Le Figaro Magazine

LISBONNE À TOUT FAIRE

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Le plus dépaysant à Lisbonne : la gentilless­e des habitants. Nous voilà tout désarçonné­s. L’habitude s’était perdue. Les chauffeurs de taxi demandent d’où vous venez. Si vous dites Paris, ils parlent en français, s’excusent de leur maladresse linguistiq­ue, vous apprennent que Coimbra est la capitale du Portugal. Les Uber arrivent dans la minute. Le soleil se croit chez lui, même en janvier. Cela permet de déjeuner dehors. Le Tage a des paresses d’océan. Sur l’avenue de la Liberté, l’Eden Teatro est devenu un magasin de prêt-à-porter. Oui, mais le cinéma Idéal projette Visages villages d’Agnès Varda. Il y a des librairies partout. Très peu de scooters : les pavés sont trop glissants. Beaucoup de tags sur les murs, ce qui est un peu déprimant (ah, la saudade, cette mélancolie lusitanien­ne !). On vérifiera ainsi que l’artiste censé sommeiller en chacun de nous n’est pas toujours inspiré. Au bar de l’hôtel, la bibliothèq­ue contient Papillon en édition de l’époque et le poche de

La Chartreuse de Parme avec la préface de Paul Morand. Au zoo, le téléphériq­ue est en panne. Des paons se promènent en liberté. Une douceur plane sur le séjour. Le restaurant Gambrinus a prévu une salle fumeurs. Le bacalhau s’accommode parfaiteme­nt des effluves de nicotine. A la Cevicheria, un poulpe géant pend au plafond. Il est en carton. Les assiettes contiennen­t de vrais fruits de mer. Un barbier à l’ancienne officie à la parfumerie Claus Porto. On ressort de là avec une peau de bébé. La Fondation Gulbenkian ressemble au décor d’un film des années soixante, très Alphaville. A l’extérieur de la ville, le plus grand aquarium d’Europe abrite de paisibles requins, des poissons inconnus, des méduses taciturnes. On se souvient que Michel Déon avait vécu là. Il n’avait pas tort. C’est un bel endroit pour attendre la fin du monde. Et si on dispersait ses cendres place Principe Real ?

Michel Déon avait vécu là. Il n’avait pas tort.

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