PERDU ET RETROUVÉ

★★★ GUIDE DES ÉGARÉS, de Jean d’Ormesson, Gallimard, 128 p., 14 €.

Est-ce un guide, un manuel, une longue conversation dominicale au coin du feu ? Le nouvel essai de Jean d’Ormesson est surtout une promenade vers les grandes questions qui agitent l’esprit des hommes. La science, l’espace, le temps, le mal, le plaisir, la vie, et même Dieu, tout y passe, comme dans la plupart de ses derniers ouvrages. La sagesse n’est pas malvenue à l’âge vénérable qui est le sien (91 ans). Malgré tout, il semble que celle-ci ne soit pas encore à l’ordre du jour. L’amour et les mots passionnent encore Jean d’Ormesson et l’invitent à danser. L’auteur d’Au plaisir de Dieu n’a pas lu tous les livres, ni épuisé tous les charmes terrestres. Sa vitalité facétieuse, ses tournoiements, sa mémoire vertigineuse et sa gourmandise coquine charment toujours. Ce qui compte là n’est pas la réponse que cet homme mûr apporte aux grandes questions qui nous taraudent, mais sa façon de faire planer sur des propos graves une musique légère. Dans ce livre, nulle conclusion, nulle vérité définitive, sauf peut-être celle de l’amour du Christ : « Dieu, absent et présent, est notre unique espérance, écrit-il. Et, en vérité, dans la beauté, dans la joie, dans la justice, dans l’amour, la seule réalité. » Jean d’Ormesson ignore sans doute ce que deviendront son nom, son oeuvre, son héritage au fil du temps. Il demeure certain, en revanche, que le culte qui lui est rendu de son vivant est le signe d’une soif. La soif des égarés.