Le Figaro Magazine

98 L’affiche/Les passe-temps d’Eric Neuhoff

- D’ÉRIC NEUHOFF

Il n’est jamais aussi original que quand il fait du Moby ! Le New-Yorkais, auteur de deux précédents albums punk indignes de son exceptionn­elle créativité, renoue avec le genre electro enrichi de sonorités pop, trip hop… Sans atteindre les sommets d’intensité de Play (ce disque de 1999 resté dans toutes les mémoires), mais nettement supérieur à Innocents (2013), Everything Was Beautiful, and Nothing Hurt * dégage une belle cohérence en dépit de la multiplici­té des styles visités. Outre la qualité des morceaux, volontiers aériens et portés notamment par des choeurs gospel, Moby a visiblemen­t retrouvé le sens du rythme ainsi que le goût du plaisir et de la sérénité. Comme la plupart de ses pairs, il n’oublie pas de se mobiliser en faveur du genre humain avec un message convenu qui exhorte les foules à reprendre espoir dans un monde nouveau, loin du chaos. Présenté comme un « Monsieur Tout-leMonde » depuis ses débuts, il est certes très légitime dans ce rôle de porte-voix...

PIERRE DE BOISHUE * Because Music.

THÉÂTRE

SHAKESPEAR­E UN JOUR…

Qu’il est bon de constater, même par une mise en scène épurée comme celle de Ned Grujic * avec Le Marchand de Venise, que les grands auteurs sont ceux qui éclairent le mieux notre temps. Dans la Vénitie de Shakespear­e, comme dans la France du XXIe siècle, tout se paye. Mais que sont ces valeurs mercantile­s face à la religion ? En suivant le destin d’Antonio, le riche marchand chrétien, de l’usurier juif Shylock, du jeune Bassanio et de la belle Portia, incarnés avec grâce par les fabuleux comédiens du Naxos Théâtre, les questions posées par le grand Will font plus que jamais rimer auteur et hauteur. CLARA GÉLIOT * Lucernaire, Paris VIe, jusqu’au 1er avril.

CINÉMA

LE BOSS DUBOSC

Trente-deux ans après ses débuts devant la caméra, il a osé passer derrière pour raconter une histoire de son point de vue. A 54 ans, Franck Dubosc sort ainsi Tout le monde debout *, une comédie sentimenta­le sur fond de handicap dans laquelle il séduira, à partir d’un gros mensonge, la lumineuse Alexandra Lamy. Après avoir écrit et mis en scène ses spectacles et collaboré à l’écriture de nombreux films, Dubosc aurait-il trouvé en cette expérience un nouveau métier à explorer ? « J’ai beau avoir franchi le pas, je ne me considère pas encore comme un réalisateu­r mais comme celui de Tout le monde debout », assure-t-il humblement. Avant de réaliser un second film, il se laissera donc guider par son acolyte de Camping, Fabien Onteniente, pour camper un touriste immergé dans un camp de vacances « tous frais payés ». L’occasion de vérifier que tout le monde se lève pour Dubosc. C. G.

* En salles le 14 mars.

Il n’y a pas que Carmen. D’autres héroïnes se révoltent contre leur destin de victimes. Ce salubre mouvement ne fait que commencer. Femmes de celluloïd et de papier, levez-vous ! Alors cette gourde de Madame Bovary n’avale plus d’arsenic. Elle part en charter pour les Seychelles avec Rodolphe. Dans le motel de Norman Bates, Janet Leigh sort de sa douche sans encombre. La dernière image de Psychose montre Anthony Perkins empaillé dans son fauteuil. A la fin de Love Story, c’est Oliver qui meurt d’un cancer. Dans Gatsby, Daisy est une fille formidable qui abandonne son horrible mari pour suivre le brave héros. Tartuffe retrouvera Harvey Weinstein dans une clinique de désintoxic­ation sexuelle. Dans A bout de souffle, ça n’est pas Jean Seberg qui dénonce Jean-Paul Belmondo : il tombe quand même sous les balles de la police rue Campagne-Première. Anna Karénine ne se jette plus sous un train. Pour plus de sûreté, l’action sera transposée en France où les grèves de la SNCF permettent d’éviter ce genre de tragédie. Dans les westerns de John Ford, John Wayne sera remplacé par Elizabeth Taylor. Dans La cage aux folles, Albin et Georges seront interprété­s par des actrices. Dans Le mépris, il n’est pas question que Brigitte Bardot se tue dans un accident de voiture : elle finit ses jours en compagnie du riche producteur dans la villa de Malaparte. En revanche, dans Le Samouraï, Alain Delon continue à être abattu par les inspecteur­s sous les yeux d’une pianiste noire qui n’arrête pas de jouer. Le ménage se doit d’être radical. Dans les romans, des correcteur­s sourcilleu­x seront chargés de compter les « e » muets. Au cinéma, on vérifiera que les génériques appliquent la parité. Quant à nous, nous veillerons désormais à ce que cette chronique se termine par une épithète féminine. Gagné.

Femmes de celluloïd et de papier, levez-vous !

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MUSIQUE THÉÂTRE EXPO
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