Une grande ambition
Les super “Mirage” F2 et F3
Un puissant réacteur américain permet à l’armée de l’Air de lancer un ambitieux programme d’avion de combat.
Alors que les “Mirage” III et “Mirage” IV, propulsés par un Snecma “Atar” 9, entrent en service au début des années 1960, l’état-major de l’armée de l’Air a déjà formulé un besoin d’un avion de pénétration lointaine doté d’un moteur plus puissant et à consommation de carburant plus faible. Cet appareil doit répondre, au meilleur coût, à deux préoccupations : l’accroissement du temps d’autonomie et du rayon d’action, ainsi que la réduction des distances de décollage et d’atterrissage afin de ne plus être tributaire des grandes pistes repérables et vulnérables. L’aile delta adoptée pour la famille des “Mirage” III et IV imposant une vitesse élevée lors des approches et des atterrissages, il est demandé qu’elle soit inférieure à 260 km/h. La fiche programme de ce nouvel appareil intéressant les forces aériennes de deux pays, Israël et l’Afrique du Sud, cela laisse entrevoir des perspectives à l’exportation et donc une baisse des coûts unitaires.
Le premier problème à résoudre est la motorisation, car la famille “Atar” 9 arrive à la limite de l’augmentation des performances. Le deuxième est celui de la définition de la formule d’aile. Tandis que l’aile en flèche s’avère rapidement la solution permettant de résoudre la vitesse d’atterrissage, le choix du moteur est long et laborieux.
La motorisation au centre de la réflexion
De 1958 à 1975, la question de la motorisation est au centre de tous les programmes d’avions de combat français. La cellule d’un avion est étudiée et dessinée en fonction des caractéristiques du moteur qui doit l’équiper, ce qui prend environ cinq ans. Les études et développements d’un nouveau moteur approchant dix ans, son choix doit largement anticiper celui de la cellule.
C’est en 1958 qu’a commencé la réflexion sur un nouveau moteur. La Société nationale d’étude et de
construction de moteurs d’aviation (Snecma) n’en fabriquant pas d’une poussée supérieure à 6,7 t et n’ayant pas l’expérience des moteurs à double flux – à consommation de carburant faible – se tourne alors vers une production américaine.
En décembre 1959, en échange d’une cession de 10,9 % de son capital au motoriste Pratt & Whitney, la Snecma acquiert la licence de ses turboréacteurs dont le nouveau double flux JTF 10 qu’elle dote d’une postcombustion qui permet d’atteindre 6,5 t de poussée et qui prend pour nom TF 104. Le 4 juin 1964, à Istres, il vole sur un “Mirage” III au fuselage agrandi appelé “Mirage” IIIT. Afin de disposer d’une poussée plus importante pour pouvoir équiper un avion de plus grande taille, la Snecma développe une version plus puissante dénommée TF 106 de 7,3 t de poussée. Elle vole le 25 janvier 1965 sur le “Mirage” IIIT qui atteint Mach 2 en novembre.
Le lancement du “Mirage” F
Répondant à la demande de l’armée de l’Air, la société Dassault, alors appelée Générale aéronautique Marcel Dassault (GAMD), étudie un premier appareil sous l’appellation “Mirage” IIIT2. Le 16 septembre 1963, il prend le nom “Mirage” IIIF. Le 21 novembre, Benno Claude Vallières, gérant-directeur général de Dassault, signe le marché d’étude d’un avion prototype équipé du TF 106.
Le nouvel avion est étudié par l’équipe dirigée par Jean-Jacques Samin. L’aile delta est remplacée par une aile haute à forte flèche (55°) largement hypersustentée. Ce choix est expliqué par Henri Déplante, directeur général technique Dassault : “Les procédés technologiques avancés (fraisage intégral et chimique, matériaux nouveaux à haute résistance) ont permis de défi nir une voilure à la fois très mince et très robuste, d’où un retour aux ailes en flèche classiques avec une forte hypersustentation impossible sur un delta pur.” Les empennages sont montés en position basse sur le fuselage.
Le poids de la structure à vide (9,8 t) est le double de celui du “Mirage” IIIE dont il reprend une partie des caractéristiques (systèmes hypersustentateurs, fixation du train d’atterrissage, système d’armes, structure). Le fuselage, biplace, est en structure étanche