La longue histoire de la sépulture du pilot officer Kemp
Lorsque les Allemands découvrirent le corps du plt off. Kemp échoué sur un rivage au sud de l’estuaire de la Loire, ils se hâtèrent de l’inhumer, sans en informer les autorités françaises et sans déposer dans son cercueil ou sa housse d’inhumation un élément quelconque d’identification, livret militaire par exemple (ou équivalent), que le pilote devait détenir dans une poche de sa tenue de vol. Ils l’inhumèrent, à faible profondeur, dans une tombe collective préexistante, près de la petite ville de Bouin en Vendée, où reposaient les corps identifiés de 16 soldats britanniques décédés lors du naufrage du paquebot Lancastria le 17 juin 1940. Parallèlement, la mère de l’aviateur fut informée, par le commanding officer du Squadron 151, que son fils n’était “…pas revenu d’une mission dans le golfe de Gascogne le 11 avril 1944”. Une tournure de phrase habituelle dans ce type de situation, se voulant la plus neutre possible afin de ne pas inquiéter inutilement les familles. Mais une assertion transformée, en décembre 1944, en information officieuse de décès, lorsque les affaires personnelles du jeune aviateur, restées à la base de Predannack, furent remises à une personne proche de celui-ci vivant en Angleterre. Et une confirmation définitive de décès le 1er février 1945 : “Mort désormais officiellement présumée”, peut-on lire dans différents documents des autorités militaires britanniques. Le 28 août 1947, la tombe collective de Bouin fut ouverte afin d’en exhumer les cercueils des 16 militaires britanniques qui y reposaient. Ce qui permit aux enquêteurs du France Detachment Missing and Enquiry Service chargés de cette tâche de découvrir un 17e corps, revêtu d’une combinaison de vol avec l’insigne d’un aviateur néo-zélandais anonyme. Et si aucun document papier permettant d’identifier le corps n’y fut retrouvé, de nombreux objets personnels furent récupérés dans la tenue de vol de l’aviateur, tels un pistolet de service, un étui à cigarettes, un stylo-plume, un canif, un half gold sovereign (pièce de monnaie d’un demi-souverain), entre autres. Une longue enquête fut diligentée par les autorités militaires compétentes, tant en France, qu’en Angleterre ou en Nouvelle-Zélande, comportant l’analyse des objets retrouvés, des recherches de pertes d’aviateurs néo-zélandais disparus en 1944 dans l’Ouest de la France, un examen de dentition, etc. Entre-temps la dépouille du plt off. Kemp, toujours non identifiée, fut inhumée, dès septembre 1947, au cimetière militaire britannique de Pornic. Une croix provisoire fut érigée sur sa tombe avec la mention “Unknown Airman plt off. R.N.Z.A.F” (aviateur inconnu, pilot officer, Royal Air Force de Nouvelle-Zélande) gravée sur celle-ci.
Et, comme pour tous les 20 000 aviateurs du Commonwealth morts sans sépulture connue, son nom fut inscrit au Runnymede Memorial, un mémorial inauguré en octobre 1953 par la reine d’Angleterre. Finalement, par un mémorandum en date du 27 avril 1954, le ministère de l’Air de Nouvelle-Zélande reconnut que la tombe anonyme n° 3, de la rangée H, du carré II du cimetière militaire britannique de Pornic, était celle du plt off. H. K
Kemp, disparu le 11 avril
1944 au large de Saint-Nazaire.
Et l’élément décisif de cette reconnaissance finale, si tardive, fut l’affirmation, par la mère du jeune aviateur, confortée par le témoignage d’un proche de l’intéressé, que celui-ci gardait toujours sur lui, partout où il allait, un portebonheur : la pièce de half gold sovereign retrouvée dans sa tenue de vol.