L’apostrophe de Jean-Christophe Buisson/Ecrans
CHER JEAN-LUC MÉLENCHON, vous êtes le héros en majesté du film de Gilles Perret,
L’Insoumis, fruit d’un reportage au long cours durant votre campagne présidentielle de 2017. Honnête en ce qu’il vous montre parfois sans fard (donc aimable ET détestable), engagé car ne donnant pas la parole à vos adversaires, on pourrait le taxer de « film de propagande ». Terme que nous réfutons pour ne pas faire injure au grand Eisenstein qui, lui, faisait du cinéma et non du documentaire télévisé pour grand écran. Surtout, en le voyant, comment ne pas penser à ces albums que vous feuilletiez peut-être, avant d’avaler Hegel et Engels, Marx et Marcuse : les Martine de Gilbert Delahaye et Marcel Marlier ? Que voit-on en effet ici ? Jean-Luc boit de l’eau (au début de la campagne) et du vin (rouge, évidemment). Jean-Luc donne des cours d’histoire avec plein de mots tirés du catéchisme de gauche : révolution, bourgeoisie, rapports de production, grève, etc.
Jean-Luc va à Rome pour nous rappeler comment sont nés, en 494 avant J.-C., les tribuns du peuple (suivez mon regard…) et combien l’enfant de Tanger qu’il est se sent mieux au bord de la Méditerranée que sur les terres d’Europe du Nord (ce dont on ne saurait le blâmer). Jean-Luc voyage : dans une ferme bio de l’Oise, sur un chantier naval à Concarneau, sur les plateaux des chaînes de télévision.
Jean-Luc tient des meetings à Lyon, Marseille ou Paris et défile (au son de L’Internationale, tant qu’à faire). Jean-Luc essaie des vestes (brillantes, en cuir ou ressemblant à un uniforme de l’Armée rouge) pour sa prestation hologrammesque.
Jean-Luc peste contre les journalistes (« C’est l’ennemi,
France 2 », « C’est des ordures ! », etc.). Jean-Luc cite le président Mao (« Une seule étincelle peut mettre le feu à la plaine »), ce qui témoigne, de la part d’un ex-trotskiste, d’un grand esprit de tolérance. Ou de l’influence croissante de Gérard Miller.
Ne manque, à la fin du film, au lendemain de sa défaite, que : Jean-Luc à la plage.
Post-apostrophum : si Mélenchon est Martine, qui est Patapouf ?