Dans la tête de... Pierre Hermé
Une adresse à la dimension du meilleur pâtissier au monde… Au 86 des Champs-Elysées, Pierre Hermé inaugure, avec la marque de cosmétiques L’Occitane, un concept store d’un genre nouveau. Sur 1 000 m2 mis en scène par l’architecte Laura Gonzalez se dévoilent les dernières créations de deux univers unis par un même désir de partager leur savoir-faire et d’inviter chaque client à découvrir leurs produits avec une approche différente. Un mot d’ordre : prendre le temps d’échanger, d’assister à des préparations minute, de s’attarder au coin barista, de déguster plats salés, gâteaux à boire, desserts exclusifs, cafés et thés… sur la plus belle des avenues.
Associer la pâtisserie et les produits cosmétiques peut surprendre. Mariage de raison ou coup de foudre ?
C’est avant tout l’histoire d’une rencontre entre Olivier Baussan, le fondateur de L’Occitane, puis avec Reinold et Adrien Geiger, les actuels propriétaires avec lesquels l’idée de ce concept s’est concrétisée. Nous partageons une même passion pour les ingrédients de qualité, pour leur provenance, pour les textures et les associations créatives… Le mariage cédrat et verveine de L’Occitane me parle comme le travail de la rose ou de l’immortelle.
Investir les Champs-Elysées est un projet ambitieux…
C’est un très gros projet. Notre ambition est de proposer une expérience inédite, du petit déjeuner au dîner. La clientèle est assez large, de passage et locale. D’après le comité des Champs-Elysées, il y a 60 % de Français et 40 % d’étrangers qui passent sur cette avenue.
Le maître en pâtisserie n’a pas de limites. Et le chef d’entreprise ?
J’ai créé une entreprise pour pouvoir exercer mon métier comme j’ai envie. Cela reste d’actualité.
Quel chef d’entreprise admirezvous ?
Steve Jobs. Il a sû rendre indispensables des objets dont nous ignorions le besoin.
Quelles qualités vous ont aidé à construire votre succès ?
Ce que Gaston Lenôtre m’a appris me sert encore. Et, puis, pour moi, le plus important reste le travail sur l’architecture du goût : arriver à se projeter dans des scénarios de goût capables de toucher les gens, de leur faire plaisir.
Une recette à partager pour réussir ?
Aller au bout des choses. Quand j’imagine la tarte infiniment noisette, je fais un tour d’horizon à 360 ° du goût de la noisette en cherchant à le sublimer. J’impose un point de vue très personnel qui me semble plutôt partagé.
Dans quel pays émerge la pâtisserie du futur ?
La pâtisserie française, qui utilise beaucoup de techniques, garde une suprématie. Ce savoir-faire est recherché et répandu. Mais beaucoup de pâtisseries sont intéressantes. J’ai par exemple découvert le goût de la rose dans la cuisine et la pâtisserie bulgares, et récemment, aux Etats-Unis, des donuts de rêve.
Fier d’être un pâtissier français à l’étranger ?
Nous sommes un peu des ambassadeurs de notre pays. Dans ce métier, être français c’est aussi transmettre un savoir-faire et un savoir-être.
Un jeune talent à mettre en lumière ?
Dans nos métiers d’artisanat, c’est un devoir de partager et de transmettre. J’ai une affection particulière pour Claire Damon, j’aime le travail de Cédric Grolet, le style très personnel de Christophe Michalak.
Que vous inspire la pâtisserie sans gluten ?
70 % de nos ventes sont sans gluten : c’est le macaron ! Plus sérieusement, je travaille sur toutes les demandes actuelles en conservant à l’esprit la gourmandise et le plaisir. C’est essentiel.
Un coup de gueule ?
La mode du sel dans les pâtisseries. Il est souvent présent de façon uniforme alors qu’il devrait s’exprimer comme une ponctuation. Et l’usage du fumé que je préfère appliqué au saumon qu’à la vanille.
A un repas imaginaire, vous conviez ?
Bernar Venet, Makoto Azuma, le dalaïlama, Léonard de Vinci, Steve Jobs…
Un lieu où se ressourcer ?
Bonifaccio, ma femme Valérie est corse. J’y aime les gens, les paysages, l’immortelle, la népita, le miel du maquis, la charcuterie…
Un restaurant où la carte des desserts vous emballe ?
Chez Hélène Darroze. J’aurais voulu inventer son dessert à la truffe blanche. L’un des meilleurs que je connaisse.
Un voeu pour 2018 ?
J’aimerais qu’à l’occasion des 20 ans de la maison, le projet du « 86 » soit un succès.