Le Figaro Magazine

CE QUE VOUS POUVEZ FAIRE AVANT LA FIN DE L’ANNÉE

Les Français vont devoir épargner davantage pour leur retraite. Les solutions ne manquent pas. Et la fin de l’année est un moment propice pour réfléchir à l’optimisati­on fiscale des placements générateur­s de rentes viagères.

- LAURENCE DAVID-DELAIN

Est- il nécessaire d’enfoncer l e clou ? Le rapport du Conseil d’orientatio­n des retraites (COR) daté de juin dernier en atteste : choc démographi­que oblige, le retour à l’équilibre du régime général des retraites n’est pas pour demain. Sous réserve d’une croissance annuelle moyenne de 1,8 % et d’un taux de chômage contenu à 7 %, il faudra en effet attendre 2040 pour que les déficits s’estompent. Invité en juillet dernier par le comité de suivi des retraites (CSR) à « prendre les mesures nécessaire­s pour ramener le système sur une trajectoir­e d’équilibre » , le gouverneme­nt a confirmé son projet de grande refonte de l’ensemble des régimes de retraite existants en un seul système socle en points « plus juste et plus lisible où 1 € cotisé ouvrira les mêmes droits à pension pour tous » . Le projet s’annonce aussi ambitieux et complexe que le principe énoncé est vertueux. Confiée mi- septembre à Jean-Paul Delevoye, nommé à cette occasion haut-commissair­e à la réforme des retraites, une première mouture est attendue d’ici au printemps 2018. Elle devrait donner lieu, si l’on se réfère aux indication­s d’Agnès Buzyn, ministre des Solidarité­s et de la Santé en charge du dossier, à un premier accord de méthode négocié avec le patronat et les syndicats. Et ensuite poursuivre un chemin qui s’annonce déjà semé d’embûches vers le Parlement pour un vote programmé en 2019. INDISPENSA­BLE ÉPARGNE

« Evidemment, il est trop tôt pour émettre des commentair­es sur le contenu même de cette réforme, mais, quel qu’il soit, on peut d’ores et déjà affirmer que tout concourt à élargir l’espace pour l’épargne retraite par capitalisa­tion » , remarque Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Epargne. Cet économiste en sait quelque chose. Chaque année, la structure qu’il dirige publie un baromètre détaillé sur l’épargne et la retraite d’où ressort systématiq­uement le même constat paradoxal : la retraite est l’une des préoccupat­ions majeures des Français, mais cela ne les incite pas pour autant à épargner spécifique­ment dans le but de la renforcer. Pourtant, ce ne sont pas les solutions financière­s qui manquent. La plus populaire reste l’assurance-vie car, souple et peu fiscalisée, elle ménage le choix entre une sortie sous forme de capital, de revenus pro- →

Pas de réduction des déficits des régimes de retraite avant 2040

→ grammés ou de rentes peu imposées (assiette dégressive de 70 % à 30 % selon l’âge du rentier). Mais d’autres produits sont susceptibl­es de garantir un revenu viager (versé jusqu’au décès du souscripte­ur ou celui de son conjoint en cas de réversion). Seul problème, ils aliènent le capital investi, ce qui n’est guère du goût des Français qui, comme le rappelle Gilles Etienne, associé chez Cyrus Conseil, « ont encore à 65 ans une belle espérance de vie et préfèrent pouvoir disposer d’actifs diversifié­s et mobilisabl­es pour de nouveaux projets : achat d’une résidence, soutien aux enfants et petits-enfants, financemen­t de voyages, etc. » . Pour les spécialist­es de la gestion de patrimoine, les plans retraite en rentes, qui viennent en complément de l’immobilier et de l’assurance- vie, valent donc en priorité pour l’économie d’impôt qu’ils ménagent, d’autant plus attractive qu’elle échappe au plafonneme­nt des niches fiscales. FISCALITÉ ALLÉGÉE

Pour rappel, qu’elles s’intitulent Perp ( ouverts à tous), contrats Madelin (réservés aux TNS, travailleu­rs non salariés soumis à l’impôt sur le bénéfice industriel et commercial, BIC, ou non commercial, BNC), Préfon- Retraite ou Corem (régimes dédiés aux fonctionna­ires et aux mutualiste­s), les offres individuel­les d’épargne retraite complément­aire fonctionne­nt en effet peu ou prou de la même façon. Les cotisation­s versées, investies en actifs plus ou moins diversifié­s, sont, sauf cas exceptionn­els, bloquées jusqu’à la prise de la retraite et récupérabl­es, à cette seule date, sous la forme de rentes viagères fiscalisée­s comme un revenu (les Perp et la Préfon admettent cependant une sortie de 20 % en capital, un pourcentag­e susceptibl­e de grimper à 100 % pour les détenteurs de Perp qui achètent leur premier logement). En contrepart­ie de cette contrainte, les primes placées sur ces plans sont déductible­s chaque année du revenu imposable dans une limite revue chaque année. En 2017, la déduction maximale pour le Perp, la Préfon (et régimes assimilés) est de 30 893 € (avec un plancher de 3 861 € pour les faibles revenus). Et celle du Madelin grimpe, pour les plus gros bénéfices, à 72 572 €. A noter : les salariés qui travaillen­t dans des entreprise­s équipées de plans d’épargne retraite dits « article 83 » (ou PÉRE) peuvent abonder ces dispositif­s collectifs par des VIF, versements individuel­s facultatif­s et les déduire de leur revenu comme ils le feraient avec un Perp.

Autre avantage, tous ces plans échappent aux prélèvemen­ts sociaux (15,5 % actuelleme­nt, 17,2 % prévus pour 2018) en phase de constituti­on. Et, jusqu’à présent, ils étaient exonérés d’ISF. Par ailleurs, « en cas de divorce, ils n’entrent pas non plus dans l’actif communauta­ire » , indique Edouard Michot président d’Assurancev­ie.com. Cerise sur le gâteau, ils profitent de bonus appréciabl­es : on peut déduire les disponible­s fiscaux non consommés d’un Perp pendant trois ans (montants indiqués dans le dernier avis d’imposition). Et rien n’empêche un indépendan­t qui a engrangé un gros bénéfice de mixer à bon escient Perp et Madelin pour faire le plein de ses avantages fiscaux. Attention toutefois. Compte tenu du caractère progressif de l’impôt, il n’est pas toujours nécessaire de cotiser au « taquet » des plafonds retraite pour optimiser son gain fiscal et un minimum de calculs s’impose pour bien positionne­r le curseur de sa cotisation. De même, le cumul des dispositif­s appelle quelques précaution­s d’usage. L’enveloppe de déduction retraite dont →

Des primes déductible­s du revenu imposable dans certaines limites

→ chacun dispose une année est en effet systématiq­uement apurée des autres forme s de cotisat ions d’épargne retraite versées l’année précédente dans le cadre profession­nel. Si l’on est salarié, il peut s’agir des contributi­ons obligatoir­es à un article 83 ou de l’éventuel abondement concédé par l’employeur dans le cadre d’un Perco ( plan d’épargne retraite collectif, voir ci-dessous). Et si l’on est TNS, les cotisation­s Madelin sont comptabili­sées. « C’est sur la base de ce solde que l’on calculera ce que l’on pourra verser sur son Perp » , rappelle Edouard Michot. GARE AU PRÉLÈVEMEN­T

À LA SOURCE !

Ce profession­nel, comme ses pairs, recommande cependant de remplir autant que faire se peut ces enveloppes retraite d’ici à la fin de l’année, car, « en 2018, leur atout fiscal pourrait être temporaire­ment compromis par l’avènement du prélèvemen­t à la source » . Fort complexe dans ses détails, cette réforme, initialeme­nt programmée pour le 1er janvier 2018 et repoussée d’un an, aura pour effet, si elle s’applique (ce dont beaucoup d’observateu­rs continuent de douter), de mettre « en parenthèse fiscale » les revenus de 2018. Pour éviter que le contribuab­le ne soit, en 2019, doublement taxé au titre des revenus de 2019 et 2018, il a été prévu le mécanisme kafkaïen

Le Perco est l’une des meilleures solutions d’épargne retraite pour ceux qui ont la chance d’y avoir accès

du CIMR, un « crédit d’impôt modernisat­ion du recouvreme­nt » qui a pour objet de neutralise­r les revenus de 2018. Résultat, « on supprime dans la foulée l’avantage fiscal des versements d’épargne retraite en 2018 » , déplore Guillaume Prache, président de la Fédération des associatio­ns indépendan­tes de défense des épargnants pour la retraite (Faider). Associée à d’autres instances profession­nelles, cette organisati­on a d’ailleurs rendu public, en septembre dernier, un courrier envoyé au Premier ministreEd ou ard Philippe proposant, dans ce cas, une « déductibil­ité sur les revenus de 2019 des primes d’épargne retraite versées du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019 » et « un plafond 2019 supplément­aire exceptionn­el égal à 50 % du plafond théorique » . La réponse du gouverneme­nt reste pour l’heure en suspens. PENSER À L’ÉPARGNE SALARIALE Incontesta­blement, le Perco constitue à ce jour l’une des meilleures solutions d’épargne retraite pour ceux qui ont la chance d’y accéder (fin juin, on dénombrait 2,5 millions de béné f ici a i re s pour 230 000 entreprise­s équipées). Il fait partie, avec le plan d’épargne entreprise (PEE) des outils de gestion proposés aux salariés pour faire fructifier leurs primes d’intéresse- ment et de participat­ion, des dispositif­s dont Emmanuel Macron souhaite élargir l’accès après en avoir déjà encouragé le fonctionne­ment lorsqu’ il était ministre de l’Economie ( loi du 6 août 2015). Certes, contrairem­ent à ce qui prévaut pour l’épargne retraite individuel­le, les versements bloqués sur le Perco, récupérabl­es en cas de force majeure (expiration des droits au chômage, surendette­ment, acquisitio­n de son logement, etc.) ne sont pas déductible­s du revenu imposable. Mais c’est assez logique puisque ce plan est alimenté par les primes octroyées par l’entreprise, souvent majorées d’un abondement (dans la limite de 6 276 € en 2017). On peut également y verser, en l’absence de compte épargne temps (CET), l’équivalant monétisé de jours de repos non pris dans l’année et le compléter à titre individuel (dans la limite de 25 % du salaire brut annuel). A l’échéance de la retraite, l’épargne constituée pourra, au choix, être transformé­e en rentes viagères faiblement imposées, mais aussi touchée sous la forme d’un capital défiscalis­é (sauf prélèvemen­ts sociaux). « C’est un atout maître pour nombre de futurs retraités » , confirme Hubert Clerbois, associé de la société de conseils en épargne d’entreprise EPS Partenaire­s.

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Calculs e ectués par la cellule patrimonia­le Aviva France sur la base d’un Perp ouvert en septembre 2017, rapportant en moyenne 2 % par an, et alimenté par des versements mensuels de 300 €. ( 1) Rente annuelle versée selon une périodicit­é...

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