1917-1918 : L’ART FRANÇAIS DE LA GUERRE AUX ÉTATS-UNIS
CAMP BEAUREGARD, de François Malye, Les Belles Lettres, 172 p., 21 €.
Préfacier de cet étonnant récit, Franz-Olivier Giesbert rappelle que contrairement à la mode actuelle de l’autoflagellation, nous n’avons pas à rougir de nos aïeux ; François Malye, grand reporter au Point, moins que tout autre. Buriné par des années de combat au front où il était passé du grade de sous-lieutenant de réserve à celui de capitaine et bientôt de commandant, son grand-père, Jean Malye, a appartenu à la phalange d’officiers français anglophones dépêchés aux Etats-Unis en 1917 pour y instruire leurs camarades de la jeune armée américaine. Une troupe vaillante, certes, mais ignorante des réalités de la guerre au contraire de son homologue tricolore, alors au zénith d’une puissance qu’elle ne retrouvera plus jamais. D’où le séjour du commandant Malye et de sept compatriotes dans ce camp Beauregard, en Louisiane, qui donne son titre au livre.
Parmi ceux d’autres officiers en mission outre-Atlantique, son petit-fils nous livre le portrait d’un intellectuel dont le patriotisme n’excluait pas l’originalité. Fin dingue de culture gaélique, un temps épris de la soeur de Seán MacBride (futur prix Nobel de la paix 1974), Jean Malye adhère secrètement avant-guerre au mouvement indépendantiste irlandais, le Sinn Féin sous le pseudonyme de « Seán O’Malley ». Une singularité bien utile quand, nouvelle mission, on le chargera de convaincre les IrlandoAméricains de participer activement à l’effort de guerre des Etats-Unis, fût-ce aux côtés de l’Angleterre honnie… Elle l’avait déjà conduit à devenir en 1913 le secrétaire particulier de Maurice Barrès, dont il partageait la quête passionnée des racines nationales. Au-delà de ce personnage hors norme, c’est la rencontre entre une France plongée dans la guerre depuis trois ans et l’allié américain encore faible mais prêt à son futur rôle de superpuissance que retrace Malye. Son souci de la précision et son sens de la mesure lui permettent d’éviter le piège des trémolos et des fioritures familiales.
Good job !