Les insolences d’Eric Zemmour
Le PS n’est pas le seul mort du premier tour. Les Républicains ne sont pas en meilleur état. Mais cela se voit moins. Le cadavre bouge encore. Il parle, il pérore, même. Il prépare les législatives. Il enjambe la présidentielle. Il revendique une cohabitation. François Baroin se voit déjà Premier ministre. C’était déjà le cas avec Sarkozy, puis Fillon. Mais il n’est pas le seul cette fois-ci. Bruno Le Maire, Xavier Bertrand aussi. Et pourquoi pas Nathalie Kosciusko-Morizet si Macron veut une femme ? Laurence Parisot, l’ancienne patronne du Medef, se pousse bien du col !
Mais tous ceux-là sautent une étape. Celle de la cohabitation et du parti Les Républicains. Leurs ralliements sont individuels. Ils se feraient dans le cadre d’une coalition qui rassemblerait le centre-droit et le centre-gauche. Une sorte d’ouverture à l’envers.
Le rêve des élites européistes depuis trente ans !
Et puis, il y a Laurent Wauquiez. Lui ne se voit pas en Premier ministre de Macron mais en chef de parti de l’opposition. Un classique. Comme Chirac avec Mitterrand. Comme Sarkozy avec Hollande. Trop classique. Les partis traditionnels sont morts, car l’immense classe moyenne à laquelle ils s’adressaient (les fameux « deux Français sur trois » de Giscard) a disparu. Désintégrés par la mondialisation. Eparpillés façon puzzle.
C’est la grande leçon de cette élection que Wauquiez n’a pas voulu tirer. Nicolas Dupont-Aignan l’a fait pour lui. Avant lui. Mieux que lui. En se ralliant à Marine Le Pen, le leader de Debout la France a osé ce qu’aucun leader de droite n’avait osé depuis trente ans. Ni Chirac, ni Séguin, ni Sarkozy. Il a osé ce que Mitterrand avait fait en 1972 en pactisant avec un Parti communiste alors dominant à gauche. L’objectif mitterrandien était double : donner une issue politique à l’électorat populaire enfermé dans le ghetto communiste par l’alliance avec les classes moyennes ; les habituer à voter socialiste pour plumer la volaille communiste. Les deux objectifs ont été remplis et ont permis à Mitterrand d’entrer à l’Elysée en 1981. En obtenant la mise au frigidaire de la sortie de l’euro, Nicolas Dupont-Aignan a peut-être déclenché la grande transhumance de l’électorat de Fillon vers celui de Marine Le Pen. Le gros des électeurs des Républicains est en effet d’accord avec le Front national sur l’immigration, l’islam et la laïcité. Seules les questions économiques et monétaires le retiennent encore de franchir le Rubicon. Alors, la coupure – lancinante depuis des années – entre une base (de plus en plus) à droite et des chefs (de plus en plus) au centre deviendrait irrémédiable séparation. Et le parti des Républicains serait transformé en groupuscule.
Chacun des élus de droite devrait se recaser en fonction de ses convictions et de ses intérêts : les uns rejoignant les socialistes chez Macron ; les autres demandant l’asile politique à Dupont-Aignan. C’est pour cette raison sans doute que les insultes les plus violentes contre ce dernier sont venues de ses anciens amis de droite, les uns le comparant à Laval, les autres à Pétain. Comme s’ils lui en voulaient et s’en voulaient d’avoir fait ce qu’ils n’avaient jamais osé faire.
Il a osé ce que Mitterrand avait fait en 1972 en pactisant avec un Parti communiste alors dominant à gauche