ALAIN MINC “JE VOTERAI MACRON !”
Déjà en 1995, Minc votait Balladur, Tillinac votait Chirac. à tenir face au second tour et, surtout, la reconstruction de la droite…
Le Figaro Magazine – Beaucoup, à droite, envisagent l’abstention. Qu’en pensez-vous ? Alain Minc – Cela me choque. De la présidentielle de 2002 aux élections régionales de 2015, la gauche a toujours voté pour la droite contre Le Pen. J’aimerais qu’il en aille de même cette fois-ci. Malgré les déclarations très claires de François Fillon, d’Alain Juppé et de Nicolas Sarkozy, il y a beaucoup de positions dissidentes, beaucoup de finasseries. C’est le cas de Laurent Wauquiez et de quelques autres, et je le regrette.
Ne demande-t-on pas à la droite un front républicain qui, jadis, n’a jamais été exigé de la gauche à l’égard du parti communiste ? Alain Minc – Ce parallèle est une ineptie ! Le risque que le PC accède au pouvoir sur le dos du PS n’existait pas. La guerre froide avait du bon, et le PC en Europe de l’Ouest avait un rôle de bon second, pas de force motrice. Aujourd’hui, la question est bien de savoir si Marine Le Pen va prendre le pouvoir dans notre pays. Denis Tillinac – Ce risque n’existe pas, car Marine Le Pen ne gagnera pas cette présidentielle. C’est pour cette raison que l’abstention est la seule position possible pour la droite. Elle a dénigré deux mois durant « Emmanuel Hollande », et maintenant il faudrait appeler à voter « François Macron » ? Soyons conséquents. Les institutions de la Ve République supposent que le Président élu dégage une majorité lors des élections législatives qui suivent. Voter Macron, c’est rejoindre par anticipation la majorité présidentielle qu’il envisage. Ceux qui voteront pour lui devront en juin lui donner une majorité au Parlement s’ils respectent la logique des institutions. Macron aura alors la possibilité de créer un nouveau pôle social-libéral, en gros de Gérard Collomb à Nathalie KosciuskoMorizet. Je ne peux me résoudre à l’idée de me rallier à ce « progressisme » revendiqué par Macron, qui ramasse la mise contre la logique des cinq dernières années. Je veux au moins conserver une possibilité de reconstruction de mon camp après les législatives, en m’abstenant.
Alain Minc – Je vois dans votre jusqu’auboutisme une des conséquences de « l’effet Trocadéro ». Le rassemblement de soutien à François Fillon au Trocadéro a libéré l’inconscient ultraconservateur d’une fraction de la droite, et cela a contribué à la radicaliser. Je n’ai toujours pas compris pourquoi François Fillon, tout comme Nicolas Sarkozy pendant la primaire, n’a pas pris en compte les électeurs modérés dans son camp. J’ai soutenu Nicolas Sarkozy en 2007 parce qu’il parlait de liberté, d’Europe, et pas seulement d’identité.
Denis Tillinac – Sens commun a donné à la droite la part d’idéalisme sans laquelle son libéralisme n’est guère mobilisateur. Le défi pour la droite n’est pas de capter l’électorat centriste, mais d’arrêter la progression du Front national. Si le mouvement Les Républicains ne s’oppose pas à Macron tout de suite, il sera absorbé par le FN dans les cinq ans qui viennent. C’est