, concurrent du “Fennec”. L’“Épervier” avait été conçu pour les missions d’appui- feu. Il effectua son premier vol le 12 mai 1958. Malgré de bonnes performances, le “Fennec”, moins cher, fut fi nalement retenu. L’avion servit ensuite à Turbomeca de banc d’essais jusqu’en 1981. Claude Barteau fut pilote d’essais à la CGTM ( Compagnie générale des turbomoteurs), la fi liale de Turbomeca spécialisée dans les essais en vol, de 1971 à 1993. Il était breveté pilote d’essais et hélicoptères. “Il est difficile pour un pilote d’essais exerçant sur des machines très variées, de présenter un appareil sans utiliser le langage et les définitions propres à ce métier. Mais puisque cet appareil n’est plus guère comparable à ce qui existe actuellement comme vecteur d’attaque à basse altitude ou de plate-forme d’observation, et que par ailleurs il est utilisé à la CGTM comme banc d’essais volant de moteurs, c’est dans cet emploi que je vais présenter l’“Épervier”. Il sert en effet encore à Turbomeca pour des essais spécifiques de turbopropulseur “Astazou”, par exemple : – étude du comportement moteur en vol dos ou à facteur de charge négatif ; – étude et performance hélice à basse vitesse (45 noeuds, 83 km/h) grâce à des becs automatiques et
de grands volets (45°) ; – décollage à grande incidence et pente. Ces exemples permettent d’illustrer les sensations ressenties par l’équipage d’essais bien installé dans un cockpit spacieux comme une cloche à fromage. Les 1 000 ch de l’“Astazou” développant sur hélice Ratier-Figeac (23 LF) une traction d’environ 1 t, l’équipage et l’appareil pendent littéralement au ciel. La pente est de 45° environ et le décollage n’exige que 199 m de roulement. Le pilote est en place arrière et dispose d’une large ceinture qui le retient par les cuisses en vol dos : on peut ainsi effectuer du vol inverse en palier, en montée ou en descente, selon ce qui est exigé par les essais. La verrière est si vaste que seul le bout du nez est étroit, typique de l’“Astazou”, [ ce qui] permet de doser et maintenir la pente désirée. L’ingénieur en place avant, ou bien l’allumage d’un voyant rouge, indique le retour au vol normal… Il est bien rare que les essais terminés, l’atterrissage ne soit pas précédé d’une petite séance de voltige ; la cellule paraît alors se comporter du point de vue de sa trajectoire comme une banane dans l’eau et le palonnier semble parfois perdu au fond de la carlingue. Un petit tonneau au-dessus de la CGTM et le retour au parking semblent appartenir d’avantage à l’épopée aéronautique de l’entre-deux-guerres qu’au caractère extrêmement figé et gravé que l’on croit parfois être obligé d’apporter aux essais en vol. Mais l’essentiel est dans les enregistrements et, à ce titre, l’“Épervier” est très précieux par son domaine de vol : 40-250 noeuds (74 à 463 km/h), facteur de charge très étendu, (+10 g, -4 g), classe voltige, faible entretien. Ses qualités de combattant ne sont pas utilisées à la CGTM, mais les schémas d’emport d’armement démontrent ses possibilités. En bref, il est toujours exaltant de voler sur des machines originales et l’“Épervier” est un exemple utile et sympathique.”