GRANDE BRETAGNE
★★ BRETAGNE, L’HISTOIRE CONFISQUÉE, de Frédéric Morvan, Le Cherche Midi, 288 p., 22 €.
Ne pas se fier au titre, inutilement polémique. Dans son essai qui embrasse généreusement toute l’histoire (et la géographie) de la Bretagne depuis une bonne quinzaine de siècles, Frédéric Morvan n’insiste que modérément sur cette idée de « confiscation » claironnée sur la couverture herminée du livre. Que les Français connaissent mal les saints britanniques qui fondèrent la Bretagne, les moines celtes qui y répandirent la bonne parole chrétienne, les barons qui défendirent son identité et ses frontières, les souverains (Pierre de Dreux, Charles de Blois, Anne de Bretagne…) qui la dirigèrent, les figures héroïques qui écrivirent son histoire au péril de leur vie (Jeanne de Belleville, Georges Cadoudal…) ou sa manière de résister à la modernité béate puis de s’en accommoder sans renier ses racines, soit. Mais le temps de Bécassine (comme celui de l’Armée révolutionnaire bretonne) est bien révolu et nul ne songe, à Paris ou ailleurs, à douter de la spécificité et de la grandeur discrète de cette région dans la France d’aujourd’hui. Ni sa capacité à renouer, parfois, avec sa tradition contestataire, comme en a témoigné naguère l’épisode des Bonnets rouges. Même s’il est exagéré de ne voir là que le symbole contemporain de l’éternel combat local antijacobin et anticentralisateur : à ce qu’on sache, de Nicolas Fouquet à Jean-Yves Le Drian en passant par Chateaubriand, le général Boulanger, Aristide Briand et Waldeck-Rousseau, la Bretagne n’a jamais été avare en figures politiques… françaises. Et fières de l’être. JEAN-CHRISTOPHE BUISSON