L’éditorial de Guillaume Roquette
Le 13 novembre 2015,
la terreur islamiste s’abattait sur Paris. 130 morts dans une nuit d’horreur, le plus grand massacre perpétré en France depuis Oradour-sur-Glane. Pourtant, un an après, malgré les répliques sanglantes de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray, la France semble ne plus éprouver pour ce qui fut notre 11 Septembre qu’une étrange indifférence.
Le sursaut d’union nationale
provoqué par François Hollande dans son adresse au Congrès est loin.
On ne débat aujourd’hui que du montant des indemnités auxquelles peuvent prétendre les malheureuses victimes du Bataclan et des cafés alentour. L’état d’urgence a été banalisé, la déchéance de nationalité abandonnée, les fichés « S » laissés en liberté. « La France est en guerre » déclarait le président de la République au lendemain du 13 novembre. Drôle de guerre en vérité : hormis un engagement militaire déterminé pour détruire à la racine l’Etat islamique, dont les batailles de Mossoul et de Raqqa sont les dernières illustrations, la vie a repris presque comme avant.
L’histoire retiendra que les attentats islamistes
n’ont nullement provoqué le chaos que leurs commanditaires espéraient. Le pays a fait preuve d’une résilience admirable, nulle part on n’a vu d’actes de vengeance ou de débordements racistes. Mais les drames de 2015 et 2016, malgré leurs 239 morts, n’ont pas non plus provoqué de sursaut civique. La République a mobilisé sans réserve son armée et sa police, mais semble avoir oublié qu’elle dispose aussi d’autres armes, juridiques, éducatives et même morales. Pourtant, la situation est loin d’être apaisée. Comme l’expliquait Gilles Kepel dans nos colonnes il y a une semaine, « nous sommes face à un processus de guerre civile ». Dans les banlieues, les salafistes sont à l’oeuvre pour creuser une fracture culturelle irréductible, annonciatrice de nouvelles violences. L’hybridation entre délinquance et islamisme n’a jamais été aussi opérante.
La colère sourde des policiers
que toutes les promesses gouvernementales n’ont pas su éteindre comme le découragement des enseignants devant la banalisation des violences dont ils sont victimes en sont l’illustration : la France ne se montre pas assez ferme. Les exemples de cette démission sont quotidiens. Comment accepter que nous n’ayons pas été capables d’interdire sur nos plages le burkini, cet étendard déguisé en vêtement ? Comment comprendre que, près de cinq ans après les tueries de Toulouse et de Montauban, les complices de Mohamed Merah n’aient toujours pas été jugés ? Comment expliquer que des offices d’HLM (celui de Seine-Saint-Denis en l’occurrence) en soient réduits à attaquer l’Etat en justice pour cause d’insécurité ? Il règne en France « un climat d’insidieuse accoutumance à l’inacceptable », selon les mots d’Alain Finkielkraut *. Est-ce irréversible ? Il n’y a guère d’enjeux plus cruciaux pour les échéances électorales qui s’annoncent. * Dans le dernier numéro du mensuel Causeur, qui consacre son dossier de couverture à l’engagement à gauche de France Inter.
JAMAIS L’HYBRIDATION ENTRE DÉLINQUANCE ET ISLAMISME N’A ÉTÉ AUSSI OPÉRANTE