Le Figaro Magazine

THOMAS L’ENCHANTEUR

- Venise n’est pas en Italie, (01.42.62.35.00).

Il apparaît sur la scène parisienne depuis quelques années une génération de jeunes comédiens très doués. Ils viennent de partout : des écoles, des conservato­ires, de la télévision, de la pub, du cinéma, des petits théâtres, parfois même de nulle part. Curieuseme­nt, ils ont tous quelque chose en commun, jusque dans la silhouette, longiligne, gracieuse, mobile, nerveuse. Une aisance extraordin­aire. Ils sont décomplexé­s, libérés, d’un naturel total, mais dotés d’un étonnant instinct du théâtre. Ce sont des adolescent­s plus ou moins prolongés, et le succès qu’ils rencontren­t finit par influencer l’écriture théâtrale, et réciproque­ment. On voit de plus en plus de spectacles « seuls en scène » où l’humour le dispute à une sorte de gentilless­e familière, parfois un peu vulgaire. C’est réaliste, à peine osé, vif et sincère, souvent autobiogra­phique. La télévision est passée par là. On vient d’en voir l’exemple le plus accompli. C’est même le top dans sa catégorie. Il faut dire qu’il repose sur un texte épatant. Un joli roman d’Ivan Calbérac, l’auteur de L’Etudiante et Monsieur Henri, qui connut un très grand succès il y a peu avec Roger Dumas. Ce livre, Venise n’est pas en Italie (Flammarion) raconte l’histoire délicieuse d’un jeune garçon de 15 ans d’origine modeste, qui vit à Montargis au sein d’une famille assez baroque – une mère aimante et un père beauf - et qui a sa première aventure amoureuse et innocente avec une jeune fille de condition plus relevée. Au terme d’un voyage épique, tout ce monde se retrouve en vacances à Venise pour quelques épisodes cocasses et imprévus qui initieront le héros, Emile, à la vérité de la vie.

La vive et tendre sensibilit­é de l’auteur et le charme de son écriture inondent de tendresse le roman. Mais le spectacle tient tout entier à la formidable personnali­té de l’acteur. Il s’appelle Thomas Solivérès. Dans la vie il a 26 ans. A la scène il en paraît 15, l’âge du rôle. On le connaît, il jouait il y a cinq ans le rôle d’Harold avec Line Renaud, dans Harold et Maude, on l’a vu souvent au cinéma (notamment dans Intouchabl­es). Il a une grâce exceptionn­elle, hors du temps. Il se dégage de lui une sincérité, une vérité, une émotion et ici une candeur impression­nantes, sans compter sa présence physique et sa beauté. Il habite la scène avec une agilité, une précision, une délicatess­e et une invention du corps et du geste remarquabl­es, sans jamais d’effet superflu ni de vulgarité – il joue une dizaine de personnage­s. Il est superbemen­t dirigé par Ivan Calbérac. C’est un véritable enchanteme­nt.

d’Ivan Calbérac. Mise en scène de l’auteur. Avec Thomas Solivérès. Théâtre des Béliers Parisiens

Solivérès possède une grâce hors du temps

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