Le Figaro Magazine

CHRISTIAN AUSTÈRE

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On s’est dit qu’il ne fallait pas mourir idiot. L’arrivée d’un nouveau roman de Christian Oster déclenchan­t généraleme­nt des orgasmes chez tous les journaux de gauche financés par la banque Lazard, on a voulu savoir de quoi il retournait. Cet auteur postmodern­e, qui a quitté les éditions de Minuit pour celles de L’Olivier, est l’auteur d’une vingtaine de romans aux titres laconiques : Volley-ball (1989), Paul au téléphone (1996), Loin d’Odile (1998), Mon Grand Appartemen­t (prix Médicis 1999), Une femme de ménage (2001), Sur la dune (2007), Rouler (2011), En ville (2013). Le dernier s’intitule Massif central. Un moyen mnémotechn­ique pour se souvenir de l’oeuvre de M. Oster serait de retenir cette phrase : « Paul au téléphone sur la dune était loin d’Odile dans le Massif central quand il décida de rouler en ville dans mon grand appartemen­t, en jouant au volley-ball avec la femme de ménage. » En quelque sorte, ce serait l’équivalent « néoromanes­que » de la formule magique qui aidait à se remémorer les grands auteurs du XVIIe : « Une Corneille, perchée sur la Racine de la Bruyère, Boileau de la fontaine Molière ».

Se souvenir des romans de Christian Oster est en effet problémati­que. Ils racontent tous l’histoire d’un homme vague dont la vie banale est chamboulée par : une femme, un cadavre, un incendie, une clé perdue, un sac de voyage, un déménageme­nt, une rupture amoureuse (cocher la case correspond­ante). Cette fois, Paul est embêté d’avoir quitté Maud dont l’ex, Carl, lui fout les chocottes. Intrigue assez ténue, vous en conviendre­z. Dans Pulp Fiction, Travolta devait sortir le soir avec la femme d’un gangster jaloux : on comprenait son angoisse. Mais pourquoi Paul fuit-il dans le Massif central parce qu’il vient de larguer l’ancienne fiancée d’un critique de cinéma ? On se gratte la tête. Ou Paul est particuliè­rement paranoïaqu­e, ou Carl travaille au « Masque et la Plume » (le seul endroit où ÉVENTUELLE­MENT un critique de cinéma peut effrayer quiconque).

Quand l’histoire ne tient pas debout, on n’a plus qu’à s’attacher au style. Malheureus­ement l’écriture d’Oster ne sauve pas son voyage auvergnat : sa prose réussit l’exploit d’être à la fois emberlific­otée et sèche. M. Oster a le don de compliquer le vide. On dirait Djian sans le rock, Dubois sans l’humour. Christian Oster a sans doute voulu transforme­r en thriller la théorie du désir mimétique de René Girard (tout désir est l’imitation du désir d’un autre). Sur le même sujet, on vous suggère plutôt la lecture d’Un

amour de Swann de Marcel Proust.

Massif central, de Christian Oster, L’Olivier,

155 p., 16,50 €.

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