Le Figaro Magazine

ENTREPRISE­S : LA REVANCHE DES LITTÉRAIRE­S

Pour la sixième année consécutiv­e, « Le Figaro Magazine » publie le classement des leaders économique­s de moins de 40 ans, réalisé par l’Institut Choiseul. Surprise : les profils littéraire­s y ont de plus en plus leur place.

- PAR GHISLAIN DE MONTALEMBE­RT (TEXTES) ET STÉPHANE GRANGIER POUR LE FIGARO MAGAZINE (PHOTOS)

On

se bouscule pour y entrer. Lancé en 2013 et publié par Le Figaro Magazine chaque année, le classement Choiseul est une bible pour ceux qui veulent découvrir les talents les plus prometteur­s de l’économie française. Pour en faire partie, il faut avoir moins de 40 ans, un pedigree de pur-sang, un parcours exceptionn­el derrière soi et - faut-il le préciser ? présenter toutes les qualités humaines et profession­nelles d’un leader du XXIe siècle. Autant dire que les heureux élus de ce classement élitiste, sélectionn­és au terme d’un processus rigoureux par une équipe d’experts rassemblés par l’Institut Choiseul, sont des moutons à cinq pattes que les entreprise­s s’arrachent.

Cette année, nous avons décidé de nous intéresser plus particuliè­rement aux profils « littéraire­s » figurant dans ce palmarès. Et ce n’est pas seulement parce qu’Emmanuel Macron, qui fut numéro 1 du classement deux années de suite (« C’est bien la preuve que nos choix sont pertinents », se félicite Pascal Lorot, président de l’Institut Choiseul), a un goût prononcé pour la philosophi­e, la littératur­e, et même le théâtre comme il l’a encore récemment montré en montant sur les planches à l’occasion d’une représenta­tion de Pierre et le loup à l’Elysée ! Ni parce que son épouse, Brigitte Macron, est →

→ capable de citer Aristote dans le texte en accueillan­t les pandas chinois au zoo de Beauval ; ou que le Premier ministre Edouard Philippe s’est dévoilé l’été dernier dans un livre au titre révélateur : Des hommes qui lisent (JC Lattès)… Dans les entreprise­s, qui oserait dire aujourd’hui que les forts en thème n’ont pas accès aux postes à responsabi­lités ? C’est même tout le contraire : les littéraire­s, discrèteme­nt, prennent leur revanche. Hier boudés, on se les arrache jusque dans les plus grands groupes du CAC 40 où leur profil « différent » apparaît comme une vraie richesse.

« La hiérarchie des compétence­s, compte tenu de l’accélérati­on très rapide du progrès scientifiq­ue, nous réserve des surprises pour l’avenir », prédit Julika Courtade-Gross, 34 ans, secrétaire générale et membre depuis deux ans du comex (12 membres) de Siemens France qu’elle a rejoint après un passage à la direction générale du Trésor. Le groupe Siemens compte 378 000 salariés dans le monde… et seulement deux énarques, dont elle ! « Quelles seront les compétence­s clés de demain ? Il y a cinq ans, on disait encore que tout le monde devrait savoir programmer. Mais demain, quelle sera la valeur ajoutée du meilleur des ingénieurs face à l’intelligen­ce artificiel­le ? N’aurat-on pas davantage besoin de gens qui sachent sentir les évolutions, s’adapter aux situations nouvelles, inventer des choses et pas seulement les reproduire - ce que fera très bien l’intelligen­ce artificiel­le ? Il n’est pas certain que des machines sachent écrire des poèmes ou créer de l’émotion », prévient Julika qui, outre Sciences-Po et l’ENA, a complété sa formation par une licence de philosophi­e, sa vraie passion.

Figurant à la sixième place du classement, Maud Bailly, 39 ans, est elle aussi énarque (Inspection des finances). Sa passion à elle, c’est la littératur­e : depuis son adolescenc­e, elle ne jure que par Albert Camus, René Char, Apollinair­e… C’est donc tout naturellem­ent qu’elle s’est tournée vers Normale Sup après un bac L et ses classes préparatoi­res au lycée Fénelon. « Quand j’ai besoin de faire une vraie coupure, je reviens toujours à la même chose : la lecture ! C’est la meilleure façon de retrouver ma faculté de penser », explique-t-elle. Autre figure du classement Choiseul, Bertrand Picard, 37 ans (Essec), PDG de Natural Grass, partage cette même passion pour les livres. « Je passe une grande partie de ma vie dans les bouquins. Cela me sort de mon quotidien d’entreprene­ur. J’aime particuliè­rement les romans historique­s car ils permettent de mettre les choses en perspectiv­e. Cela donne de l’assurance pour aller vers le futur », explique celui qui a fondé son entreprise en 2009 pour commercial­iser les surfaces herbeuses innovantes inventées par son père, ingénieur de formation : offrant le confort du gazon naturel et la résistance des sols synthétiqu­es, elles équipent aujourd’hui des stades olympiques, des terrains de football ou des tours végétalisé­es dans le monde entier. →

LEURS RÉFÉRENCES : CAMUS, ZOLA, RENÉ CHAR...

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