Le temps des “MiG Killer”
1967-1968
La force aérienne ennemie était devenue un obstacle majeur aux opérations aériennes et, avec l’impossibilité de frapper ses bases, il restait l’option de tenter une opération de balayage au cours d’une opération majeure. Même si la chasse ennemie n’était pas omniprésente, contrairement au système de défense antiaérienne extrêmement serré du territoire ennemi, il était possible de lui porter des coups décisifs.
C’était l’idée qui avait été développée par plusieurs membres du 8th TFW surnommé le “Wolfpack” (la meute), en particulier par un jeune officier, John B. Stone. Il s’était souvenu que les deux premières victoires aériennes des F-4 de l’USAF, le 10 juillet 1965, avaient été obtenues parce que les pilotes des “Phantom” II s’étaient comportés, en vol, comme étant une section de F-105 sensiblement en retard sur le raid auquel ils étaient censés participer. C’était sans doute là une idée à explorer à nouveau.
De façon logique, les “Thunderchief” étaient des cibles importantes pour la défense adverse. Il suffisait de leur tomber dessus, de les forcer à larguer leurs charges pour que finalement, ils ne puissent effectuer leur mission et que l’interception soit un succès, que les avions soient descendus ou non. Bien sûr, si au cours du combat, les F-105 venaient à être détruits, leurs pilotes tués ou capturés, la victoire devenait totale.
Ainsi pour l’automne 1966, ce sont environ 25 % des missions des F-105 qui ne purent aboutir, les avions étant obligés de se débarrasser de leur charge utile pour résister aux assauts de la chasse adverse ; un bilan à ne surtout pas négliger.
Il fallait cependant veiller à ce que les F-105 ne se mettent pas à chasser le chasseur à leur tour – leur canon de 20 mm fut fatal à de nombreuses reprises –, et il fallait aussi composer avec leur escorte de F- 4 “Phantom” II. La chasse vietnamienne s’était considérablement renforcée au cours de cette première phase du conflit et, désormais, les MiG-21 “Fishbed” étaient armés de missiles air-air à guidage infrarouge “Atoll”, équivalents des AIM-9 “Sidewinder”. Le danger était donc réel et de plus en plus pressant pour les pilotes amenés à pénétrer régulièrement dans les “Route Packages” les plus au nord.
Plusieurs membres du “Wolfpack” s’étaient alors mis au travail pour tracer les grandes lignes d’une opération de balayage de la chasse ennemie autour de Stone et de J. D. Covington, officier des renseignements de l’escadre, mais ils s’étaient vu opposer une fin de non-recevoir de leur hiérarchie. L’arrivée de Robin Olds à la tête de l’escadre changea la donne, même si, dans un premier temps, le général Momyer refusa.
Un plan d’action complexe mais ambitieux
En décembre 1966, une délégation de la 8th TFW se rendit à Saïgon, autour de Robin Olds, pour plaider à nouveau leur cause directement auprès du gén. Momyer avec un plan d’action, complexe mais ambitieux. Le mot d’ordre était de balayer les MiG du ciel : il fallait donc leur offrir l’opportunité de sortir massivement et ensuite de se tenir prêt à les empêcher de revenir à leurs bases.
Les moyens engagés étaient à la hauteur de l’enjeu avec 28 F-105D des 355th et 388th TFW en charge des missions Iron Hand d’attaque des défenses antiaériennes, mais surtout 56 F- 4 “Phantom” II prove
nant des 8th TFW et 366th TFW de Da Nang. Plusieurs EB- 66 chargés de brouiller les communications adverses, des ravitailleurs en vol mais aussi des RC-121, seraient aussi en vol pour soutenir et protéger le raid. Plus étonnant encore, des patrouilles MiGCAP (lire page 30) seraient organisées avec des F-104C.
Les F- 4 guidés par Olds devaient attirer les MiG ; les avions du 366th TFW venant de Da Nang avaient pour rôle de couvrir le Nord du pays et d’empêcher les MiG d’aller se réfugier dans les zones tampons le long de la frontière chinoise, voire de franchir la frontière, mais aussi de prendre en compte d’éventuels renforts provenant des bases de Kep ou de Cat Bi.
Afin que le piège ne fût pas éventé, les “Phantom” II furent équipés de la nacelle de brouillage AN/ALQ-71 typique des “Thunderchief”. Ils se couvraient ainsi les uns les autres en adoptant la même formation que les chasseurs-bombardiers, les émissions de la nacelle empêchant le radar de recherche des SAM-2 de se verrouiller sur un appareil précis. Il était nécessaire de maintenir la formation de façon assez rigide afin que la couverture limitée des nacelles reste homogène donc efficace. Ces nacelles étaient encore assez rares. Elles étaient compatibles avec le F- 4 “Phantom” II ; des avions de ce type les utilisaient en Europe dans le cadre de leurs missions de dissuasion nucléaire. Robin Olds obtint le prêt de ces précieux systèmes pour une semaine.
Les deux vagues décollent vers 14 heures
La mission fut programmée pour le 1er janvier au matin. Dès le 30 décembre, tous les avions prévus, les nacelles et les missiles furent inspectés pour s’assurer de leur bon fonctionnement. De très nombreux briefings avec les innombrables équipages eurent lieu pour affiner les procédures, les itinéraires et les multiples cas de figure alternatifs auxquels ils seraient, tous, forcément, confrontés.
La veille, les prévisions météorologiques n’étaient guère engageantes et la mission fut reportée. L’ensemble des personnels put faire un réveillon historiquement calme. Au matin du 2 janvier, la situation météorologique ne s’était guère améliorée mais les prévisions semblaient apporter une lueur d’espoir pour l’après-midi.
Même si la région d’Hanoï était encore couverte, les deux vagues décollèrent vers 14 heures locales de leurs bases respectives. Le RC-130 était déjà en place ; les spécialistes de la National Security Agency écoutaient les fréquences radio de l’adversaire et notèrent l’activation de l’alerte générale lorsque les premiers ravitaillements en vol se déroulèrent sur les circuits habituels, préludes aux attaques aériennes des F-105.
Si les F- 4 disposaient, pour leur navigation, d’une centrale inertielle, ils effectuèrent néanmoins à intervalle régulier des émissions au radar comme les F-105 le faisaient pour recaler leurs informations de parcours. L’illusion était totale, même les indicatifs radios avaient été changés en cas d’écoute ennemie.
Mais les MiG ne décollèrent pas. Les F-105D des missions Iron Hand avaient fait un excellent boulot en frappant plusieurs sites SAM et autres radars d’interceptions
Le cercle infernal d’un combat tournoyant dont ils pourraient ne pas sortir vainqueurs
et avaient provoqué une certaine confusion au sein de l’état-major de la chasse ennemie. La météo, guère engageante, ne les avait pas non plus incités à s’activer.
Le leader premier au contact de l’adversaire
Robin Olds, en tête de la vague provenant de Thaïlande, survola alors la base de Phuc Yen, au nord de Hanoï, en espérant provoquer une réaction de l’adversaire. Il était environ 15 heures. Puis il s’éloigna vers le nord avec l’angoisse que le dispositif eût été monté en vain.
Quelques minutes plus tard, le RC-130 intercepta l’ordre de décoller donné aux MiG et transmit l’information aux chasseurs. Si Robin Olds ne reçut pas directement l’info, le message lui fut relayé par ses équipiers. Ils firent immédiatement demi-tour en direction de Hanoï alors que le reste de la vague approchait depuis le sud. Pour éviter toute méprise, l’ordre fut donné d’identifier formellement les cibles avant de tirer, car désormais les “Phantom” II pouvaient se retrouver en face-à-face et il était hors de question de tirer hors de portée visuelle.
En arrivant à proximité de “Thud Ridge”, au nord de Hanoï, la patrouille menée par Robin Olds repéra un puis plusieurs MiG-21 émergeant de la couche. En évitant soigneusement de rentrer dans le cercle infernal d’un combat tournoyant dont ils pourraient ne pas sortir vainqueurs, les pilotes de “Phantom” II engagèrent le combat.
Le premier à ouvrir le feu fut leur leader, toujours prêt à montrer l’exemple, mais qui, par sa position, fut le premier à se retrouver directement au contact de l’adversaire. Il tira deux “Sparrow” puis deux “Sidewinder” sur un MiG-21 en pure
perte. Après avoir laissé s’échapper ce premier MiG, il en avisa un second plus bas sur lequel il plongea. Il tira un nouveau “Sidewinder” qui alla frapper sa cible. L’aile du chasseur soviétique se rompit et il se transforma en boule de feu. Son ailier, “Olds 2”, le lt Wetterhahn, eut plus de réussite avec ses “Sparrow” car son deuxième toucha sa cible qui dégringola en flammes. Ce fut ensuite au tour d’“Olds 4”, le capt. Radeker, de dégager son leader en touchant un MiG avec un “Sidewinder”.
Les pilotes de l’aviation du Vietnam du Nord eurent beau prévenir leurs collègues qu’ils étaient tombés dans un traquenard, les autres patrouilles avaient décollé.
D’autre MiG furent repérés par la patrouille “Ford”. Deux filaient devant pendant qu’un troisième tentait de se glisser derrière eux pour piéger les “Phantom” II. Le capt. Raspberry, “Ford 2” raya du ciel un MiG-21 avec un “Sidewinder”.
Quatre MiG-21 tentèrent ensuite d’intercepter la patrouille “Rambler” dirigée par John Stone, initiateur de la mission. Il parvint à se mettre en position de tir et lança trois “Sparrow”. Si le premier se perdit, le second endommagea le “Fishbed” qui continua à voler quelques secondes le temps que le troisième missile l’achève. Un autre MiG fut touché sérieusement par “Rambler 2” et son pilote J. R. Gly puis “Rambler 4”, le maj. Combies, constata l’éjection du pilote du MiG sur lequel il avait lancé deux “Sparrow”. L’affrontement avait duré entre 12 et 15 minutes. Le retour à Ubon fut triomphal. Les pilotes de F- 4 se virent attribuer sept victoires sûres et aucune perte !
Selon les sources, entre 12 et 14 MiG-21 du régiment 921 prirent l’air ce jour-là. Cinq des sept pilotes de MiG réussirent à s’éjecter : Vu Ngoc Dinh, Nguyen Duc Thuan, Nguyen Dang Kinh, Bu Duc Nhu et Nguyen Ngoc Dinh. Les Vietnamiens ne reconnurent que cinq pertes ce jour-là.
Le très discret groupe Z
Certains historiens pensent que les deux victoires manquantes peuvent s’expliquer par la présence de MiG chinois ou, plus certainement, par l’intervention du “Doan Z” (groupe Z), une escadrille de volontaires nord-coréens qui, entre 1967 et 1972, volèrent sur MiG-17 et MiG-21 pour épauler leurs camarades vietnamiens. Ce n’est qu’en 1996 que l’existence de cette unité fut révélée après la défection d’un pilote nord-coréen, Lee Chul Soo, qui vint se poser à Séoul avec son MiG-19. Lors des différents interrogatoires auxquels il fut soumis, il raconta l’histoire d’une soixantaine de pilotes de son pays qui étaient allés combattre aux côtés des aviateurs vietnamiens. Le groupe Z était basé à Kep entre 1967 et 1972. Ils revendiquèrent 26 victoires aériennes mais une douzaine d’entre eux furent tués au combat ou lors de bombardements, ainsi que deux techniciens. Ils furent enterrés dans des tombes distinctes près de Bac Giang. Leurs corps furent néanmoins rapatriés en 2002 mais leurs pierres tombales furent préservées en hommage.
Les libations sur la base de Thaïlande furent à la hauteur de l’évènement. La mission avait été un vrai succès et le chef avait confirmé son statut de meneur d’hommes. Il avait aussi fait preuve de la qualité qu’il exigeait d’un pilote de chasse digne de ce nom : l’agressivité.
Les jours suivants, les MiG s’en prirent à plusieurs RF- 4 en missions de reconnaissance au Nord, si bien que la décision fut prise de suspendre temporairement ces missions le temps que la menace s’atténue. À la 8th TFW, les pilotes, sans doute encore chauds bouillants de leur combat épique, imaginèrent se faire désormais passer pour des RF- 4 histoire d’avoir de quoi peindre quelques étoiles rouges de plus sur les entrées d’air de leurs avions, surtout ceux qui n’avaient pas encore eu la chance de mettre un MiG-21 dans leur viseur.
Le 6 janvier, alors que les effectifs s’étaient préparés à assurer une MiGCAP pour un raid de F-105, celui-ci fut annulé pour cause météo. Une patrouille de deux F- 4 devenue disponible fut envoyée pour suivre les mêmes itinéraires que les avions de reconnaissance, en adoptant une formation très serrée pour masquer aussi le nombre d’avions effectif. À la place des caméras se trouvaient alors des radars d’interception et sous les ailes et le fuselage, les missiles idoines.
Deux MiG émergent des nuages
À 25 nautiques (46 km) de Hanoï, Thomas Hirsh et Roger Strasswimmer d’un côté, Richard “Dick” Pascoe et Noman Wells de l’autre, tous du 555th TFS, obtinrent un contact clair sur une patrouille de MiG. S’approchant les uns des autres, dès que le contact visuel fut établi, le F- 4 leader tira deux “Sparrow”. Si le premier missile se retrouva sans guidage, le second heurta le MiG et explosa. En feu, le chasseur soviétique tomba dans les nuages.
Pascoe poursuivit un second MiG sur lequel son ailier venait de tirer. Le “Fishbed” échappa au tir et dégagea en piquant dans les nuages.
Le combat se poursuivit avec deux autres MiG qui émergèrent des nuages au même moment. Après quelques secondes, alors que les appareils étaient en train de s’affronter par une série de manoeuvres en ciseaux à basse vitesse et que Pascoe avait tiré, en vain, plusieurs autres “Sidewinder”, un des MiG réussit à se dégager, laissant son coéquipier aux prises avec deux “Phantom” II. Hirsh finit par récupérer un accrochage radar et tira un “Sparrow” alors que le MiG était en virage en montée. Le chasseur sembla se figer en plein ciel et perdre de la vitesse avant de décrocher et plonger. Alors qu’il arrivait sur la couche nuageuse, Pascoe observa l’éjection du pilote et la parfaite ouverture de son parachute. Visiblement, si le missile avait touché le MiG, il n’avait pas explosé. L’impact seul pouvait expliquer une panne réacteur. On peut aussi penser qu’au cours de la manoeuvre sous fort facteur de charge, le réacteur put connaître une défaillance. Au cours de ce combat, Dong Van De du régiment 921 fut tué et Mai Van Cuong parvint effectivement à s’éjecter. Quoi qu’il en fût, quelques jours après Bolo, le 8th TFW avait encore singulièrement augmenté son palmarès.
Les MiG-21 n’apparurent plus en combat aérien jusqu’au mois d’avril suivant. La moitié des avions de ce type en service au Viêtnam du Nord venaient d’être détruits en combat en l’espace de quelques jours seulement !
Voler sur des distances considérables
Robin Olds raconte : “Le F- 4 a été conçu comme intercepteur embarqué. Il nous est vite apparu qu’il était aussi capable de tenir bien d’autres rôles très convenablement. Mais, lorsqu’on pense en termes de tactiques, lorsqu’on pense en termes de conflits, vous devez prendre en compte, en premier lieu, l’endroit où vous vous trouvez, qui vous affrontez et dans quelles conditions ces combats se déroulent. Ce sont des principes de base.
Dans le cas des combats au-dessus du Vietnam du Nord, il nous était nécessaire de voler sur des distances considérables, tout en emportant une quantité importante d’armement pour atteindre nos objectifs. Nos avions avaient la capacité de franchir ces distances et de faire le boulot loin, très loin, de nos bases et, dans le même temps, d’engager des combats aériens au- dessus des bases de l’ennemi. Je pense que ceci doit être parfaitement clair dans l’esprit de ceux qui tenteraient de dresser des comparaisons entre nos avions et les leurs.
Chargés de bombes et de réservoirs additionnels
Les MiG-17 et MiG-21 ont été conçus comme des intercepteurs, voire des chasseurs de défense aérienne. Ils avaient donc des capacités tout à fait respectables par beau temps – voire de nuit et dans le mauvais temps pour le MiG-21. Les différences essentielles entre ces avions et les nôtres étaient la taille et la masse. Leur charge alaire, leur rapport poussée/poids pouvaient être largement à leurs avantages pour combattre à proximité de leurs propres bases, ce qui nous plaçait, avec nos avions plus gros et plus lourd, dans des situations “intéressantes”, si ce n’était clairement difficiles puisque, à proximité de leurs
tanières, nous devions combattre en gardant assez de carburant pour rentrer dans les nôtres.
Maintenant, jetons un oeil à leurs chasseurs. J’ai lu des articles qui dénigraient la défense aérienne nord-vietnamienne. C’est typique des analystes de salon et des stratèges amateurs, mais je peux vous assurer d’une chose, le MiG-17, c’est une saloperie ! Une sacrée petite saloperie !
Vous ne devez pas oublier que nous étions lourdement chargés de bombes et de réservoirs de carburant additionnels, en train de foncer vers une cible qu’il fallait frapper. On peut toujours gloser sur le F- 4 capable de voler à Mach 2 et quelques ou que le F-105 était le truc le plus rapide à basse altitude jamais construit, mais nous n’étions pas en mesure d’utiliser ces capacités. Nous allions vite, certes, mais nous étions bien en deçà des capacités de nos avions dans d’autres conditions. Surtout, nous allions à des vitesses auxquelles le MiG-17, aussi ancien qu’il puisse être, était à son meilleur. Nous étions juste dans sa plage de vitesse, si bien qu’il était capable de se rapprocher de nous, et là, il fallait faire gaffe ! Il était très léger et ses capacités en virage étaient fantastiques. Impossible de le suivre en virage avec un F- 4. Donc même si le F- 4 était un chasseur extraordinaire, un MiG-17 pouvait n’en faire qu’une bouchée. Si vous tentiez de l’affronter en dog fight (combat tournoyant), façon Deuxième Guerre mondiale, vous ne pouviez pas vous en sortir.”
Un certain calme après l’opération Bolo
Les semaines qui suivirent l’opération Bolo furent, en termes de combats aériens, très calmes : quelques affrontements ponctuels avec les MiG-17 pour l’essentiel, aucune rencontre avec des MiG-21 n’ayant eu lieu au cours de cette période. Lorsque la saison de la mousson arriva à son terme, les combats reprirent de plus belle.
Au cours de leurs missions du mois de mars, les F-105 abattirent trois MiG-17, les aviateurs vietnamiens perdant deux des leurs pour une seule revendication de victoire, un F- 4 dont les deux pilotes furent fait prisonniers mais dont la perte est due, selon les sources américaines, à un SAM-2. Pas de quoi pavoiser, ni dans un camp ni dans l’autre, car les escadres basées en Thaïlande avaient perdu neuf
“Je peux vous assurer que le MiG-17, c’est une saloperie ! Une sacrée petite saloperie ! ”
F-105D et, entre les escadres de Thaïlande et du Sud-Viêtnam, ce ne sont pas moins de sept F- 4C qui furent rayés des registres, chiffre élevé auquel s’ajoutèrent un RF- 4C et deux F- 4B de l’US Navy.
Premières attaques des aérodromes ennemis
Le mois d’avril fut sensiblement différent. Le 23 avril 1967, à la suite des demandes incessantes des pilotes agacés de ne pouvoir frapper les MiG dans leurs bases-sanctuaires, les planificateurs autorisèrent les premiers raids contre Hoa Lac et Kep. Ces attaques entraînèrent la destruction au sol d’une dizaine de chasseurs. Ces attaques furent répétées le 28 avril, le 1er mai puis le 3 mai, avec une réussite difficile à quantifier. Néanmoins Phuc Yen restait off limit (non accessible) alors qu’elle était devenue l’une des principales bases de la chasse ennemie. Pendant cette période, il est possible d’imaginer qu’à l’annonce d’un nouveau raid détecté, il était plus simple et plus sûr de lancer les patrouilles pour affronter le danger en plein ciel plutôt qu’au sol et impuissants, même si la défense antiaérienne était une protection assez intimidante.
Si les F-105 comptèrent sept MiG de plus à leur palmarès collectif, le 555th TFS en ajouta deux, les premiers MiG-21 croisés en plein ciel depuis Bolo. Mais les pertes furent cruelles avec cinq
F- 4C perdus et plus d’une dizaine de “Thunderchief” dont le F-105 de Leo Thorsness auquel une Medal Of Honor fut attribuée pour une mission exceptionnelle effectuée quelques semaines plus tôt. Pour faire bonne figure, les F- 4 de l’US Navy ajoutèrent deux victoires le 24 avril au palmarès de la VF-114, jour d’une attaque massive de la base de Kep, même si l’un des équipages vainqueurs dut évacuer son avion en vol. Quelques minutes avant de croiser la route des MiG, ils avaient été touchés par un tir venu du sol. Après avoir affronté les chasseurs adverses, ils s’aperçurent qu’ils ne pouvaient plus transférer le carburant des réservoirs d’ailes. Sans pouvoir rejoindre un ravitailleur en vol, ils n’avaient plus qu’à évacuer leur avion et attendre les secours dans l’eau.
Du côté adverse, il y eut de nombreuses revendications. Sept furent confi rmées par les sources américaines : deux F-105F, trois F-105D, un A-1E et un A- 4C dont les pilotes furent tous fait prisonniers, sauf deux portés défi nitivement disparus, alors qu’aucune perte américaine n’était reconnue comme incombant à la chasse adverse depuis le 14 décembre de l’année précédente.
Les pilotes de MiG avaient digéré l’affront de l’opération Bolo et avaient revu leurs tactiques. Ils étaient de retour avec bien plus d’agressivité. Les dernières semaines avaient été intenses, le mois de mai allait tout surpasser.
“On leur a botté le cul en mai 1967”
Mai 1967 vit les chasseurs de l’USAF remporter de nombreuses victoires pour un taux de pertes très raisonnable. Robin Olds raconte : “Je trouvais que les pilotes des MiG-17 étaient particulièrement habiles, et vraiment très agressifs. Parfois même extrêmement agressifs. On leur a botté le cul quand même en mai 1967. On a connu beaucoup de combats et on en a descendu un paquet. Je pense qu’ils ont dû se sentir comme des boxeurs renvoyés dans les cordes et qu’ils ont boudé un moment. Ils ont dû avoir quelques sessions de révisions des tactiques avant de revenir. Après la raclée (Bolo), ils disparurent pendant quatre semaines. Et quand on les revit ils semblaient avoir retrouvé de la vigueur et surtout avaient des tactiques différentes. Ils avaient retenu la leçon tout comme nous avions retenu les nôtres, comme tout le monde le fait en temps de guerre : apprendre à s’adapter aux situations changeantes.”
Lorsque la saison de la mousson arriva à son terme, les combats reprirent de plus belle. Parmi les cibles désormais autorisées au Nord, figuraient l’aciérie de Thai Nguyen, au pied de “Thud Ridge”, et les installations portuaires non loin d’Haïphong. Un des premiers assauts fut mené par Olds en personne à bord de son F- 4, déboulant à 500 noeuds (926 km/h) au ras du sol. Certains témoins racontent que pour éviter
les tirs antiaériens, les chasseurs volaient à moins de 10 m d’altitude pour larguer leurs bombes freinées et les bombes à sous-munitions.
Dès le 1er mai, deux F- 4C du 390th TFS rencontrèrent des MiG-17 et le bref affrontement se solda par deux victoires aériennes de plus pour l’USAF. De son côté, l’US Navy ne fut pas en reste avec également deux victoires aériennes obtenues par un F-8E, et surtout un… A- 4 ! Si le régiment 923 revendiqua deux victoires contre des F- 4, seul un F-8 de la VF-51 fut perdu ce jour-là ; son pilote avait été victime d’une panne réacteur. Un des pilotes ayant revendiqué un F- 4, Nguyen Ba Dich, fut tué ce jour-là. Le groupe Z et ses pilotes coréens perdirent deux de leurs membres au cours de ces combats, Lee Chang Il et Bak Dong Jun.
Le 4 mai, quatre F- 4C en mission MiGCAP pour protéger 20 F-105 provenant de Takhli rencontrèrent deux MiG-21. Alors que les chasseurs ennemis commençaient à harceler les chasseurs-bombardiers, le leader de la MiGCAP, Robin Olds en personne, engagea un MiG-21 en lui tirant plusieurs “Sparrow” qui, tous, manquèrent leur cible. Il tira donc au “Sidewinder” et réussit alors à toucher le chasseur adverse : “Je me suis battu pour me mettre en position de tir mais après avoir tiré tous mes “Sparrow” et la moitié de mes “Sidewinder”, j’ai eu enfin l’opportunité que je désirais. Mon avant- dernier “Sidewinder” s’est dirigé droit vers sa tuyère. Le MiG a oscillé puis s’est retourné en virage par la droite, vers le nord- est. Il a poursuivi son virage comme s’il n’avait pas été sévèrement touché. Du coup, je suis resté derrière lui. Il me restait un “Sidewinder” mais je ne suis pas parvenu à avoir l’indication sonore d’accrochage. J’allais demander à mon ailier de se mettre en position pour le fi nir lorsque son virage s’est transformé en piqué en direction de Phuc Yen, pas vraiment l’endroit qu’on a envie de survoler quand on peut l’éviter. Mais je n’avais pas envie de dégager tout de suite. Alors même qu’il donnait l’impression de pouvoir réussir à se poser à Phuc Yen, une flamme brillante a apparu sur le flanc droit de son avion. Le genre de flamme qui apparaît lorsque du magnésium est en train de brûler. Nous l’avions eu, peu importe comment. La Flak a commencé à s’occuper de nous et mon n° 3 m’a donné l’ordre de dégager car elle se faisait de plus en plus précise. J’ai fait un break à droite et je n’ai pas vu mon MiG s’écraser ; mon n° 3 m’a confirmé qu’il était tombé pile poil sur une batterie de 85 mm en plein milieu de l’aérodrome !”
Alors que le raid était sur le chemin du retour et passait à proximité de l’aérodrome de Hoa Lac, cinq MiG-17 furent détectés. Un des F- 4 tira trois “Sidewinder” sur l’un d’eux sans parvenir à un quelconque résultat.
Le pilote du MiG-21 touché par Robin Olds était Nguyen Van Coc du régiment 921. Ce jeune pilote venait d’obtenir, quelques jours plus tôt, sa toute première victoire aérienne au détriment du F-105D piloté par Robert Abbott. Après s’être éjecté à la suite de sa rencontre avec Robin Olds, il poursuivit sa carrière de pilote de chasse pendant toute la durée de la guerre qu’il finit en tête du palmarès de son arme avec neuf victoires. Outre des F-105, il fut vainqueur d’un combat contre un F- 4 en mai 1968, et il abattit aussi trois drones “Firebee” ! Le combat du 4 mai fut donc un vrai duel d’as !
L’un des combats les plus intenses du conflit
trouille de F-4 en MiGCAP engagea plusieurs – au moins neuf – MiG-17 mais, en dépit de nombreux tirs de missiles, aucune victoire ne fut enregistrée. La patrouille “Green” eut plus de réussite, même si les pilotes reconnurent plus tard que c’était la première fois qu’ils voyaient un MiG. Néanmoins le rapport d’engagement stipule que ces aviateurs avaient eu une expérience au combat air-air, lors d’une précédente affectation au sein de l’Air Defense Command.
Une autre patrouille de F- 4 eu plus de chance. Alors que leur mission MiGCAP approchait la cible prévue, la présence de MiG-17 fut décelée, mais les chasseurs ennemis ne semblaient pas vouloir engager le combat – ils étaient plus bas et un peu derrière eux – et les “Phantom” II ne s’en occupèrent pas. Un autre MiG fut alors brièvement aperçu dans les nuages. Quelques secondes plus tard, les “Phantom” II découvrirent qu’un combat aérien était en cours entre des F-105 et d’autres MiG-17. Deux des quatre “Phantom” II plongèrent pour engager les assaillants tandis que les deux autres restaient en couverture. “Blue 1” engagea un MiG avec “Sparrow” et “Sidewinder”, parvenant à obtenir une victoire aérienne confi rmée par “Blue 3” qui observa l’engagement complet avant d’entrer en action à son tour en venant à bout d’un MiG-17 avec trois “Sidewinder”. William Kirk et Stephen Wayne d’un côté, Fred Haeffner et Michael Bever de l’autre, tous relevant du 433th TFS, 8th TFW, furent crédités d’une victoire aérienne chacun.
Les pilotes témoignèrent que pour la première fois ils avaient eu l’impression que les deux groupes de MiG avaient opéré de façon coor
donnée pour arriver à séparer les différentes patrouilles et parvenir ainsi à leurs fins. Néanmoins les F- 4 étaient parvenus à ne pas entrer dans un combat tournoyant qui leur aurait été fatal. Les F-105, interceptés souvent après leur attaque et libérés de leurs charges ventrales, avaient aussi réussi à singulièrement tirer leur épingle du jeu.
Le point culminant le 20 mai
L’activité intense de la chasse ennemie se poursuivit dès le lendemain 14 mai, qui permit aux chasseurs américains d’obtenir trois nouvelles victoires dont les deux premières grâce à un canon en nacelle (lire page 76). Cet épisode trépidant trouva son point culminant le 20 mai.
Deux missions devaient se dérouler ce jour-là. La première, escortée par les F- 4 du 389th TFS, devait détruire un important dépôt où des véhicules étaient réparés du côté de Kinh No. Le “Wolfpack”, lui,
La Flak a commencé à s’occuper de nous et mon n° 3 m’a donné l’ordre de dégager
devait escorter un autre raid de F-105 à destination de la gare de triage de Bac Le. Robert Titus aurait dû, théoriquement, prendre la tête de la patrouille MiGCAP du 389th TFS mais il rentrait tout juste de la base de Nellis ou il avait assisté pendant plusieurs jours à un important symposium de pilotes de chasse.
L’intensité des évènements avait modifié rapidement les tactiques employées et il n’avait pu assister à toute la préparation du raid ; Robert Janca prit prendre la direction des opérations, laissant Robert Titus en place de n° 3. Finalement, il n’eut pas trop à se plaindre de ce repositionnement. Au réveil, Janca se montra assez peu motivé pour voler. Il tenait une solide gueule de bois ! Néanmoins, la mission n’étant prévue que pour le début
de l’après-midi, il eut tout le temps nécessaire pour récupérer ses esprits et n’eut pas, non plus, à le regretter.
Alors que l’ensemble du raid progressait au-dessus du territoire ennemi, les chasseurs en escorte repérèrent un premier MiG-21. La patrouille se scinda en deux laissant “Blue 3”, donc Titus et son navigateur Milan Zimer, prendre en charge la menace. Zimer obtint un accrochage parfait du radar sur l’objectif quand on leur annonça “break”. Les deux avions rompirent brutalement et perdirent ainsi leur cible.
Alors qu’ils progressaient du côté de “Thud Ridge” ils surprirent un autre MiG-21 sur lequel ils tirèrent trois “Sparrow”. Le dernier fit mouche. Vu Ngoc Dinh, qui se trouvait aux commandes, réussit à s’éjecter. Un autre chasseur ennemi passa dans leur champ de vision et ils s’apprêtaient à lui lancer leur dernier “Sparrow” lorsque “Blue 4” annonça “bingo fuel” (à cours carburant) en raison d’un problème technique qui le touchait et les deux F- 4C rebroussèrent chemin en direction de leur base.
De son côté, Janca repéra un autre MiG-21 sur lequel il parvint à se mettre en position de tir. De façon assez inédite, il n’eut besoin que d’un seul “Sidewinder” pour obtenir une victoire aérienne plutôt facile ; Nghiem Dinh Hieu, du régiment 921, y laissa la vie.
De son côté, le “Wolfpack” se retrouva au coeur d’un combat d’une intensité folle. Huit F- 4 “Phantom” II escortaient les F-105 et à leur tête se trouvait “le boss”, Robin Olds en personne, avec Steve Croker en place arrière. Alors qu’ils approchaient de la cible désignée, Olds repéra une première patrouille de quatre MiG-17 puis, très rapidement, une seconde tentant de les approcher par leurs 4 heures, parderrière à droite. Les F- 4 commencèrent à virer mais le passage de F-105 les obligea à interrompre la manoeuvre. Le temps de finir le virage, Olds jeta un oeil par-dessus son épaule pour voir, stupéfait, l’avion de son ailier en flammes ! Alors que l’équipage s’éjectait, il fut lui-même encadré par les tirs du canon d’un MiG auquel il échappa en virage serré sans jamais l’avoir vu. Jack Van Loan et Joseph Milligan arrivèrent sains et saufs au sol, mais ce
fut pour connaître une longue captivité ; ils ne furent libérés qu’en 1973. La victoire fut revendiquée par Nguyen Ngat Chieu du régiment 921 volant sur MiG-21.
Les MiG se protègent les uns les autres
Robin Olds avisa un autre groupe de MiG et se dirigea dessus. Il put en engager avec un “Sidewinder” et obtint une nouvelle victoire aérienne. Mais le combat n’était pas terminé. Les MiG étaient en train de s’organiser en cercle défensif, orbitant en se protégeant les uns les autres au- dessus de la base de Kep, bénéficiant là aussi de la défense antiaérienne locale. Les “Phantom” II tentèrent à plusieurs reprises d’engager les chasseurs ennemis et de briser leur défense, mais les MiG parvenaient à contrer efficacement les attaques. Robin Olds tenta au moins trois fois de s’approcher pour tirer un “Sparrow” ; il fut systématiquement repoussé. Il repéra néanmoins, plus bas, un MiG solitaire qui orbitait.
Après plusieurs minutes d’engagement, au moment de se décider à rentrer, l’équipage du F- 4C “Green 1” se livra à un petit calcul d’autonomie et il s’avéra qu’ils avaient encore le temps de tenter un dernier coup. Robin Olds plongea vers le MiG solitaire. Les traînées noires des réacteurs du F- 4 lancés à pleine puissance avertirent le pilote du danger en approche. Il tenta d’esquiver l’attaque en fi lant au ras du sol, poursuivi et rattrapé au milieu d’une vallée ; un “Sidewinder” scella son sort.
Deux autres MiG tombèrent au cours de ce combat qui vit donc huit “Phantom” II affronter entre 12 et 15 MiG, peut- être 16, et qui fut interminable puisqu’il s’étala sur une douzaine de minutes. John Pardo et Philip Combies, accompagnés de leur navigateur respectif, Sephen Waynes et Dan Lafferty, furent crédités aussi d’une victoire aérienne aux dépens de deux MiG-17. Visiblement, les sources vietnamiennes ne donnent aucune perte ce jour-là, ce qui pourrait indiquer que les avions affrontés relevaient du groupe Z nord-coréen. Deux jours plus tard, Titus et Zimer remportaient un doublé au canon !
Au total, le mois de mai 1967 vit se dérouler 72 combats aériens dont la plupart se terminèrent en statu quo. Deux “Phantom” II furent perdus mais 21 victoires furent enregistrées par l’USAF et cinq pour l’US Navy. Les MiG se défendaient désormais âprement après les phases offensives. En se couvrant mutuellement, en cercle défensif, ils obligeaient les chasseurs en MiGCAP à parfois prendre des risques inconsidérés.
Les tactiques de l’USAF désormais dépassées
Les tactiques utilisées alors par l’USAF, héritées du passé glorieux de la Deuxième Guerre mondiale et de la Corée, étaient désormais dépassées ; les formations serrées et rigides étaient vulnérables aux attaques des missiles air-air et faisaient des cibles remarquables pour les armes sol-air. Mais les structures de commandement et de formation de l’USAF n’avaient pas non plus la souplesse pour s’adapter rapidement aux besoins immédiats. Et toutes les escadres n’avaient pas à leur tête un Robin Olds capable de prendre de vraies initiatives : “Nous ne combattrons plus par patrouille de quatre désormais, nous allons combattre
par paires en nous coordonnant !” Et visiblement, les pilotes du 8th TFW avaient aussi pour consigne de tirer les “Sparrow” systématiquement par paires pour augmenter leurs chances de coup au but. “Si vous prenez en compte l’adversaire. Peut-être n’a-t-il que 10 ou 12 avions en vol alors que vous en avez 48, mais il garde l’avantage complet, quand même. Parce qu’il peut engager quand il veut. Et si l’ennemi a l’avantage de l’altitude et de la vitesse, peu importe que vous soyez 1000, il peut vous avoir à sa guise. En fait, plus vous êtes nombreux et plus le taux de perte par raid diminue. Ok, les mecs qui se font descendre, ça leur fait une belle jambe. Mais le fait que l’ennemi soit moins nombreux doit vraiment être analysé en prenant en compte qu’une section du raid seulement, une ou deux patrouilles, peut se faire intercepter par une douzaine de MiG, et là, c’est une opposition à trois contre un. Un exemple classique qui illustre ceci est le raid du 20 mai 1967. Huit d’entre nous volaient en MiGCAP pour protéger des F-105 en route pour une cible près de la base aérienne de Kep, 35 miles [56 km] au nord-est de Hanoï. Nous avons rencontré une force de 16 MiG. Huit “Phantom” II contre 16 MiG ! Ce n’est pas vraiment ce que j’appelle une supériorité aérienne !”
Et la marine pendant ce temps-là ?
L’US Navy, de son côté, avait adopté des tactiques plus fluides qui semblaient donner de bons résultats. Alors que plusieurs porte- avions disposant de F- 4 étaient en action dans la zone, ce sont les F- 8 qui remportèrent les victoires aériennes, une le 1er mai, et quatre le 19 mai, jour où les MiG-17 du régiment 923 revendiquèrent deux victoires contre deux F- 4B, ceux de Plumb et Anderson ( BuNo 153004, VF-114 du Kitty Hawk) et de Rich et Stark (BuNo 152264, VF-96, du Constellation). Trois d’entre eux furent fait prisonniers ; seul Rich, le pilote du deuxième “Phantom” II, fut tué. Néanmoins, les deux pilotes impliqués furent abattus, Phan Thanh étant tué aux commandes de son avion ; Nguyen Huu Diet parvint à s’éjecter. Les deux “Phantom” II perdus furent, au niveau des sources américaines, attribués à des SA-2.
Un feu de paille ?
Néanmoins, ces revers successifs entraînèrent encore des adaptations des doctrines de défense des chasseurs de l’aviation du Nord-Viêtnam. Après que la North Vietnamese Air Force (NVNA) eut passé un été avec une activité minimale, elle assura des missions d’interception sous contrôle radar, très minutieusement organisées et très efficaces. Les pilotes concernés faisaient aussi preuve d’une agressivité grandissante. Or, il s’est avéré que les services de renseignements avaient détecté de nouveaux profils de vol pour les missions d’entraînement de la chasse adverse et que ces informations n’avaient pas été communiquées aux escadres de chasse qui durent alors affronter cette nouvelle menace sans avoir imaginé de nouvelles tactiques.
Ce n’est que le 24 octobre 1967 que la base de Phuc Yen pu être attaquée, mais le pouvoir politique limita le temps de l’opération et le nombre d’appareils impliqués. Le résultat de l’attaque fut donc maigre. Même si les bases furent toutes attaquées, à l’exception de Gia Lam qui se trouvait en bordure de l’agglomération de Hanoï, les Vietnamiens parvinrent à limiter leurs pertes en évacuant leurs chasseurs vers des aérodromes chinois voire même, dans certains cas, en les déplaçant avec des hélicoptères lourds pour les disperser au maximum à distance des aérodromes.
Les pertes et les victoires obtenues en cette fin d’année 1967 s’étaient équilibrées. 12 MiG descendus par les F- 4 pour neuf avions perdus bien que les cibles privilégiées des chasseurs soient bien sûr les F-105. Le temps des victoires et des missions sweep était révolu. D’ailleurs, le commandement du 8th TFW de Robin Olds était terminé ! Sur sa période de commandement, l’escadre obtint 24 victoires aériennes, son chef s’en adjugeant quatre à lui seul ! Commander par l’exemple était sa règle, peut-il exister meilleure démonstration !
“(…) désormais, nous allons combattre par paires en nous coordonnant ”