Expo : météorites, des morceaux d’histoire tombés du ciel
Scientifique, historique et artistique, une exposition fascinante raconte, au Muséum national d’histoire naturelle de Paris, le parcours extraordinaire de ces cailloux extraterrestres.
Matthieu Gounelle, commissaire scientifique de l’exposition « Météorites. Entre ciel et Terre », ne peut s’empêcher d’esquisser un sourire quand la question fatidique arrive : une météorite détruira-t-elle un jour la surface de la Terre ? Pédagogue patient, qui part chaque année dans le désert d’Atacama ramasser des météorites, il a pour habitude d’y répondre à chaque interview, à chaque conférence, au déjeuner ou au dîner. « La probabilité d’un événement catastrophique à l’échelle de la planète est de l’ordre de plusieurs millions d’années pour un objet mesurant 100 mètres de diamètre », rassure-t-il. Mais honnête, il ajoute : « S’il existe aujourd’hui des programmes internationaux de détection et de surveillance des astéroïdes menaçants, on ne connaît pas de moyens véritablement efficaces pour se protéger des impacts météoritiques. »
Dans la Grande Galerie de l’évolution du Muséum national d’histoire naturelle, des squelettes de dinosaures sont là pour rappeler que l’impensable est probable à l’échelle de l’histoire de la planète. Il y a 66 millions d’années, la météorite de Chicxulub, roche extraterrestre de 10 kilomètres, a profondément perturbé l’environnement et le climat et contribué à l’extinction des archosaures et de plus de la moitié des espèces sur Terre. Un drame, mais aussi une chance : l’extinction des dinosaures a favorisé le développement des mammifères, des hominidés et… d’Homo sapiens.
Cet épisode, présenté parmi beaucoup d’autres dans la machine à remonter le temps de l’exposition, rappelle que l’histoire de la Terre ne peut pas s’écrire sans les météorites. Cela passe par de multiples anecdotes et des expériences que le visiteur peut faire, en touchant, reniflant ou jouant avec ces roches venues d’ailleurs. La collection du Muséum, débutée il y a deux cents ans, est l’une des plus complètes au monde avec quelque 4 000 spécimens issus de 1 500 météorites différentes. Certai-
nes proviennent de l’origine de notre système solaire, d’autres de Mars ou de la Lune. Chacune a son histoire, à commencer par les météorites composées de fer métallique, corps n’existant pratiquement pas à l’état naturel sur la Terre. Avant l’invention de la métallurgie, seul le fer météoritique permettait de fabriquer des armes et des bijoux. Toutânkhamon, le célèbre pharaon d’Egypte, a ainsi été inhumé avec une dague dont la lame était de fer météoritique et le pommeau de cristal de roche. Et en Asie, on prête encoreàdes poignards sacrés, en fer extraterrestre, des pouvoirs surnaturels. L’exposition du Muséum est d’autant plus passionnante qu’elle ne se limite pas à une présentation scientifique. « La représentation historique et artistique des météorites fait partie de notre relation avec elles », défend Matthieu Gounelle. Quant au futur, il est riche de questions. La peur d’une apocalypse extraterrestre, bien sûr, mais aussi les interrogations concernant les origines de la vie. Un de ces cailloux venus d’ailleurs aurait-il pu transporter la matière organique nécessaire à l’apparition du vivant ?
CHRISTOPHE DORÉ « Météorites. Entre ciel et Terre », Muséum national d’histoire naturelle, Jardin des Plantes, jusqu’au 10 juin 2018.