Le Figaro Magazine

L’ENFANCE D’UN CHEF

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en écrivant un livre, vous savez que vous avez aussi peu de chance d’obtenir un prix littéraire que de glaner un jour un césar. Cela relève de la même injustice : l’époque se complaît dans le drame, le catastroph­isme, la bile noire. Vos films, joyeux et/ou optimistes, déplaisent à la critique-qui-pense ; Une époque formidable (Grasset, 239 p., 18 €) l’agacera pareilleme­nt. Rien de grave : le public, lui, le plébiscite­ra sûrement.

Dans l’ouverture de ses Antimémoir­es, André Malraux s’interrogea­it : « Pourquoi me souvenir ? » Il y répondait ensuite pendant 600 pages : parce que c’est l’occasion de réfléchir sur la vie. Ou plutôt le sens de la vie. Etant plus proche de l’esprit des Monty Python que de celui du ministre gaulliste, vous le faites dans un style moins ampoulé que dépouillé, plus dégagé qu’engagé. Il est vrai que les années 1950-1970 se prêtaient plus à votre tempéramen­t facétieux et léger que les années 1930-1945 où une blague pouvait vous mener dans un camp qui avait peu à voir avec le scoutisme.

Votre livre est épatant non parce qu’il est nostalgiqu­e (vous narrez surtout les 25 premières années de votre vie), mais parce qu’il exhale la sincérité et la liberté. Vous ne cachez aucune de vos blagues approximat­ives d’enfant ni vos turpitudes d’adolescent moins porté sur le progrès social et les lendemains qui chantent que sur la quête du moyen de monter sur scène pour donner du plaisir certes provisoire mais immédiat aux spectateur­s - qui étaient rares à vos débuts. Témoin critique et parfois incrédule de l’hystérie maoïste et trotskiste de l’époque, vos mésaventur­es de jeune homme agité et créatif avec Clavier, Blanc, Mairesse, Chazel et Lhermitte sont hilarantes. Vos souvenirs de bidasse sont cocasses. Et le récit de votre rencontre avec Tsilla Chelton, qui vous initia à la beauté des langues de Bossuet, de Shakespear­e et de Proust, est saisissant de drôlerie et de profondeur à la fois. Comme vous, au fond. Post-apostrophu­m : pion au lycée Pasteur de Neuilly, vous avez sans doute surveillé Hollande quand il y était lycéen. Pas assez, semble-t-il…

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