AVIONS MAUBOUSSIN, ORFÈVRE EN AVIATION LÉGÈRE
L’esprit d’innovation est plus que jamais présent dans l’aéronautique. Rencontre avec David Gallezot, qui a relancé les prestigieux noms des avions Mauboussin avec deux projets ambitieux autours de la propulsion hybride.
Avions Mauboussin est un constructeur aéronautique fondé en 2011 par David Gallezot, pilote privé, polytechnicien et ingénieur Supaéro. C’est aussi un fin connaisseur de l’histoire de l’aviation puisqu’il a voulu reprendre le nom d’un prestigieux constructeur pour en cultiver l’esprit au XXIe siècle. Deux programmes industriels sont en cours, menés par une équipe jeune et dynamique implantée depuis 2017 au Techn’Hom, à Belfort. Tout d’abord Alérion M1h, un avion léger de 2 places en tandem dont le premier vol est prévu début 2023. Vient ensuite Alcyon M3c, un multimoteur régional hybride de 6 places, avec un premier vol planifié en 2024. David Gallezot présente sa philosophie : « Si le nom Mauboussin est lié à la haute joaillerie, il est surtout synonyme pour moi d’une aviation accessible, à faible motorisation, écologique avant l’heure, une philosophie adoptée par toute l’équipe du programme.
En 1928, Pierre Mauboussin a créé Avions Mauboussin pour rendre l’aviation accessible au plus grand nombre, puis il a développé les modèles les plus performants, tel le Fouga Magister. C’est exactement dans ce double sillage que nous voulons nous inscrire : performance et accessibilité. Ainsi, Avions Mauboussin se recrée pour développer une aviation réellement régionale et désenclaver les territoires mal desservis, une aviation durable et responsable du XXIe siècle. Nos avions sont des condensés de technologie au service de la durabilité, mais également, pour les passionnés d’aviation, des gardiens de l’authenticité et du plaisir de voler. Notre objectif est clair : être les premiers à voler à l’hydrogène en conditions réalistes, c’est-à-dire hors vols expérimentaux. Nous pensons nos deux premiers mo
dèles, Alérion M1h et Alcyon M3c, en parallèle des infrastructures qui leur seront adaptées. En la matière, le champ des possibles est vaste : pistes ultra-courtes, hippodromes désaffectés, airparcs urbains et, pourquoi pas, des structures flottantes ! Les pionniers ont propulsé l’aviation, en quelques dizaines d’années, de l’ère des “sauts de puce” à celle du vol supersonique et de l’avion pour tous. Il est de notre responsabilité de poursuivre cette oeuvre, en nous appropriant les enjeux de 2030 et au-delà ».
Premier-né de la gamme, Alérion M1h
Premier-né de la gamme Avions Mauboussin, le biplace Alérion M1h. Il est destiné au marché des pilotes propriétaires. L’avion est certifié selon les règles et les exigences de l’Agence européenne pour la sécurité de l’aviation (EASA) et de la Federal Aviation Administration (FAA) américaine. De sa conception à son utilisation, en passant par sa fabrication, l’impact environnemental d’Alérion M1h se veut le plus réduit possible : matériaux naturels, consommation faible, émissions minimales grâce à l’électricité… Ce biplace est réalisé en matériaux composites naturels pour réduire l’impact environnemental. Sa structure en bois (bouleau, balsa, frêne...) issus de forêts certifiées FSC et PEFC (gestion durable), est complétée de fibres de lin et de chanvre, colles et vernis avec solvant minimum ou d’origine naturelle. Cette association de matériaux biosourcés offre à Alérion M1h une structure légère, écologique et efficace, plus responsable que les avions en carbone et plus performante que le métal. Le mode électrique au décollage, à l’atterrissage et en circulation au sol confère à Alérion M1h une discrétion exemplaire. Comme pour une voiture hybride, le bruit est considérablement réduit : un atout certain pour le confort du pilote et des passagers, mais aussi des riverains d’aérodromes. De même, l’ergonomie et l’absence de vibrations dans le cockpit offrent au passager et au pilote une expérience unique pendant toute la durée du vol : voler sans casque. Un premier vol est envisagé pour 2023 en version hybride. La commercialisation est prévue en 2025. Cet avion permettra de valider les technologies transférables au modèle suivant, Alcyon M3c, et d’être rapidement sur le marché de l’aviation générale
Avion régional, Alcyon M3c
Deuxième projet, Alcyon M3c, un avion de transport régional à décollage et atterrissage courts, aura une capacité de cinq passagers et affiche les mêmes ambitions de motorisation que le biplace Alérion M1h (hybride puis hydrogène). Il aura une autonomie de 1 500 km et atteindra une vitesse de croisière de 370 km/h. La certification et la commercialisation sont envisagées à l’horizon 2026.
Alcyon M3c sera l’élément clé de la mobilité aérienne régionale et de proximité. Il sera capable de performances en accord avec les besoins de la mobilité moderne (souplesse d’utilisation, atterrissage/décollage au plus proche de l’origine et de la destination finale des voyageurs, discrétion). Un premier vol est envisagé pour 2027/2028 en version hydrogène.
Pour David Gallezot, Alcyon M3c et Alérion M1h seront le symbole de la renaissance de l’aviation moderne et de ce qu’elle doit représenter : la technologie, le design, l’écologie.
Propulsion hybride
La propulsion d’Alérion M1h et d’Alcyon M3c est assurée par Zéphyr, une chaîne de traction hybride rechargeable, simple, légère et robuste, développée en partenariat avec (entre autres) l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard.
La motorisation des Avions Mauboussin sera dans un premier temps hybride (électrique/thermique). Elle permettra un décollage et un atterrissage courts en mode électrique, tandis que la croisière s’effectuera en propulsion thermique avec une autonomie de plusieurs centaines de kilomètres. Dans un second temps, une partie thermique alimentée à l’hydrogène permettra de faire fonctionner le moteur électrique, et ainsi supprimer totalement les émissions polluantes et le recours aux énergies fossiles (déjà très réduites grâce à la partie propulsion électrique). Cela entraînera une diminution du bruit et des nuisances. La propulsion électrique n’émet ni bruit, grâce à une très faible vitesse de rotation d’hélice et à l’absence de bruit d’échappement, ni rayonnement infrarouge grâce à son rendement de 90 %. La propulsion thermique voit son rendement optimisé par la décorrélation du moteur et de l’hélice et son bruit réduit : moteur noyé dans le fuselage, échappement soigné type automobile. Par conséquent, sa signature acoustique et infrarouge est minime par rapport à une motorisation conventionnelle, en plus d’être « active » uniquement là où elle gêne le moins : approche pour un véhicule terrestre, haute mer pour un navire, décollage, montée et transit pour un avion ou un drone. L’hydrogène sera utilisé comme carburant avec une turbine – elle peut aussi brûler du kérosène, ce qui permet une continuité technique. L’utilisation de l’hydrogène nécessite toutefois des infrastructures qui n’existent pas encore, souligne David Gallezot, d’où la nécessité d’employer à ce stade une propulsion hybride pour ne pas limiter les possibilités de se poser partout ou presque.
Comme beaucoup de créations dans l’aéronautique, Avions Mauboussin cherche des investisseurs. Difficile de trouver des fonds dans une région baignant moins dans l’aéronautique comme à Toulouse et surtout quand les investisseurs potentiels veulent bien sauver le monde en 2050 mais en ayant fait fortune en 2025. Il faut donc rassurer, expliquer que l’aéronautique fonctionne sur des cycles économiques longs. En février 2021, il est annoncé qu’Avions Mauboussin bénéficie d’un financement de 800 000 € pour le développement de son projet « Zéphyr ». Cette somme lui a été attribuée dans le cadre du
fonds de modernisation et de diversification de la filière aéronautique lancé par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, et Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l’Industrie. Avions Mauboussin, c’est en 2021 une équipe d’une vingtaine de personnes. La nouvelle phase de son développement passe désormais par un aérodrome pour mener les essais en vol et installer sa production. Avions Mauboussin s’inscrit dans l’aviation du futur.