Le Figaro Magazine

LA PAGE HISTOIRE

Avec ce quinzième tome, l’édition intégrale de la correspond­ance de Napoléon Bonaparte est achevée. Une entreprise colossale.

- Admirable travail. LA PAGE D’HISTOIRE DE JEAN SEVILLIA

de Jean Sévillia

Nous sommes le 19 juin 1815. La veille, Napoléon a été battu à Waterloo, mais il ne veut

pas croire qu’il est fini. « Tout n’est point perdu, écrit-il à son frère Joseph. Je suppose qu’il me restera, en réunissant mes forces, 150 000 hommes. Les fédérés et les gardes nationaux qui ont du coeur me fourniront 100 000 hommes ; les bataillons de dépôt, 50 000. J’aurai donc 300 000 soldats à opposer de suite à l’ennemi… » Vain rêve : trois jours plus tard, l’Empereur abdique définitive­ment, prélude à son départ pour Sainte-Hélène. Un an plus tôt, ce sont ses affaires familiales et sentimenta­les qui s’étaient effondrées. Le 18 août 1814, de l’île

d’Elbe, il avait écrit à l’Impératric­e : « Ma bonne Louise, je t’ai écrit souvent. Je suppose que tu as fait de même ; cependant je n’ai reçu aucune de tes lettres depuis celle de quelque jour de ton départ de

Vienne. Je n’ai reçu aucune nouvelle de mon fils. » MarieLouis­e, après avoir renoncé à le rejoindre en exil, s’était réfugiée chez son père, en Autriche, avant d’hériter du duché de Parme et de se consoler dans les bras de Neipperg. Le 25 juillet 1817, parlant de lui à la troisième personne, Napoléon se plaindra à Hudson Lowe, le gouverneur de Sainte-Hélène : « Vous avez mal calculé la hauteur où le malheur, l’injustice et la persécutio­n de votre gouverneme­nt et de votre conduite ont placé l’Empereur. Il a plus qu’une couronne impériale sur la tête ; il a une couronne d’épines. » Tout n’est qu’affliction et désespoir dans ces lettres qui couvrent les années 1814 à 1821. Ce dernier tome de la correspond­ance de Napoléon clôt un gigantesqu­e projet éditorial lancé en 2002 : quinze volumes parus en dix-sept ans, 40 497 lettres publiées, dont 58 % ne figuraient pas dans l’édition de la correspond­ance parue sous le second Empire, 19 000 notices biographiq­ues et 456 collaborat­eurs. Une oeuvre colossale assurée par la Fondation Napoléon et ses correspond­ants, assistés par les meilleurs spécialist­es du Consulat et du premier Empire. L’objectif est atteint : « Revenir aux sources afin de publier des textes les plus fidèles possibles aux originaux (expédition) et de rendre aux textes déjà publiés leur intégrité ». Correspond­ance générale de Napoléon Bonaparte, publiée par la Fondation Napoléon, tome XV, « Les Chutes, 1814-1821 » et « Supplément 1788-1813 », Fayard, 1 484 p., 54,90 €.

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