Le match : Coordination rurale vs Confédération paysanne
Le Salon de l’agriculture ouvrira ses portes ce week-end jusqu’au 4 mars. L’occasion, pour les syndicats agricoles, de faire entendre leur voix. Avec près de 54 % des suffrages lors des dernières élections aux chambres d’agriculture de 2013, la FNSEA occupe largement le terrain. Mais la Coordination rurale (CR) et la Confédération paysanne, ses deux challengers, ont bien l’intention d’exprimer leurs différences alors que se profile la campagne pour les élections de 2019.
« Depuis les années 1960, la FNSEA a signé un deal avec l’Etat pour transformer les agriculteurs en producteurs de matières premières à bas prix, déplore Bernard Lannes, président de la Coordination rurale, devenu le deuxième syndicat agricole français en 2013.
Que défend la FNSEA : les agriculteurs ou les intérêts de l’industrie agroalimentaire ? »
La CR prône une régulation du marché plus efficace, pour qu’enfin les exploitants retrouvent des revenus plus décents. « La conjoncture est dramatique, martèle Bernard Lannes :
70 % des exploitations sont aujourd’hui dans le rouge ! » Surfant sur le malaise rural, il ambitionne de ravir entre 5 et 10 points à la FNSEA en 2019. Ce qui reléguerait celle-ci en dessous de 50 % des suffrages.
Mais il faudra aussi compter sur la Confédération paysanne, bien connue pour ses coups d’éclat, comme le démontage du McDonald’s de Millau en 1999 (José Bové était à la manoeuvre), ou celui de la salle de traite de la ferme-usine « des 1 000 vaches » en 2014.
« Ces actions font partie de notre ADN, explique Laurent Pinatel, porte-parole du mouvement. Ce qui nous distingue des autres syndicats agricoles, c’est l’importance que nous donnons au volet social. Réclamer davantage de revenus ne suffit pas. Il faut aussi parler de l’emploi, du temps de travail, du stress des paysans que le système actuel conduit à s’endetter dans des proportions déraisonnables. »
Le gouvernement, qui a présenté dernièrement son projet de loi issu des Etats généraux de l’alimentation (EGA), sait qu’il marche sur des oeufs. Emmanuel Macron a beau répéter qu’il souhaite permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail, la colère gronde dans les campagnes où l’on redoute que la hausse du seuil de revente à perte des produits alimentaires et l’encadrement des promotions ne freinent en rien la chute des revenus. Un tiers des agriculteurs gagnent moins de 350 euros par mois (subventions incluses), rappelle une note de l’Institut de recherches économiques et fiscales (Iref, « Libérer les agriculteurs du joug administratif », février 2018). « On va radicaliser nos actions », promet Laurent Pinatel.