Dans la tête de... Claire Griffon
Claire Griffon aurait dû être responsable qualité dans l’agroalimentaire si elle n’avait pas croisé le « roi des fromages » dans une cave à Roquefort. Révélation crémière : la fille d’agriculteurs champenois se lance dans l’aventure frometonne. Epaulée dans sa reconversion par Marie Quatrehomme et Xavier Thuret – meilleurs ouvriers de France –, elle entre en apprentissage chez un autre anobli de l’affinage, Laurent Dubois. En 2012, elle ouvre une boutique chic et sobre, entre les Invalides et la tour Eiffel. Elle y communique sa passion pour les camemberts, salers, reblochons et autres fleurons de l’Hexagone mais propose aussi des recettes venues d’ailleurs (irish porter – cheddar infusé dans de la Guiness –, shropshire…) et ses propres créations : le Damier (biscuits de Reims et roquefort) ou le Cherry Bibi (fourme d’Ambert et griottes). Rencontre fro-magique.
Pourquoi le fromage ?
Parce que rien d’autre. C’est un produit tellement riche géographiquement, historiquement, gustativement, visuellement…
Fromage au lait cru ou pasteurisé ?
Au lait cru, bien entendu ! Le lait cru permet d’avoir plus de goût, de texture et de croûte.
Les qualités qui vous ont permis de réussir ?
Je suis têtue, méthodique, maniaque et tenace. Quand je n’obtiens pas le résultat désiré, je peux recommencer vingt fois. Ma grand-mère disait :
« Claire n’a pas mauvais caractère, elle a du caractère. »
« Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromage ? »
disait le général de Gaulle…
Cette phrase, je l’entends presque tous les jours à la boutique ! Le fromage est très important dans la vie des gens. On est le seul pays à posséder une si grande variété de textures, de terroirs et de saveurs. C’est cela, la France : un grand bazar constitué d’éléments différents et parfois contradictoires mais qui finissent par très bien marcher ensemble. Comment reconnaître un bon fromage ?
A l’oeil, tout de suite ! La croûte permet de voir s’il a des défauts (d’humidité, de flore…). Et il y a la taille : (un valençay doit faire environ 12 centimètres de hauteur.
S’il en fait 6, je ne le goûte même pas). Pourquoi vous être battue pour obtenir la reconnaissance du statut d’artisan crémier-fromager ?
Nous étions un des rares métiers de bouche à ne pas être reconnu comme artisan. Ce statut permet la protection de notre profession, la reconnaissance de notre savoir-faire et la création d’un CAP crémierfromager. Nous ne sommes pas des revendeurs, nous transformons le produit avec des gestes et des soins particuliers.
Les convives d’un dîner idéal ?
Coco Chanel, Vanessa Paradis, Etienne Daho, mon mari et soeur Emmanuelle. Je leur servirais des escargots, une poule au riz préparée par ma mère, du fromage, bien sûr, et une tarte toute simple : pâte feuilletée, fond de chantilly, fraises saupoudrées de sucre glace. Nous boirions du champagne de l’apéritif au dessert. Ce ne serait pas très équilibré, mais délicieux.
Un lieu où vous aimez vous ressourcer ?
A l’île d’Yeu, en Grèce et en Champagne, chez mes parents. J’adore y regarder la plaine, les gens ont tort de dire que c’est ennuyeux : il y a des milliers de couleurs différentes qui changent selon la météo. C’est reposant, on laisse libre cours aux pensées et aucun élément ne vient les perturber.
Un film à voir et à revoir ?
Tous les Louis de Funès et Le Grand Bleu : je suis même allée sur les lieux du tournage.
Une musique à écouter en boucle ?
Etienne Daho, Vanessa Paradis, The Velvet Underground, The Divine Comedy, OMD.
Les applis dont vous vous servez le plus dans votre smartphone ?
Météo France, Le Figaro, Europe 1. La météo est très importante dans notre métier : le climat influe beaucoup sur le produit.
Qu’est ce qui vous tire des larmes ?
Les oignons.
Que transmettrez-vous à vos enfants ?
Le savoir-vivre.
Votre devise ?
Soyons légers et positifs. Aujourd’hui, on ne met pas assez les réussites en avant.
Que direz-vous au Bon Dieu en arrivant ?
« Je suis contente de vous rencontrer. On y va ? »