Le Figaro Magazine

La page d’histoire de Jean Sévillia

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En mai 1945, c’est lui que de Gaulle avait désigné pour participer à la signature de l’acte de capitulati­on du IIIe Reich. C’était rendre hommage à ses qualités militaires, bien que Jean de Lattre de Tassigny ne fût pas un gaulliste de la première heure. C’est à ce chef de guerre et à sa carrière auxquels s’intéresse Ivan Cadeau, un officier du service historique de la Défense, dans une étude rigoureuse.

Lieutenant de dragons en 1914, de Lattre termine la guerre comme capitaine d’infanterie, avec quatre blessures et huit citations. En 1925, il se distingue dans la guerre du Rif puis, sorti major de sa promotion à l’Ecole de guerre, intègre l’état-major de Weygand. En 1940, le jeune général dirige une des rares divisions qui se battront jusqu’au bout. Après l’armistice, il épouse la cause de la Révolution nationale mais, après un commandeme­nt en Tunisie, puis à Montpellie­r, s’insurge, en 1942, lors de l’invasion de la zone libre. Condamné à dix ans de prison pour insubordin­ation, de Lattre s’évade de Riom et rejoint Londres, fin 1943, avant de passer à Alger où Giraud lui confie le commandeme­nt de l’armée B, la future Ire armée française. Après avoir pris l’île d’Elbe, en juin 1944, il débarque en Provence le 16 août, libère Toulon et Marseille, puis la vallée du Rhône et le Jura. Admirable campagne de France qui prélude à l’héroïque campagne d’Alsace, avant la campagne d’Allemagne qui mènera la Ire armée sur le Danube et au Tyrol. Après le commandeme­nt en chef de l’armée française qui occupe l’Allemagne, il reçoit le commandeme­nt des forces de l’Otan, en 1949, puis le haut-commissari­at en Indochine en 1950. Là, « le roi Jean » ranime l’ardeur d’un corps expédition­naire éprouvé par le désastre de Cao Bang, et s’attache à mettre sur pied des troupes vietnamien­nes aptes à contrer le Vietminh. Frappé par la perte au combat de son fils, miné par un cancer, il rentre en métropole pour mourir. La veille de ses grandioses funéraille­s, en janvier 1952, de Lattre est élevé à titre posthume à la dignité de maréchal de France. Ivan Cadeau souligne son autorité naturelle, qu’appuyait un goût du faste et de l’apparat qui fut beaucoup critiqué. Coléreux, brutal et parfois égocentriq­ue, de Lattre se brouilla avec Juin, eut des rapports orageux avec Leclerc et manifesta du dédain envers Koenig. Il n’en fut pas moins une des gloires de la France. De Lattre, d’Ivan Cadeau, Perrin, 326 p. 22 €.

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