100 Salon Maastricht, centre du monde des arts
Seize nouveaux participants, dont plusieurs Français ; une plus grande diversité ; un modèle qui s’exporte… La TEFAF fait feu de tout bois cette année.
Hors salon, point de salut. Les galeries sont désertées. Les amateurs d’art, une clientèle internationale et pressée, préfèrent fréquenter les foires où, en une soirée, ils font le tour du marché, rencontrent les gens du métier, comparent les oeuvres et les prix. Aussi ces grand-messes artistiques se multiplient-elles dans le monde entier. Même la TEFAF qui, depuis longtemps, tient le haut du pavé à Maastricht, a fait des petits et lancé sa « marque » aux Etats-Unis. Associés à des organisateurs de salons américains, nos Néerlandais ont mis sur pied deux éditions de TEFAF New York, au printemps et à l’automne. Résultat, certains de ses exposants fidèles, préférant miser sur les collectionneurs d’outre-Atlantique et, faute de pouvoir renouveler leur stock assez vite, renoncent à la manifestation hollandaise. Mais qu’on ne s’inquiète pas, ils sont aussitôt remplacés ! C’est le jeu des chaises musicales – des chaises estampillées, bien sûr. Seize nouveaux participants sont attendus cette année à Maastricht dont un important contingent de Français. Voilà près d’une décennie que la Galerie Chenel, spécialiste d’archéologie, a posé sa candidature. « Que de patience et de persévérance… », soupire Olivier Chenel. Pour croiser les conservateurs de musées qui nous intéressent, c’est à Maastricht qu’il faut être, plus qu’à Manhattan. » Enfin il y est, heureux et fier ! A ses côtés, on remarquera une Aphrodite. De la fin de l’époque hellénistique, la déesse en marbre est agrémentée d’un drapé qui glisse le long de ses cuisses et dévoile sa nudité. Séduisante de face et de dos…
La Galerie Zlotowksi, sise rue de Seine à Paris, trépignait en liste d’attente depuis cinq ans. Le programme qu’elle
a proposé cette année semble avoir remporté les suffrages. Il prévoit d’accrocher d’un côté des dessins abstraits de Fernand Léger, de l’autre des collages aux taureaux particulièrement inspirés de Le Corbusier. Zlotowski est rejoint dans la section dite Paper par la Galerie de la Présidence. Bien que merveilleusement située devant le palais de l’Elysée, l’enseigne ne peut plus espérer rencontrer des clients de passage… Protection bunkérisée de l’élu de la République oblige, les citoyens se voient, ô scandale, interdits d’emprunter le trottoir d’en face ! Les dames de la Galerie de la Présidence se doivent donc de voyager. Elles abordent Maastricht avec des scènes de plage d’Eugène Boudin, délicats pastels ou aquarelles, et un ensemble poignant de dessins de guerre d’Otto Dix. Le changement le plus notable s’opère, cependant, dans la section « Design ». Les nouveaux exposants illustrent des spécialités qui manquaient. Marc Heiremans, un Belge, apporte des verreries de Murano. La galerie Jousse Entreprise déploie du mobilier d’architectes de la seconde partie du XXe siècle. Thomas Fritsch est féru de céramiques françaises des années 1950-1960 ; pour séduire les visiteurs espérés, il veut bien remonter le temps et dévoile un vase d’époque Art déco peint de baigneuses par Raoul Dufy. Oscar Graf, qui participait il y a deux ans à la Showcase, petit coin de la foire réservé aux jeunes marchands prometteurs, a fait ses preuves. Le voilà dans le saint des saints. Fils d’un décorateur introduit auprès d’esthètes fortunés, Oscar se passionne pour les créations, céramique, mobilier, orfèvrerie, nées autour de 1900, annonciatrices de la modernité. Son stand sur le thème « From Moscow to Glasgow » ne passera pas inaperçu. Un fauteuil spectaculaire y trône, sculpté d’oiseaux par Serge Malioutine dans la Russie prérévolutionnaire ; il n’en existerait que cinq exemplaires au monde dont quatre dans des musées russes. Quant à sa paire de vases monumentaux de Georges Hoentschel, en grès et bronze doré, elle figurait à l’Exposition universelle de Paris en 1900, manifestation mythique de la France glorieuse. Un mot, enfin, sur la section Modern où l’on voit arriver notre star nationale, Emmanuel Perrotin, une première. Pour défendre plasticiens contemporains et artistes « historiques », tel Hartung ou Soulages, ce chef d’entreprise autodidacte a ouvert des galeries à Paris, New York, Hongkong, Séoul, Tokyo… A peine revenu d’une foire à Cape Town et d’une autre au Japon, il vient conquérir Maastricht. Belle vitalité !
LAURENCE MOUILLEFARINE TEFAF Maastricht 2018, du 10 au 18 mars, Tefaf.com/fairs.