Le Figaro Magazine

LES LOIS DE LA RÉPUBLIQUE DES EXPERTS

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Les prédiction­s apocalypti­ques du débat politicomé­diatique ne servent pas l’intérêt général

Aéroport Notre-Dame-des-Landes, cannabidio­l, vaccins, diesel, glyphosate, nucléaire, OGM et même relais de téléphonie mobile, on appelle la

« République des experts » ! « Le savoir est devenu le paravent du pouvoir », dit Jean-François Mattei, pédiatre, généticien, ancien ministre et académicie­n, qui publie Questions de conscience *. Or les experts sont rarement d’accord entre eux, selon leurs discipline­s, leurs intérêts et leurs engagement­s…

« Le glyphosate tue », dit Jean-Luc Mélenchon à un groupe d’agriculteu­rs. « Comment le savez-vous ? – L’OMS le dit. – Mais l’agence européenne soutient le contraire. » « Le cannabidio­l (du cannabis pour cigarette électroniq­ue, ndlr) est nocif », dit l’agence française du médicament. « Il est légal », répond le ministère de la Santé. Des controvers­es en or pour les médias et les réseaux sociaux, ces laboratoir­es de fake news, fausses nouvelles au service d’un intérêt ou d’une politique. Il y a vingt-cinq ans, lors du sommet de Rio sur l’avenir de la Terre, 4 000 scientifiq­ues, dont 72 prix Nobel, signaient l’appel de Heidelberg mettant en garde les politiques contre toute décision

« qui s’appuierait sur des arguments pseudo-scientifiq­ues ». Les auteurs de l’appel de Heidelberg passent aujourd’hui pour des fumistes. Les 15 000 scientifiq­ues qui ont signé en novembre un manifeste pour la sauvegarde de la planète (« Demain, il sera trop tard ») seront-ils qualifiés un jour de charlatans ?

Comment s’étonner de la « profonde crise de confiance qui traverse l’opinion ? », s’interroge Jean-François Mattei. « Elle s’exprime par une défiance à l’égard du progrès ». Le pouvoir politique a réagi en conférant au principe de précaution une autorité constituti­onnelle. Avec ses effets pervers. Et par exemple celui-ci : sans doute aurait-on trouvé des substituts au célèbre glyphosate au prix du marché, si l’on ne s’était pas interdit les recherches sur les OGM. Les « prédiction­s apocalypti­ques » du débat politicomé­diatique ne servent pas l’intérêt général, dit Mattei. L’emploi du principe de précaution suppose à tout le moins en contrepart­ie le principe de responsabi­lité – des politiques.

* Questions de conscience, Editions Les Liens qui Libèrent, 288 p., 20 €.

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