BERNARD CAZENEUVE
S’il a été le Premier ministre le plus éphémère de la Ve République, Bernard Cazeneuve a aussi été témoin de l’aventure politique la plus extraordinaire : l’élection d’Emmanuel Macron. Dans son livre (Chaque jour compte. 150 jours sous tension à Matignon, chez Stock), il raconte, à sa manière, précise, détachée, drôle, le quotidien d’un chef de gouvernement en période électorale inédite. Mais le plus savoureux dans ce récit, ce sont les éléments de portraits qu’il dresse de ces hommes et femmes politiques qu’il a côtoyés. Ségolène Royal, « solitaire dans le succès » qui lui explique qu’elle ne peut avoir tort « puisqu’elle avait failli être présidente de la République et qu’elle aurait pu légitimement se trouver à ma place ». Gérard Collomb, « qui est parvenu à incarner la modernité dans sa ville sans jamais s’interdire les recettes les plus éprouvées de la vieille politique ». Mais c’est à Emmanuel Macron que l’auteur réserve ses piques les plus acérées. Bernard Cazeneuve n’oublie pas qu’il a été secrétaire général adjoint de l’Elysée puis ministre de l’Economie. « Sur les cinq années du quinquennat il a donc été en responsabilité pendant plus de quatre ans. Ce qui caractérise la transgression, c’est qu’elle autorise tout, notamment ce qui est inconcevable. »
On sent l’amertume de celui qui l’avait recueilli Place Beauvau le soir de sa nomination au gouvernement et lui avait conseillé : « Méfie-toi du reflet de ton image et n’oublie jamais qui t’a nommé. » Conseils que Macron s’est empressé de ne pas suivre… C. M.