L’affiche/Les passe-temps d’Eric Neuhoff
Que de chemin parcouru depuis ses débuts au Cours Florent ! Tout semble sourire à la talentueuse Bordelaise de 26 ans. Après avoir enfilé les costumes les plus variés pour des cinéastes aussi divers que Christian Carion, Paul Verhoeven ou Julien Rappeneau, l’actrice s’est illustrée dans Espèces menacées, de Gilles Bourdos : sa prestation face à Vincent Rottiers lui vaut une présélection dans la catégorie du meilleur espoir féminin aux prochains César. Et, comme la fonceuse n’est pas du genre à se reposer sur ses lauriers, elle a poursuivi sa course avec La Surface de réparation (en salles le 17 janvier), où elle apparaît en « croqueuse » de footballeurs au côté de Franck Gastambide. Quand sortira le film de Christophe Regin, la sportive aura probablement rejoint d’autres plateaux : celui du Mystère Henri Pick de Rémi Bezançon, face à Fabrice Luchini, ou celui de Mademoiselle de Joncquières,
une adaptation de Jacques le Fataliste signée Emmanuel Mouret, auprès d’Edouard Baer et Cécile de France. Rien ne semble l’arrêter.
PIERRE DE BOISHUE
EXPO
TOTEMS ET TABOUS
Une armée de statuettes accueille le visiteur. Toutes différentes. Chacune représente un ancêtre dont elle garde les reliques. Chance, fécondité, richesse ou succès à la chasse dépendaient de cette surveillance. L’exposition
« Les Forêts natales » * décrypte l’usage de ces figures de reliquaires et des masques dans les sociétés issues des migrations bantoues au coeur de l’Afrique équatoriale atlantique. L’initiation est fascinante, la richesse créative époustouflante. Têtes fangs dont le bois exsude étrangement, masques hallucinants, regards luisant dans l’obscurité, stylisation poussée à l’extrême expliquent les pouvoirs prêtés à ces objets. Les Kotas utilisaient des lamelles de cuivre-laiton, mêlant habilement sculpture sur bois et travail du métal. Au début du XXe siècle, ces oeuvres vont influencer Derain et Matisse (même si Vlaminck se vante d’avoir initié ses pairs à « l’art nègre ») et Picasso accrochera dans son atelier un masque punu. D’où ce petit air de famille avec Les Demoiselles d’Avignon ! Un superbe catalogue richement illustré (Actes Sud) complète cette exposition : essentiel pour en saisir toutes les subtilités.
SYLVIE MARCOVITCH
* Musée du Quai BranlyJacques Chirac, Paris VIIe. Jusqu’au 21 janvier. MUSIQUE NEIL YOUNG, LE TENDRE ROC
Bien des artistes de sa génération aimeraient tenir le même rythme que lui. Si le Canadien de 72 ans enchaîne les disques, il y dévoile chaque fois des trésors de créativité. Son nouvel album, The Visitor *, ne déroge pas à la règle. Accompagné du groupe Promise of the Real, il place
ici des ballades du meilleur effet, pas si éloignées de celles qu’il composait dans le passé. Mais aussi des morceaux plus bruts, hélas eux à des années-lumière de ses tubes d’antan. Qu’importe s’il pèche parfois par facilité… et cède à la critique convenue de l’Amérique de Trump ! Légende du folk et mélodiste hors pair, il a encore plusieurs cordes à sa guitare. P. B. * Reprise Records/Warner.
LIVRE
LEMAITRE RESTE LE MAÎTRE
Février 1927. Le banquier le plus puissant de France, Marcel Péricourt, vient de mourir. Le jour de ses obsèques, le Tout-Paris de la finance, de la presse, de l’aristocratie et de la politique se tient devant les grilles de la maison Péricourt. Mais, au moment où doit s’élancer le cortège funéraire, le fils de l’héritière de l’empire, Madeleine, se défenestre et atterrit sur le cercueil de son grand-père. Paul s’en sort par miracle mais demeure paralysé à vie. Orpheline, mère d’un enfant tétraplégique, divorcée d’un mari en prison pour s’être enrichi sur le dos des morts de la Grande Guerre, Madeleine a bien du mal à gérer la fortune familiale. Et peut-elle faire vraiment confiance, dans un monde patriarcal, corrompu et rancunier, à tous ceux qui prétendent l’épauler ? Alex, Robe de mariée… : Pierre Lemaitre est le romancier des vengeances. Suite du phénoménal Au revoir là-haut, ces Couleurs de l’incendie * narrent une implacable revanche féminine. Une épopée littéraire habitée de personnages flamboyants et empreinte d’un suspense dévorant. MARIE ROGATIEN
* Albin Michel, 544 p., 22,90 €.